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Vivre dans un squat militant: désobéir pour faire valoir le droit au logement

Sujet squats Liège (en cours)

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Par Marie Bourguignon

Ils sont plusieurs centaines en Belgique à investir des lieux inoccupés pour y vivre. Ceux qu’on appelle les squatteurs sont généralement mal vu des médias ou du grand public. Nombre d’entre eux n’agissent pourtant pas dans une volonté de destruction, mais par réelle nécessité ou par conviction politique.

Nous sommes allés à la rencontre de ces derniers: ils ont la vingtaine et ont fait délibérément le choix de cette vie pour dénoncer le système.

Xavier, Youri, Romain et Amandine
Xavier, Youri, Romain et Amandine © RTBF

Cela fait seulement quelques jours qu'ils ont emménagé dans un bâtiment laissé à l'abandon, dans un quartier proche du centre-ville de Liège. Aujourd'hui, ils apportent les derniers meubles dont ils auront besoin. Amandine, Romain, Youri et Xavier sont ce qu'on appelle des squatteurs militants: "En squattant, ce qu'on veut faire passer en utilisant la désobéissance civile, c'est le droit au logement face à la propriété privée" explique Romain. "Des milliers de bâtiments vides qui ne sont pas utilisés, ou plutôt utilisés dans une logique d'enrichissement personnel, ou des multinationales qui rachètent énormément de bâtiments qui leur permettent de s'enrichir, et qui en fait spéculent sur les bâtiments".

On a appris à se débrouiller

Amandine a commencé à squatter il y a un peu plus d'un an, après les mouvements pour le climat et celui des gilets jaunes: "Après ça, je me voyais mal recommencer à travailler comme avant, et c'est à ce moment-là que j'ai commencé à squatter. J'avais envie de faire un truc qui me parle vraiment". Vivre en squat permet de développer de nouvelles compétences. Amandine nous emmène dans une ancienne salle de bain que les squatteurs souhaitent transformer en chambre. Elle s’affaire à réparer une fuite, là où se trouvait un évier. "Tout ce qui est un peu basique et essentiel, avoir l'eau, l'électricité, et bien au fur et à mesure, on a appris à se débrouiller. Moi je me suis spécialisée en plomberie" sourit-elle.

"J'avais envie de faire un truc qui me parle vraiment" explique Amandine.
"J'avais envie de faire un truc qui me parle vraiment" explique Amandine. © RTBF

On essaye, à notre échelle, de construire des logiques qu'on aurait envie de voir de façon plus globale dans la société

Dans la maison qu'ils occupent, il y a de la place pour 6 ou 7 personnes. Ici, pas de hiérarchie. Pour vivre en communauté, les squatteurs s'organisent de manière démocratique: "Ici, il y a notre garde-manger" explique Romain qui nous emmène dans la cuisine. "On récupère aussi de la nourriture, et quand on en a beaucoup, on essaye de la redistribuer à d'autres personnes. On s'arrange avec des magasins. Parfois, il y a des dons. Ça vient de plein d'endroits différents".

Dans ce squat, il y a également une volonté d’être juste d’un point de vue des dépenses. "Tout le monde n'a pas le même revenu" ajoute Romain. "Je suis salarié en ce moment, et donc moi, a priori, je vais participer plus au coût collectif que par exemple une personne qui est toujours étudiante et qui va avoir moins de moyens pour participer. C'est un exemple concret de comment on essaye, nous, à notre échelle, de construire des logiques qu'on aurait envie de voir de façon plus globale dans la société".

Willy Demeyer, bourgmestre de Liège
Willy Demeyer, bourgmestre de Liège © RTBF

Le bâtiment occupé par ces squatteurs appartient à la ville de Liège. Le pâté de maisons doit bientôt être rasé. En attendant, l'habitat reste vide.

Nous rencontrons le propriétaire des lieux, le bourgmestre de Liège, Willy Demeyer. A notre micro, il se dit plutôt favorable à la présence des squatteurs dans les bâtiments vides de la ville: "A partir du moment où un bâtiment est inoccupé, et où des personnes sont en recherche d'un logement, pourquoi s'opposer à une occupation si elle est organisée, si elle est respectueuse d'un certain nombre de règles. A ce moment-là, les gens sont logés d'une part, et d'autre part, le bâtiment est préservé".

On espère que, le plus rapidement possible, les gens n'auront plus besoin d'être dans l'illégalité pour avoir un toit au-dessus de leur tête

Pourtant, squatter reste illégal. De nombreuses idées reçues pèsent toujours sur les squatteurs, mais ceux-ci ont décidé de s'en détacher: "C'est chouette de se réapproprier cette image, de la revendiquer, et de la défendre même" confie Amandine. "Je pense que n'importe quel squatteur, squatteuse qui est dans le besoin et qui va juste prendre ce dont il a besoin, sans rien demander à personne, en se débrouillant, je trouve ça vachement balaise".

"C'est malheureusement nécessaire dans la société actuelle" poursuit Romain,  "et on espère que, le plus rapidement possible, les gens n'auront plus besoin d'être dans l'illégalité pour avoir un toit au-dessus de leur tête".

En Fédération Wallonie-Bruxelles, entre 45.000 et 60.000 logements sont inoccupés.

Immeubles inoccupés : des squatteurs parfois tolérés

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