Concrètement, comment se déroule ce trafic dans le port d’Anvers ? Quels en sont les acteurs ? Il s’agit sur ce territoire d’une situation complexe, pour le directeur judiciaire de la police fédérale liégeoise : "Anvers est un ‘hub’, une porte d’entrée principale du trafic de cocaïne en Europe. En criminologie, on appelle ça un ‘terrain de chasse’. On y retrouve des groupes criminels qui y sont implantés ".
Les groupes criminels et autres mafias opèrent depuis qu’on appelle un ‘sanctuaire ‘ (soit le lieu d’implantation d’organisations criminelles). Le "terrain de chasse" et le "sanctuaire" ne se situent pas forcément au même endroit. "Sur Anvers, on a essentiellement des intermédiaires. L’aspect logistique aussi (pour récupérer la cocaïne) " explique François Farcy. C’est donc là qu’intervient aussi de la corruption.
Une corruption, parfois forcée, qui touche des corporations comme celles les dockers, les agents des douanes ou de sécurité, les transporteurs… Des criminels peuvent donc payer cher (plus de 20.000 euros) un grutier pour qu’il déplace un conteneur à un endroit bien précis pour faciliter la prise de marchandise illégale. "Ce sont des intermédiaires – corrompus ou forcés — qu’on retrouve sur le port d’Anvers".
Cette corruption n’est pas forcément voulue, cela peut aussi être de l’intimidation (jets de grenade…). On fait peur aux agents publics. "A partir du moment où c’est une personne-clé dont l’organisation a besoin pour rentrer dans le port, on va mettre la pression dessus ".
Une corruption qui n’est, rassure François Farcy, pour le moment pas la norme cependant. Notamment dans le cas de divers métiers de la fonction publique pouvant être confrontés au crime organisé (avocats, policiers, magistrats, agents publics divers et variés…). "Il y a beaucoup de corruption privée (ex : le docker qui déplace sa grue). Mais pour le moment on n’a pas découvert de corruption endémique. On ne peut pas parler d’un système corrompu du terrain jusqu’à la tête. On a des cas de corruption isolée, mais comme dans tout panier il y a de temps en temps des pommes pourries".
Anvers est un ‘hub’, une porte d’entrée principale du trafic de cocaïne en Europe
Notons qu’Anvers n’est pas la seule plaque tournante en Europe – Rotterdam est aussi dans l’œil du cyclone, tout comme Le Havre, Barcelone ou encore des ports du sud de l’Italie, sans compter les aéroports (Bierset, par exemple).