A.D. : C’est aussi une question complexe. On voit qu’il y a un soutien américain et européen au niveau diplomatique et dans certains cas militaire ou logistique, par exemple. Par contre, on se dirige aussi, pour l’instant, vers des sanctions dure en cas d’invasion russe. Pas de réponse militaire. Rappelons que l’Ukraine n’est ni membre de l’Union européenne ni de l’OTAN, et cela à son grand regret.
On a longuement parlé avec une avocate retraitée de 72 ans. Elle était heureuse que l’on parle de tout cela ensemble et de pouvoir s’exprimer dans un média occidental. Elle nous a dit qu’elle est déçue des partenaires occidentaux et qu’elle est inquiète. Selon elle, une guerre est possible et on ne se sent pas en sécurité. Cette retraitée a une petite pension, dit-elle. Tellement petite, qu’elle n’a pas de quoi faire des réserves de nourriture et d’eau potable en cas de guerre. Et elle conclut que si l’Ukraine avait pu intégrer l’Europe, les Ukrainiens auraient peut-être pu accroître leur pouvoir d’achat.
Il y a donc, par rapport aux Occidentaux, une attirance et un sentiment de lassitude. L’Ukraine est un pays instable depuis au moins 2014 et ça se dégrade. Cela risque à nouveau de dégénérer, sauf si des solutions diplomatiques se dégagent.
Un Ukrainien qui habitait dans le Donbass et qui est propriétaire de quelques appartements sur place nous a expliqué qu’ils avaient perdu toute leur valeur. Pour cet homme, tout est perdu. Il a retravaillé d’arrache-pied et acheté un appartement à Kiev. A présent, la question est de savoir s’il va à nouveau tout perdre ? Mais aussi : Que faire ? Vendre ? Plusieurs personnes se posent la question. Et puis : Partir, mais pour aller où ? En Europe ?
La situation est donc très compliquée au niveau des sentiments des Ukrainiens par rapport à l’Europe.
J’ai aussi discuté avec un jeune homme qui vient de Crimée qui est réfugié à Kiev depuis l’annexion. Il dit que depuis la révolution, la population n’a plus peur du pouvoir de manière générale et l’omerta soviétique. Le pays, dit-il, a gagné en liberté d’expression et il est positif quant aux valeurs européennes. Mais il a peur qu’en cas d’invasion russe, ils perdent cette liberté gagnée.