Autrefois tas stériles, "mini-montagnes" nées de la main de l'homme lors des activités minières et métallurgiques, les terrils présentent aujourd'hui une richesse insoupçonnée. Des trésors naturels, une biodiversité très riche et très particulière, une faune et une flore implantées de façon surprenante sur ces terres de schiste, de charbon ou encore de métaux lourds. Ils sont devenus un petit paradis pour certaines espèces de plantes, fleurs et insectes.
Nous nous sommes rendus sur deux terrils très différents, le Gosson à Saint-Nicolas et l'Île aux Corsaires à Chênée, deux véritables îlots de nature en pleine agglomération urbaine.
Le terril du Gosson
Comme une anomalie naturelle de près de 40 hectares, au coeur d'un milieu urbain. A cheval sur les communes de Seraing et Saint-Nicolas, le terril du Gosson, autrefois site minier et terre stérile, abrite aujourd'hui une végétation dense. Fin des années 60, avec le déclin des charbonnages, les activités cessent. Les exploitants réensemencent alors le terril. Depuis, la nature a repris tous ses droits, comme l'explique Dominique Bangels, conservateur de la réserve naturelle Terril du Gosson "Elle a tellement bien repris ses droits que c'est devenu une réserve naturelle. On peut observer plus de 200 espèces différentes de végétaux et presque tout autant d'insectes tellement l'endroit est riche en biodiversité".
Un sol noir, fait de charbon et de schiste, d'où est très vite sortie l'oseille à écusson, l'une des premières plantes à s'être accommodée de cette terre acide. La vulnéraire, avec ses fleurs jaunes, est une plante introduite par l'homme et qui porte ici à merveille, pour le plus grand plaisir de l'azuré frêle, ce petit papillon bleu et orange menacé en Wallonie.
Au sommet du terril, une prairie laissée en friche pour y garder une grande biodiversité. Mais une friche maîtrisée. D'où ce troupeau de moutons qui pâture sur une partie de la prairie. Une véritable colonisation végétale qui prendra fin dans plus d'un siècle avec l'apparition des hêtres, l'étape ultime pour atteindre l'équilibre naturel. Dominique Bangels nous explique que "le bouleau a fait son travail, c-à-d qu'il a créé une atmosphère forestière et maintenant, c'est le chêne qui va prendre le pas. D'ici une cinquantaine d'années, on aura une forêt recouverte entièrement de chênes. Et puis d'ici 100 ou 200 ans, si tout va bien, on devrait avoir des hêtres".
L'Île aux Corsaires
Une nature volontaire, contre toute attente, l'Île aux Corsaires en est l'illustration parfaite. Deux hectares de presqu'île, situés à Angleur, entre l'Ourthe et son canal, d'apparence plutôt inoffensifs et pourtant toxiques pour l'homme. Le sol est rempli de métaux lourds. Pascal Hauteclair, conservateur de la réserve naturelle "L'île aux Corsaires" Natagora nous précise "Ici, ce sont des scories, ce sont des déchets issus de l'industrie métallurgique de zinc, qui ont été entreposés sur le site, sous forme de crassier. C'est ce qui explique que le sol est particulièrement contaminé et pollué en métaux lourds".
Contaminé mais pas condamné. Depuis 1966 et l'arrêt de production de zinc par l'exploitant, le site renaît de ses cendres et est aujourd'hui recouvert d'une pelouse exceptionnelle: la pelouse calaminaire. S'y développent la pensée calaminaire, le gazon de l'olympe ou encore la silène, qui nourrit la coccinelle aux 24 points. Pour les préserver, les plantes invasives sont aussi supprimées.
Mais que son nom ne donne pas des idées de conquête. L'Île aux Corsaires est un site clôturé et ainsi protégé des nuisances humaines. "C'est un site qui est protégé à l'échelle européenne, c'est un site Natura 2000. Il est également en réserve naturelle géré par l'asbl Natagora, mais le propriétaire reste Umicore, anciennement l'entreprise La vieille montagne".
Grâce à cet accord avec l'entreprise propriétaire, Natagora peut donc veiller au redéploiement naturel du site et y guider un public averti à la découverte de ce véritable trésor biologique insoupçonné.