Ceci n'est pas un selfie

Thomas Orban, médecin généraliste et alcoologue : "Il faut peut-être s’occuper d’abord de ceux qui vont commencer à consommer"

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Par RTBF La Première via

Thomas Orban a co-écrit cette année le livre "L’alcool sans tabous. Spécial 12-35 ans", un ouvrage qui traite des dépendances à l’alcool, spécialement orienté jeunesse. Médecin généraliste, expert auprès du Conseil Supérieur de la santé et membre permanent de son groupe Santé mentale, membre de la Société française d’alcoologie, il se distingue par cet engagement sur un sujet dont les conséquences sont encore très largement banalisées. Portrait d’un médecin inspirant dans Ceci n’est pas un selfie !

Quand la formation scolaire déclenche une vocation

Pendant ses années d’études au collège Saint-Michel à Bruxelles, le jeune Thomas Orban a été particulièrement marqué par son cours de bio. "C’est là qu’est née ma vocation de médecin, parce que j’étais passionné par le corps. […] Je voulais être chercheur en biologie moléculaire, cellulaire. Je ne le suis pas devenu, mais ma fille l’est devenue".

Au fil de ses études de médecine, il a en effet découvert lors des stages qu’il adorait le rapport avec les gens, "que c’était quelque chose qui était fondamental, voire thérapeutique, d’être en lien avec quelqu’un (...) On existe en fait dans le regard de l’autre. S’il n’y a pas d’autre, on a du mal à exister. C’est toute la souffrance de la solitude dans notre société".

Thomas Orban dans Ceci n’est pas un Selfie
Thomas Orban dans Ceci n’est pas un Selfie © RTBF

Que pense-t-il de son métier de soignant ?

"C’est un métier dur en soi, parce que ce sont des choses qui sont difficiles à vivre […], ce sont des choses qui sont graves, où on peut se planter en disant un mot de travers, donc on doit être prudent et comprendre les gens au premier regard, ce qui n’est pas facile. Et c’est un métier difficile parce qu’il est peu considéré aujourd’hui, surtout au niveau des hommes politiques et de la manière dont ils gèrent la santé, c’est-à-dire essentiellement comme une question de pognon", déplore Thomas Orban.

Pourquoi cet intérêt pour la problématique de l’alcool ?

Si Thomas Orban est devenu un spécialiste des problèmes liés à l’alcool, c’est essentiellement par curiosité. Il avait été impressionné par le rôle de l’alcool dans le milieu estudiantin et dans les mouvements de jeunesse. Puis, en tant que médecin généraliste, il s’est rendu compte que l’alcool intervenait dans de nombreuses maladies.

"Et je me suis dit : mais comment se fait-il qu’on essaie de s’occuper de ces situations sans tenir compte d’un des facteurs principaux qui est l’alcool ? Voilà, c’est comme ça que c’est arrivé".

S’occuper de ceux qui vont commencer à consommer

Le livre qu’il a coécrit avec Vincent Liévin, L’alcool sans tabous. Spécial 12-35 ans, est né de l’idée que "si on voit tant de patients qui souffrent de cette maladie qu’est l’alcoolisme, il faut peut-être s’occuper d’abord de ceux qui vont commencer à consommer. Non pas pour leur dire de ne pas consommer, ce qui serait un message complètement inaudible".

Thomas Orban ne donne pas de leçons aux jeunes, il cherche plutôt à leur expliquer les effets de l’éthanol sur le corps, ainsi que sur les études. Un échec sur 4 ou 5 à l’université est lié à l’alcool.

"Je trouve qu’utiliser un produit en le connaissant, c’est quand même beaucoup mieux que d’utiliser un produit à l’aveugle".

On est dans une société qui fait comme si ce problème n’existait pas, observe Thomas Orban, alors qu’on sait qu’on paie un lourd tribut à ce produit. On peut parler de déni de la part des hommes politiques sur cette problématique. Et le secteur des alcooliers connaît très bien les techniques pour faire vendre de l’alcool.

On dit : je suis libre, je fais ce que je veux, donc je picole. Mais est-ce qu’on est vraiment libre quand on est matraqué par de la publicité sur l’alcool à longueur de journée ?

Encourager la multidisciplinarité

Les soins de santé sont en souffrance et c’est lié à une population qui vieillit, d’une part, et à des ressources financières qui ne sont pas infinies, d’autre part. Comment organiser tout cela au mieux ? Cela reste un énorme défi, souligne Thomas Orban.

"On a encore trop tendance à oublier que la santé, ce n’est pas seulement la médecine. Quand vous allez bien, c’est parce que vous ne vivez pas seul, parce que vous ne souffrez pas de solitude, que vous avez des contacts sociaux, que votre vie a un sens, que vous avez de l’énergie physique et psychique, que vous n’êtes pas sans le sou. Et aujourd’hui, on a l’impression que quand on parle santé, on parle essentiellement sous et médecine".

C’est notamment pour cela que Thomas Orban encourage la multidisciplinarité. Il a notamment cofondé une asbl sur la collaboration scientifique. "Je voulais y voir non seulement des médecins, mais surtout plein d’autres soignants. Mon métier de médecin, je ne sais pas le faire tout seul. J’ai besoin du pharmacien, des infirmières, des psychologues, des kinés, des diététiciens…"

► Regardez la suite de cet entretien dans Ceci n’est pas un selfie ci-dessus.

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