Dès le 9 juin prochain, celles et ceux qui étaient en télétravail obligatoire pourront progressivement reprendre le chemin du bureau un jour par semaine, avec un maximum de 20% de présence simultanée.
Le télétravail pourrait-il se systématiser même après la pandémie ? En tout cas, 8 travailleurs Belges sur 10 souhaiteraient continuer à travailler de chez eux deux jours par semaine ou plus après la crise actuelle. Le sujet était au cœur du "Marché matinal" ce jeudi sur La Première.
En 2018, 17% des travailleurs faisaient du télétravail, une estimation basée sur des enquêtes faute de données officielles. Digitalisation oblige, le développement du télétravail avait déjà commencé avant la pandémie. Les entreprises n’ont finalement pas attendu le Covid pour anticiper ce phénomène.
La Commission européenne vient de confirmer qu’elle avait procédé à une réduction de 25% de ses surfaces de bureaux et transformé le reste. De son côté, Proximus a aussi prévu de se séparer de l’une de ses tours du quartier nord, soit 50.000 mètres carrés d’espace.
Transformation des bureaux
Chez Proximus, la crise du Covid aura bel et bien joué les accélérateurs. "Cette crise a incité à remettre fondamentalement en question nos habitudes, et donc le rôle de notre siège social et de nos bureaux physiques, confirme Haroun Fenaux, le porte-parole de Proximus.. On privilégie donc un modèle de travail hybride, à la fois bureau et télétravail. Cette nouvelle façon de travailler implique inévitablement une réduction des besoins en termes de mètres carrés. En termes d’économie, ce n’est pas un secret que moins de mètres carrés signifient moins de coûts variables. Le but est de pouvoir créer à Bruxelles un campus Proximus qui sera plus petit, plus vert et mieux adapté à la collaboration et au contact."
L’immobilier du bureau doit-il donc se faire du souci ? On pourrait le penser à Bruxelles où on compte 13 millions de mètres carrés. Mais le secteur, lui, ne se fait pas trop de mauvais sang.
Rikkert Leeman, président de la Commission bureaux de l’UPSI, l’Union professionnelle du secteur immobilier, reste confiant : "Des bureaux où les gens se retrouvent empilés les uns au-dessus des autres, dans la période post-Covid, ça n’est plus possible. Les gens vont demander d’avoir de l’espace, du social distancing, ils vont demander d’avoir suffisamment de ventilation et d’espace privé."
Selon lui, "les lieux de rencontres, les lieux de brainstorming, d’interactions" font défaut à l’heure actuelle. Rikkert Leeman estime que "beaucoup d’entreprises manquent de grandes salles de réunion, des grandes salles de training".
Conséquences pour les commerces
Il n’empêche, rationalisation, transformation et réduction ne vont pas faire les affaires des entreprises qui sont dépendantes de l’activité économique liée au bureau. L’annonce de la Commission européenne, par exemple, n’a pas ravi les commerçants du quartier Schuman, dont certains ont déjà beaucoup perdu lors du dernier confinement.
"Les gens qui vont revenir travailler ne passeront plus autant de temps. Donc, ça veut dire que quand ils viendront travailler deux jours par semaine, ils ne feront pas leur shopping dans le quartier, ils n’iront pas manger, ils viendront juste travailler, puis ils repartiront très vite, déplore Nicole Dujacquière, la présidente de l’Association du Carrefour Jean Monnet. Alors que maintenant, ils étaient contents de retrouver les collègues, de prendre un verre avec eux ou d’avoir tout un côté social qui était vraiment très intéressant pour les commerçants."
Du côté de la Chambre de commerce de Bruxelles, on partage évidemment ces craintes. Mais encore une fois, l’avenir n’est peut-être pas si sombre que ça. C’est l’avis d’Olivier Willocx, l’administrateur délégué de BECI.
"Pour ceux qui étaient dans des quartiers de bureaux, il y a un peu de souci à faire puisqu’il y aura forcément moins de densité et moins d’échanges. Je pense aux sandwicheries autour des administrations, etc., qui vont évidemment beaucoup souffrir de la réduction de l’intensité de l’usage des mètres carrés. Mais si on arrive à attirer les jeunes à Bruxelles demain, parce qu’ils trouvent que le cadre de vie est chouette, qu’il y a un bon niveau d’éducation, que c’est propre et que c’est agréable, la transformation se passera très bien. Si on n’arrive pas à attirer les jeunes, on va le payer très longtemps."
Le Covid a donc accéléré une transformation économique de notre univers de travail qui était déjà en cours. Mais c’est clair que cette accélération va aussi obliger tout le monde à s’adapter plus vite que prévu.