"Pour être francs avec vous, ces manipulations chez VW ne seront plus jamais permises. Mesdames et messieurs de milliers de personnes à travers le monde croient en nous, nos voitures et nos technologies. Je suis profondément désolé que nous ayons brisé cette confiance. Je voudrais présenter des excuses à nos clients, aux autorités et au public pour cette mauvaise conduite. Veuillez croire que nous ferons tout pour réparer les dommages, et nous ferons tout ce qui sera nécessaire pour regagner votre confiance pas à pas."
De l’autre côté de l’atlantique, les aveux sont plus directs. Ce 22 septembre Michael Horn le patron de VW aux États-Unis se présente sur une scène prévue pour l’inauguration d’un bâtiment de la marque à Chicago. Micro Madonna, chemise ouverte, on dirait un Keynote de Steve Jobs. Mais la détente n’est qu’apparente.
Nous avons complètement merdé
“Nous avons complètement merdé”, sur les manges-debout installés pour l’événement, les vendeurs de la marque sont bouche bée, d’autres essaient d’applaudir, comme pour soutenir leur patron. Qui continue : "Nous allons réparer ces voitures. Nous allons faire en sorte que ça n’arrive plus jamais, faire les choses correctement envers le public, le gouvernement, les clients, les employés et les vendeurs. Ce genre de comportement, je vous le dis de tout mon cœur, est incompatible avec nos valeurs."
Aveux made in germany, sur le bout des lèvres, aveu made in USA plus directs, deux cultures s’opposent ce jour-là. Sans doute Michael Horn, envoyé en Amérique, pressent-il la gravité de ce qui se joue. Parce qu’aux Etats-Unis, rien n’est pire que le mensonge, le parjure. Le respect des règles y est beaucoup plus strict qu’en Europe. Voici comment les Etats-Unis ont coincé le géant industriel.
2006, la stratégie du "Diesel propre"
Pour bien comprendre, il faut remonter en 2006. Cette année-là, le groupe VW constate une lente et irrémédiable érosion de ses ventes aux Etats Unis. Il est loin le temps du carton de la coccinelle et du combi adopté par la génération flower power. Le conseil d’administration de la marque décide d’une stratégie de reconquête de l’Amérique. Nom de code USA 2007. L’idée est d’introduire sur le marché américain le TDI, petit diesel qui cartonne en Europe.
Or, c’est bien connu, les Américains préfèrent les gros moteurs essence, mais le pari est de les convertir au diesel en jouant la carte de la faible consommation. L’idée est de surfer aussi sur la préoccupation pour l’environnement avec des diesels présentés comme propres. Tout le marketing de VW se met en branle, avec une recette des publicités originales et le plus souvent humoristiques.
Le marketing fonctionne à merveille. Les modèles sont confortables, peu coûteux et peu polluants. Ils cartonnent aux Etats Unis. VW en vend plus de 500.000. Mais, un grain de sable va venir gripper la splendide machine industrielle.
2014, le grain de sable
Début 2014, l’ONG ICCT (International Council on Clean Transportation) s’intéresse à ce phénomène des petits diesels. L’association a pour but de favoriser les transports propres. L’ONG veut démontrer que cette technologie peut permettre aux Américains de réduire leur consommation de carburant. Pour le prouver, l’ONG paie 50.000 dollars à l’université de Virginie pour des tests en situation, sur la route.
En mai 2014, l’ICCT reçoit les résultats commandés et ils sont étonnants, détonants plutôt. L’université à découvert des écarts considérables entre les rejets affichés sur papier et les rejets mesurés dans la réalité. Pour la Passat les émissions de Nox, un gaz irritant, responsable de décès prématurés, étaient 15 à 35 fois supérieures aux chiffres annoncés, un autre modèle de la marque une Jetta fait à peine mieux.
L’université ne s’explique pas une telle différence, VW non plus et considère l’étude comme invalide. C’est alors qu’entre en scène, Alberto Ayala. Il est le directeur adjoint du CRAB, l’administration chargée de contrôler la qualité de l’air en Californie. Alberto Ayala, n’a l’air de rien, un petit bureaucrate latino, sans doute pas très bien payé. Il va refaire les tests, avec les mêmes résultats. Alberto Ayala va demander au géant de s’expliquer. Durant des mois VW fournit des explications, mais aucune ne permet d’expliquer de telles différences entre les tests en laboratoire et les tests en situation réelle.
2015 VW craque
Début 2015 VW rappelle 500.000 voitures pour régler le problème. C’est un des plus vastes rappels de son histoire. Mais rien n’est réglé, Roberto Ayala continue de mesurer des taux de Nox beaucoup plus élevés que promis.