Politique

Thomas Dermine : "Je n’arrive pas à accepter que certains secteurs fassent des surprofits liés à une situation qui impacte les plus défavorisés"

Par Sandro Faes Parisi sur base de l'invité de Thomas Gadisseux via

Avec les démissions en cascade au fédéral, il y a comme un parfum de campagne préélectorale dans l’air. Pour en parler au micro de Thomas Gadisseux, Thomas Dermine, secrétaire d’Etat à la Relance et à la Politique scientifique. L'occasion également d'évoquer la bataille pour le pouvoir d’achat dans laquelle s'est lancée le PS. Un Parti Socialiste présent dans différents gouvernements du pays et qui a proposé un paquet de mesures à distiller dans les diverses institutions politiques. 

Soutenir le pouvoir d'achat

Avec la conférence de presse du président du parti socialiste Paul Magnette, axée sur les mesures nécessaires à relancer le pouvoir d’achat, le PS a-t-il lancé la campagne électorale ? "Pas du tout" pour Thomas Dermine. Simplement le contexte socio-économique est tel que personne ne s’attendait à une guerre aux frontières de l’Europe avec les conséquences sur les coûts de l’énergie et donc du pouvoir d’achat. "Il faut pouvoir proposer des mesures nouvelles aux citoyens et c’est pour cela que le PS prend ses responsabilités et propose aux gouvernements des mesures qu’il va déposer pour soutenir le pouvoir d’achat".

Ce qui pose question c’est la raison pour laquelle, le PS, membre du gouvernement, a-t-il fait ces annonces seul. Pour le secrétaire d’Etat fédéral, le ministre de l’économie Pierre-Yves Dermagne l’a fait au fédéral, et cette conférence se voulait globale car elle visait à informer plusieurs gouvernements à la fois, pas à poser un quelconque ultimatum.

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Fiscalité plus juste, avec quel argent ?

Au centre une fiscalité plus juste. Mais où aller chercher l’argent et comment mettre d’accord les sept partenaires ? Pour Thomas Dermine, "à chaque crise, il y a une contribution des personnes qui ont les épaules les plus larges. Il faut rétablir un équilibre, c’est une question fondamentale de solidarité nationale. Personnellement, je n’arrive pas à accepter que certains secteurs fassent des surprofits, comme Engie, liés à une situation qui impacte les plus défavorises. En faisant contribuer marginalement les plus nantis de la société on ne peut pas avoir un impact sur les 50% des moins nantis."

Mais pour ce faire, il faut toucher à la loi de 1996 sur les salaires. De là à devoir récrire l’accord de gouvernement qui scelle l’accord entre les sept partis au gouvernement… 

"La situation aujourd’hui est radicalement différente de celle lors de la rédaction de l’accord du gouvernement. Du nucléaire à la guerre en Ukraine, on a une crise du pouvoir d’achat que l’on n’a plus connu depuis les années 70."

Vers une chute de la Vivaldi ? 

D’autant que selon les propositions, le PS n’est pas seul à porter le combat. Cinq des sept partis de la Vivaldi sont favorables à la contribution des plus riches, souligne Thomas Dermine. Les lignes bougent face à ce contexte économique inédit.

Le gouvernement fédéral actuel risque-t-il de tomber ? " Ce serait incompréhensible. Ces questions-là me passent au-dessus de la tête. Il y a une situation qui est extrêmement compliquée et parler, faire de grands scénarios politiques ou même donner l’impression que les politiques réfléchiraient à cela plutôt qu’à autre chose ou plutôt que prendre des mesures urgentes, et bien quelque part ce serait indécent."

La Wallonie aussi

En Wallonie aussi la situation est compliquée. C’est d’ailleurs ce mercredi que le ministre-président Elio Di Rupo fera son discours sur l’Etat de la région. Une région, qui doit et qui est en train de se redresser selon certains mais dont les difficultés font toujours peur en Flandre.

Sans vouloir anticiper le discours de Di Rupo, Thomas Dermine observe que rien n’a été épargné à la Wallonie. Coronavirus, inondations… Une série de crises sont venues s’additionner à une situation qui n’était déjà pas simple. "Collectivement, on est au pied du mur. Il y a des choses exceptionnelles qui se passent en Wallonie. Il faut être radical sur les constats mais aussi sur les potentialités. Il faut travailler ensemble et dans le cadre d’une Belgique fédérale post 2024, il y a un effort ambitieux qui doit être fait."

Une réflexion qui fait écho aux discussions autour du plan de relance européen pour lequel la Wallonie recevra moins d’argent que prévu, avec un sentiment d’avoir été punie deux fois.

Restitution des œuvres spoliées au Congo

Enfin, il y a aussi l'épineux dossier des œuvres volées au Congo par l’Etat belge durant la période coloniale. Une question tranchée par l’Etat et pour laquelle un texte devrait être voté en commission ce mercredi. "Un des textes les plus progressistes en Europe. QUi reconnaît que toutes les œuvres d’art ont une origine, que certaines œuvres ont été spoliées. Et donc qu’il faut créer un cadre juridique afin d’analyser de manière scientifique et rationnelle les demandes de restitution qui pourraient émerger."
Un dossier symbolique qui traînait dans les cartons depuis longtemps et que le politique a décidé de trancher "Parce qu’il reconnaît quelque part que pendant la période coloniale des oeuvres ont été spoliées et parfois dans des conditions atroces. C’est fondamentalement injuste que des biens tachés de sang soient la propriété de l’Etat belge."

Réconciliation entre les peuples

L’idée est de rendre 100% de ces œuvres potentiellement aliénables puisque c’était l’inaliénabilité qui empêchait de reconsidérer l’appartenance de ces oeuvres. Concrètement la RDC devra effectuer une demande officielle, suite à laquelle une enquête scientifique et historique sera réalisée afin de déterminer si ces biens avaient été acquis de manière illégitime.

Mais ce n’est pas pour autant que les musées comme celui de Tervuren seront dépouillés des œuvres étudiées et sauvegardées car de l’avis même de Thomas Dermine, seulement 1à 2% des œuvres sont potentiellement impactées par cette mesure. Un travail historique sur les œuvres, important pour la réconciliation entre nos deux peuples souligne le secrétaire d’Etat. Et à quelques semaines de la visite du roi Philippe en RDC, le message est aussi symbolique qu’important.

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