C’est une question qui peut surprendre et pourtant elle apparaît en filigrane de notre PODCAST "Déclic – Le Tournant" de cette semaine qui s’interroge sur notre dépendance aux métaux. Ils sont de plus en plus présents dans notre quotidien sans qu’on s’en rende toujours forcément compte. Ils sont aussi de plus en plus stratégiques dans le cadre de la transition énergétique et de la révolution technologique.
Seulement voilà, aujourd’hui, l’Europe a très peu la main sur ces ressources qu’elle utilise pourtant abondamment. Le Néodyme nécessaire à la fabrication d’aimants surpuissants pour les rotors d’éolienne nous vient surtout de Chine, le Lithium (pour nos batteries) provient essentiellement d’Australie et d’Amérique du Sud, le Cobalt provient de République démocratique du Congo… et l’on pourrait citer quantité d’autres exemples.
Cette dépendance pose question sur plan économique. Le passé récent a montré que la Chine, par exemple, en limitant ses exportations pouvait faire flamber le prix de certaines matières. Elle pose aussi question sur le plan géostratégique puisque l’Europe a très peu de prise sur l’approvisionnement de certains métaux pourtant essentiel pour l’économie, pour la transition énergétique, etc. Elle pose enfin question sur le plan éthique puisque le fait de confier à d’autres pays l’exploitation de ressources que servent à notre consommation revient à délocaliser le coût environnemental et social de ses ressources.
"Ou alors on renonce au smartphone"
Tout cela nous impose-t-il de reconsidérer la possibilité d’ouvrir des mines en Wallonie ? Pour Eric Pirard, professeur en ressources géologiques et économie circulaire à l’Uliège, "on doit à tout le moins se poser la question… On ne peut pas continuer à profiter de toute une série de technologies en ignorant l’ensemble de l’activité industrielle qui est nécessaire pour les fabriquer. Je suis toujours très choqué quand on dénonce les exploitations minières comme étant très polluante… sans se rendre compte qu’on ne creuse pas des trous pour le plaisir. C’est notamment utile à la fabrication de nos smartphones… alors, soit on renonce au smartphone et on est cohérents, soit on accepte l’idée qu’il faut derrière ces smartphones toute une filière industrielle et des mines pour extraire les ressources primaires. On doit réconcilier chacun avec l’impact de sa consommation".
Le professeur en géologie de l’UNamur Johan Yans explique, lui, que l’Europe est en train de prendre conscience de cet enjeu. "Depuis deux bonnes décennies, l’Europe a entrepris un recensement des ressources qui se trouvent dans son sous-sol. On a donc une bonne idée aujourd’hui de ce qui est potentiellement envisageable comme exploitation en Europe. Reste maintenant, si on veut les exploiter, à en autoriser l’extraction… et là on sait que la population n’est pas favorable à l’ouverture de nouvelles mines en Europe… même si elles sont très différentes de l’image "Germinal" qu’on a des charbonnages, encore aujourd’hui dans notre imaginaire. Mais on ne peut pas ne pas se poser la question…".
Alors ira-t-on jusqu’à exploiter de nouvelles mines en Europe ? Quel potentiel aussi pour le recyclage, chez nous ? Jusqu’à quel point est on dépendant de la Chine pour nos métaux ? On traite de toutes ces questions dans notre nouvel épisode du " Tournant " à écouter intégralement ici.