Si pour certains, le télétravail a été un enfer, pour d’autres ce fut une révélation. A tel point que certains font de la résistance à retourner au travail ou aimeraient aménager leurs horaires plus librement. Entre présentiel et télétravail, les entreprises doivent d’ailleurs s’adapter et ce n’est pas toujours évident.
Analyse avec Arnaud Le Grelle, directeur général de Federgon (Fédération des prestataires de services RH) pour la Wallonie et Bruxelles, et Delphine Pennewaert, psychologue du travail et des organisations (Ressources au travail.be).
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Un changement brutal
Peu d’entreprises étaient préparées au télétravail, observe Arnaud Le Grelle. La Belgique est un pays de PME, de petites structures qui remettaient ces questions à demain. Le cadre juridique existait mais on hésitait à le proposer aux travailleurs, on hésitait à aller vers la digitalisation complète des télétravailleurs.
Entretemps il a bien fallu s’adapter de façon brutale et les entreprises ont dû évoluer.
Quelques mois plus tard, les entreprises ont envie de revoir leurs collaborateurs regagner leur lieu de travail, mais près de 9 employeurs sur 10 prévoiraient de continuer à proposer le télétravail à l’avenir. On s’achemine ainsi vers des mix variables entre le présentiel et le travail à distance. Cette avancée est très générale et concerne tous les types d’entreprises. On va vers plus de flexibilité de façon plus durable.
Il y a toutefois beaucoup de différences individuelles et organisationnelles, entre PME, petites associations… Beaucoup de métiers n’offrent pas la possibilité de faire du télétravail, à commencer par le secteur soignant ou psychosocial.
Une bonne capacité de résilience
La crise a cela de salutaire qu’elle a révélé les failles, c’est-à-dire les endroits où il y a à apporter du changement. Mais ces changements en principe sont lents et se comptent en années. Nous y avons été plongés de façon brutale et confrontés à des composantes, non seulement professionnelles, mais aussi familiales, personnelles.
"Les gens ont géré tout cela assez bien. Je suis souvent étonnée de la résilience et de la capacité d’adaptation des gens en général et au travail en particulier", souligne Delphine Pennewaert.
L’enjeu est maintenant d’avoir une bonne écoute de ce qui se passe sur le terrain. Une enquête a démontré que les entreprises de moins de 49 personnes ne souhaitaient pas prolonger l’expérience du télétravail, parce qu’elles ont besoin d’implication, de collaboration, d’esprit d’équipe. Il s’agit souvent de petites PME ou d’associations orientées vers le social ou le culturel, où le lien est important.
Le phénomène d’usure a été également mis en avant dans cette enquête : les employeurs doivent réfléchir à mettre en place des outils pour permettre aux travailleurs de continuer le télétravail dans de meilleures conditions ou de revenir en présentiel dans de bonnes conditions.
La question du sens
Il y a quelques mois, la question était : qu’est-ce qui fait que les personnes vont pouvoir télétravailler ?
Aujourd’hui la question est : qu’est-ce qui fait qu’on a envie de revenir au bureau ? Et les arguments sont :
- le lien social, la socialisation.
- le fait de collaborer à des projets, qui se trouvent facilités et accélérés par la proximité.
- le fait de pouvoir mieux séparer vie professionnelle et vie privée, en venant au bureau quelques jours par semaine au moins.