Les pensions des députés continuent de susciter la controverse. Le Parlement flamand et le Parlement fédéral ont décidé dans la précipitation de ne plus autoriser de dépassement du plafond prévu par la loi. Un tapis rouge pour le PTB.
Deuxième épisode
De quoi parle-t-on, dans ce deuxième épisode des pensions de la Chambre ? D’abord, pour comprendre il faut revenir au premier épisode. Il y a quelques semaines, les services de la Chambre, à la demande de la présidente Eliane Tillieux (PS), avaient découvert des illégalités : des indemnités spécifiquement versées aux parlementaires pour éviter le fameux plafond des pensions du secteur public (dit plafond Wijninckx). Un régime d’exception donc. Illégal. Cela concernait de hauts fonctionnaires et d’anciens présidents.
Le second épisode est différent. Il concerne cette fois des députés. Une disposition permet à certains d’entre eux de dépasser le plafond de 20%. Attention, ce dépassement est a priori légal. Ce dépassement est prévu dans la loi pour tout le secteur public pour ceux qui ont une carrière mixte ; ceux qui ont déjà cotisé comme salariés avant d’arriver dans le secteur public par exemple. On ne parle donc pas ici de régime d’exception. La Chambre ici, a appliqué cette règle. Sauf nouvelle révélation, il n’y a pas d’irrégularités. Cela n’empêche, les députés ont fait marche arrière très vite, comme s’ils n’assumaient plus du tout des pensions pouvant s’élever jusqu’à 9300 euros par mois.
Privilèges
Les deux situations sont différentes, mais elles renvoient la même image : celle de parlementaires privilégiés. Dépasser, illégalement ou non, les plafonds de pension prévus dans la fonction publique apparaît injustifiable. Le Parlement flamand et le Parlement fédéral ont donc très rapidement pris des dispositions. Il reste encore à voir ce qui va se passer dans les autres assemblées parlementaires, en Wallonie, à Bruxelles, à la fédération. Le PTB avance déjà que ces dépassements existent aussi dans le sud du pays. Ce n’est donc pas terminé.
Velours
Le PTB est omniprésent dans cette affaire. C’est lui qui est à la base de la révélation de ce deuxième épisode. C’est lui qui en tire les bénéfices. Cela nourrit leur récit maoïste du peuple spolié par l’élite. Ensuite, les députés PTB sont encore jeunes. Ils ne comptent pas encore de pensionnés dans leurs rangs. Cette pureté revendiquée peut en outre s’appliquer à l’encontre du grand concurrent anti-élite du PTB : le Vlaams Belang en Flandre. Il est lui présent depuis longtemps, et a participé au système. Pouvoir enfermer le Vlaams Belang dans la "Graaipolitiek," la politique de profit que le PTB dénonce est un vrai strike.
Cette séquence est à l’initiative du PTB qui a révélé le pot aux roses. Il le réclame d’ailleurs à grand renfort de publication sur les réseaux sociaux. Elle suit la séquence de corruption au Parlement européen et celle du greffier du Parlement wallon (dans laquelle le PTB a aussi joué un rôle en faisant fuiter les infos vers les journalistes).
Le PTB est un parti qui historiquement a remis en cause le principe même de la démocratie parlementaire, considérée comme une illusion bourgeoise. Il y a quelques années cela aurait suffi à disqualifier largement ses révélations. Aujourd’hui son message est largement relayé dans les médias. Parce que le PTB a mis en sourdine son antiparlementarisme. Mais surtout parce que la crise de la représentation (le fait que de plus en plus de citoyens se sentent mal ou plus du tout représentés) s’approfondit. Le thème fétiche du PTB, la coupure entre les élites et les classes populaires, a désormais atteint le statut d’idée dominante.
Le PTB non seulement profite des affaires, mais parvient à les mettre à l’agenda. Ils pèsent de plus en plus lourd dans la sphère publique. Si cela continue, le PTB pourrait imposer son thème de prédilection dans la campagne. Et généralement, celui qui impose son thème gagne les élections.