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Waste End : transformer ses déchets organiques en source d’énergie

© Black Box

Voici une innovation qui pourrait en intéresser plus d’un ! Lola Brousmiche et Nathan Pletinckx développent actuellement Waste End, une solution qui vise à valoriser les déchets alimentaires des petits " producteurs " et collectivités. Par un procédé naturel biologique, appelé "biométhanisation", la cuve proposée par ces deux jeunes entrepreneurs dégrade les déchets organiques pour les transformer en biogaz et en engrais.

En moyenne, 130 kg de denrées alimentaires sont gaspillés chaque seconde en Europe. Dans les collectivités, ces déchets alimentaires sont souvent jetés dans une benne avec le reste des déchets non alimentaires. La plupart du temps, cette benne est ensuite collectée et transportée vers un incinérateur. Plutôt interpellant quand on apprend qu’une étude de Bruxelles Environnement affirme que pour 1000 tonnes de déchets de cuisine envoyés en biométhanisation plutôt qu’incinérés, 124 tonnes de CO2 seraient évitées !

Interpellée par ce constat, Lola Brousmiche, diplômée en Ingénieur civil en chimie et science des matériaux à l’Université de Mons, a décidé d’agir en développant Waste End, une solution innovante qui permet de valoriser ses propres déchets avec deux avantages majeurs : la réduction du gaspillage et la production d’énergie renouvelable. Dans un premier temps seule dans ce projet, elle est rapidement rejointe par Nathan Pletinckx, diplômé en Ingénieur de gestion à l’UCLouvain FUCaM Mons. "Ayant tous les deux la fibre écologique et sociale, il était évident pour nous de lancer un projet qui nous permettait d’être acteurs de la transition, ici en limitant l’impact des déchets organiques sur l’environnement", explique Nathan.

Waste End

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Comment ça marche ?

Concrètement, Waste End fonctionne un peu comme l’estomac d’une vache, ici remplacé par une cuve. "Au lieu d’être placés à la poubelle, les déchets alimentaires sont broyés et envoyés dans une cuve où les bactéries digèrent les matières organiques par un procédé biologique naturel. En l’absence d’oxygène, du biogaz se crée (le rot de la vache) et peut être utilisé comme "gaz naturel". La digestion va aussi générer un engrais idéal pour le jardin ou le potager (les déjections de la vache)." Le biogaz produit dans la cuve est composé de méthane (60%) et de CO2 (37%). Celui-ci passe par différents filtres avant d’être stocké et ensuite utilisé comme source d’énergie, en circuit fermé. "Comme le biogaz produit n’a pas la même concentration en méthane que le gaz naturel (98%), il ne peut pas être injecté dans le réseau préexistant du bâtiment. Il doit être branché à un appareil, par exemple une cuisinière, dédié à ce biogaz."

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La biométhanisation, bon pour l’environnement ?

Bien que le processus de biométhanisation produit un biogaz constitué principalement de deux importants gaz à effet de serre, cette production est considérée comme neutre en carbone et bénéfique pour lutter contre le réchauffement climatique.

Car, d'une part, la quantité de dioxyde de carbone rejetée correspond à celle captée pendant le cycle de croissance de la matière organique, son émission s'intègre donc dans le cycle de vie naturel de la biomasse. D'autre part, le méthane est un gaz dont le pouvoir réchauffant est jusqu’à 86 fois plus important sur une période de 20 ans et 28 fois plus élevé sur une période de 100 ans que celui du CO2"Et l’une des solutions pour réduire la quantité de méthane libérée dans l’atmosphère est de le capturer à la source pour le valoriser sous forme énergétique, en circuit fermé. Donc, la biométhanisation." 

Le biogaz est considéré comme une énergie renouvelable et peut être produit localement. Il peut donc favoriser notre indépendance énergétique et la création d’emplois non délocalisables. De plus, le digestat produit, une fois certifié, est également valorisable pour l’enrichissement des sols, ce qui permet de réduire les besoins en engrais chimiques, plus polluants.

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De 10.000 à 70.000 euros en fonction de l’installation

Pour produire son propre biogaz, les collectivités vont devoir dépenser entre 10.000 et 70.000 € selon la capacité de digestion de la cuve. "Ce prix comprend un contrat de maintenance, car il ne faut pas faire n’importe quoi…c’est tout de même du gaz." Cela peut sembler assez coûteux et pourtant, cette solution serait rentable sur le long terme. Waste End affirme un retour sur investissement de l’ordre de six à sept ans. "Dès le début, on a voulu avoir un projet positif pour l’environnement. Mais, dans notre monde actuel, ça ne suffit pas pour attirer les clients. Si ce n’est pas rentable, personne n’achète."

Selon leur propre calculateur, une cuve moyenne capable de digérer 40 kg de déchets alimentaires par jour vous permettra de produire 28 kWh/jour, d’éviter 5 kg/jour de CO2, de créer 52 kg d’engrais et enfin d’économiser 5180 €/an. "Car, au-delà du coût de l’énergie qui est en train d’exploser en Belgique, le fait de faire retirer ses déchets par un prestataire externe coûte très cher. Si une collectivité produit 40 kg de déchets par jour, cela équivaut à plus de 14 tonnes par an. Si ces 14 tonnes sont digérées par la cuve Waste End, cela représente une belle économie auprès du prestataire externe… De plus, une fois certifié, l’engrais peut être valorisé."

À destination des collectivités et non des ménages

L’entreprise peut actuellement produire et installer des cuves pouvant accueillir en moyenne 10 à 70 kg de déchets par jour. "Un ménage ne peut donc pas bénéficier de notre solution à la maison. Ou alors, c’est qu’il produit beaucoup trop de déchets", sourit Nathan. La jeune entreprise s’adresse donc aux petits " producteurs " et collectivités. "Nos clients idéaux sont les maisons de repos, les restaurants, les écoles, les PME, etc." De plus, il faut avoir un espace suffisamment grand pour accueillir la cuve. "Une installation moyenne mesure six mètres sur trois au sol et environ trois mètres de hauteur. Mais nous n’avons pas encore suffisamment travaillé sur l’optimisation du volume."

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Projets pilotes et lancement commercial

Actuellement, Waste End est dans une phase de prototypage. L’entreprise a installé une cuve à la maison de repos et de soins La Providence à Lessines et une autre au Resto du Cœur de Charleroi. "Ce dernier va ainsi pouvoir préparer ses 40 litres de soupe, chaque jour, grâce à la biométhanisation."

La phase de prototypage devrait être terminée pour l’été 2023. Date à partir de laquelle de nouveaux clients pourraient bénéficier de cette solution innovante. Lola et Nathan espèrent atteindre rapidement le seuil de rentabilité pour pouvoir engager du personnel et intégrer un aspect social supplémentaire à leur projet. "Étant donné que notre produit n’existe nulle part ailleurs, techniquement, personne n’a pu se former à sa maintenance. Nous voudrions donc engager des profils qui ont plus de mal à s’intégrer et s’établir sur le marché du travail."

Leur objectif à moyen terme est d’éviter 50 tonnes de CO2 chaque année, grâce à la biométhanisation. "Avec 30 cuves installées, on peut déjà s’en rapprocher. Et ici, je ne prends en considération que l’aspect traitement des déchets, même pas les transports que notre solution permet d’éviter."

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