Le président turc Recep Tayyip Erdogan a mis samedi en garde les médias contre la diffusion de nouvelles "contraires aux valeurs et à la morale du pays", après avoir limogé le ministre de la Justice et le responsable des statistiques de l’inflation à dix-huit mois de l’élection présidentielle.
"Il est devenu nécessaire de prendre des mesures afin de protéger (les familles, les enfants et la jeunesse) contre les contenus nocifs des médias", affirme M. Erdogan dans un décret publié samedi, un geste immédiatement interprété comme une nouvelle tentative de faire taire les critiques.
M. Erdogan appelle les autorités à intenter "des actions en justice" pour lutter contre "les effets destructeurs" de certains contenus dans les médias, sans donner davantage de précisions.
"Etat d’urgence contre les médias"
Le président Erdogan vient de déclarer "un état d’urgence contre les médias", outre les arrestations de journalistes, a écrit sur Twitter Faruk Bildirici, journaliste et ombudsman reconnu.
L’homme fort de la Turquie a également limogé le chef de l’Office national des statistiques, Sait Erdal Dincer, selon un décret paru samedi, après la publication des chiffres annuels d’une inflation record.
M. Dincer avait été critiqué après avoir publié début janvier des données qui placent le taux d’inflation annuel à 36,1%, son plus haut niveau en 19 ans, dû à la dégringolade de la livre turque.
"J’ai une responsabilité vis-à-vis de 84 millions de personnes", avait fait valoir Sait Erdal Dincer, expliquant au quotidien économique Dunya qu’il ne lui était pas possible de publier des chiffres de l’inflation différents de ceux constatés par ses services.
"Je suis aujourd’hui à la tête de ce service, demain cela pourrait être quelqu’un d’autre", avait-il dit dans cet entretien publié en janvier, comme s’il savait qu’il pouvait être rapidement limogé.
L’opposition a néanmoins déclaré que le chiffre officiel était sous-estimé, affirmant que l’augmentation réelle du coût de la vie était au moins deux fois plus élevée.