Week-end Première

Spotify se moque-t-il des artistes ?

© Getty Images

Par Christian Rousseau via

Cette semaine nous avons assisté à un bras de fer entre Neil Young et quelques autres grandes stars américaines de la chanson et la première plateforme de streaming musical au monde, Spotify. Les artistes ont menacé de quitter le géant suédois s’il ne retirait pas de la plateforme le podcast le plus écouté outre-Atlantique, " The Joe Rogan Expérience ". Bras de fer perdu par Neil Young qui malgré ses 2,4 millions d’abonnés et ses 6 millions d’auditeurs par mois, n’a pas pu rivaliser avec Joe Rogan et ses 11 millions d’auditeurs par épisode. Et menace mise à exécution donc, puisque Neil Young n’est plus disponible sur Spotify.

L’analyse du journaliste Sophian Fanen, cofondateur du site Lesjours.fr et auteur du livre Boulevard du stream bonjour.

 

 

Spotify a préféré le podcast. Pourquoi ?

 

Sophian Fanen se veut très clair. Spotify s’est créé avec la musique parce qu’à sa création, la musique était le secteur qui avait poussé sa transition numérique le plus loin.

Spotify n’a pas de passion particulière pour la musique. C’est d’abord une entreprise de technologie.

Ils auraient fait du jeu vidéo ou du cinéma si ça avait été le meilleur business.

Les raisons de l’intérêt de la plateforme pour le podcast sont essentiellement économiques :

  • Le podcast a attiré de nouveaux auditeurs et de nouveaux abonnés.
  • Cela a ramené de nouveaux annonceurs publicitaires, moins ou pas intéressés par la musique.
  • Enfin, le podcast rend la plateforme moins dépendante des artistes et des maisons de disques. Un business compliqué et émotionnel.

 

Spotify a attiré beaucoup de nouveaux abonnés et a généré beaucoup d’argent avec le podcast. Il ne pouvait pas se permettre de le supprimer

 

Quid de la rémunération des artistes ?

Un autre aspect des plateformes qui pose problème aux artistes, c’est la rémunération.

Spotify a une position dominante sur le secteur et les artistes sont très dépendants des plateformes pour se faire connaître. C’est donc le géant suédois qui impose ses conditions.

Dans le même temps, les artistes ont plus de latitude aujourd’hui qu’ils n’en avalent quand lors de l’époque du CD. Avec le streaming, ils ont un accès direct à leurs fans. Auparavant, il fallait passer par l’industrie pour faire presser ces disques et les distribuer.

 

Sur Spotify, il faut qu’un titre soit écouté 254 fois pour que l’artiste touche 1 euro.

 

Et c’est bien là le problème. Selon Sophian Fanen, si on n’est pas un artiste qui génère énormément d’écoute, on ne s’en sort pas. Et clairement, c’est le cas de beaucoup d’artistes.

Pire encore, Spotify poussent les artistes à revoir leur manière de travailler. Une telle plateforme ne met pas en avant un artiste qui publie un album par an. Spotify demande que l’on publie des titres très régulièrement dans l’année.

L’artiste doit être présent en permanence. Il doit créer des remis, élaborer des playlists, être présent sur les réseaux sociaux. Sans quoi, on ne génère pas de revenus.

On a créé un monde qui ressemble à celui du hamster dans sa roue.

 

Un modèle à revoir ?

Pour notre expert, plusieurs questions se posent :

  • Les plateformes prennent 30% des revenus. N’est-ce pas excessif ?
  • Les maisons de disques doivent aussi se questionner. Ont-elles compris et adaptés les contrats des artistes ?

 

Pour notre expert, sans nul doute, c’est un système qui doit être assaini. Une directive européenne pourrait voir le jour sur la défense des intérêts des artistes. Sur la rémunération, on est encore très loin d’un accord.

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