La femme de chambre qui accuse Dominique Strauss-Kahn de crimes sexuels a déclaré jeudi qu'elle ne voulait pas que ce qu'elle a subi "arrive à d'autres femmes" et qu'elle voulait "être courageuse pour toutes les femmes du monde".
"Avec ma fille, je pleure tous les jours (...) Nous n'arrivons pas à trouver le sommeil", a-t-elle confié avant de remercier tous les soutiens qu'elle a reçus depuis le début de l'affaire. "Je ne veux pas que ce qui m'est arrivé arrive à d'autres femmes", a-t-elle ajouté devant plusieurs dizaines de journalistes. "Beaucoup de choses que l'on dit sur moi ne sont pas vraies", a-t-elle affirmé au cours de cette courte allocution de trois minutes.Au cours de son intervention, la femme de chambre a reproduit un dialogue
qu'elle a eu avec sa fille de 15 ans. La Guinéenne a ainsi indiqué que sa fille
lui avait demandé "d'arrêter de pleurer".
En costume pantalon sombre et chemisier blanc, parlant doucement,
manifestement nerveuse, Nafissatou Diallo n'a répondu à aucune question. Elle a
quitté le centre, traquée par des caméras, avant la fin de la conférence de
presse qui se poursuivait avec des responsables de la communauté noire.
Des poursuites au civil en cas de non-lieu
Son avocat Kenneth Thompson, prenant la parole avant elle, a déclaré: "nous
prenons position pour toutes les femmes qui ont été victimes d'agressions
sexuelles autour de la planète".
Il a ensuite une nouvelle fois insisté sur le fait que même si la justice
concluait à un non-lieu au pénal, sa cliente engagerait des poursuites au civil
pour demander des dommages et intérêts: "si les procureurs ne portent pas cette
affaire devant un tribunal, il faudra que nous obtenions justice et je
m'empresserai de porter cette affaire devant un jury", a-t-il dit.
Tristane Banon dit "la vérité"
L'avocat a aussi estimé que Tristane Banon, qui a porté plainte pour
tentative de viol contre DSK en France, "dit la vérité".
L'intervention publique de Nafissatou Diallo s'est déroulée dans un centre
communautaire chrétien situé à Canarsie, un quartier pauvre du sud de Brooklyn
(sud-est de New York) au lendemain de l'audition, pendant huit heures, de la
victime présumée dans les bureaux du procureur de Manhattan.
La jeune femme, musulmane, était accompagnée, outre de son avocat Kenneth
Thompson, du pasteur A.R. Bernard, directeur de ce centre, de Mohammed
Nurhussien, président du United African Congress, et de plusieurs dirigeants
d'organisations de défense des femmes.
Une quarantaine de personnes d'origine
africaine se trouvaient debout derrière le podium aux côtés de Nafissatou Diallo.
"Toute la communauté guinéenne est derrière elle et la soutient", a affirmé
un responsable de la communauté guinéenne de New York en français. "Notre
culture" est très "dure" avec les victimes des agressions sexuelles, a-t-il
dit, soulignant que Nafissatou Diallo "a voulu transgresser cette barrière" et montrer
son courage.
DSK toujours inculpé de sept chefs d'accusation
Même si des doutes sont apparus sur la crédibilité de l'accusatrice et que
Dominique Strauss-Kahn a été libéré sur parole, l'ancien ministre a toujours
interdiction de quitter le territoire américain et il est toujours inculpé de
sept chefs d'accusation, notamment tentative de viol, agression sexuelle et
séquestration, qui peuvent lui valoir de nombreuses années de prison.
Mercredi, l'audition de Nafissatou Diallo a notamment porté sur une
conversation téléphonique qu'elle a eue au lendemain des faits présumés avec un
ami emprisonné en Arizona pour une affaire de drogue.
"La victime n'a jamais prononcé ces mots"
Début juillet, le New York Times avait révélé l'existence de cette
conversation au cours de laquelle Nafissatou Diallo aurait affirmé en parlant
de DSK: "Ce type a beaucoup d'argent, je sais ce que je fais".
Cette conversation est l'un des éléments clés qui a fait vaciller
l'accusation, entraîné la libération sur parole de DSK, et jeté une ombre sur
les motivations réelles de cette femme qui affirme avoir été agressée
sexuellement le 14 mai dans une suite de l'hôtel Sofitel de New York.
A la sortie du bureau du procureur, Me Thompson a nié les propos rapportés.
"Certaines choses ont été mélangées dans cette citation qui a été donnée au New
York Times", a-t-il déclaré. "Nous avons écouté cet enregistrement et il montre
que la victime n'a jamais prononcé ces mots".
AFP