Solitude, peur du coronavirus, déprime : le bonheur des Belges diminue selon une enquête de l'Université de Gand

Le constat est devenu plus préoccupant avec la deuxième vague.

© THIERRY ROGE - BELGA

Le ciel est gris, mais pas qu’au niveau météorologique. Le moral des Belges l’est également depuis la deuxième vague du coronavirus. Le niveau de bonheur de la population est en baisse. Il passe de 6,73 sur 10 avant la crise à 6,21 sur 10 aujourd’hui.

Le nombre de Belges qui se déclarent vraiment heureux diminue de 10% et 30% se disent malheureux contre 22% avant la crise sanitaire. Les résultats de la grande enquête nationale menée par l’Université de Gand (UGent) et la chaire NN (du nom de l’assureur) sont sans appel. La crise sanitaire a fortement impacté le bien-être des citoyens.

De moins en moins de personnes vraiment heureuses

La relation des Belges au bonheur est analysée par l’UGent depuis 2018. Au déclenchement de l’épidémie et lors du premier confinement, les résultats récoltés à l’époque avaient montré une baisse du bien-être. Celle-ci s’accentue si l’on en croit la dernière prise de température.

"Lors de la dernière enquête effectuée en décembre 2020, cette tendance à la baisse a évolué pour devenir une baisse significative", fait remarquer le titulaire de la chaire Lieven Annemans, professeur en économie de la santé à la Faculté de médecine de l’Université de Gand et à la VUB (Vrije Universiteit Brussel).

Avant la crise du coronavirus, on l’a dit, les Belges donnaient en moyenne un 6,73 sur 10 en matière de satisfaction de vie. "Ce chiffre a légèrement baissé pendant la première vague, pour arriver à 6,62, avant de connaître une baisse significative lors de la deuxième vague, jusqu’à 6,21."

Coronavirus : confinement et solitude

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Il y a de moins en moins d’adultes qui se sentent "vraiment heureux" (un score de 8 à 10 sur 10). Le score passe de 40% avant la crise à 30% au cours de la deuxième vague.

"Cela signifie que le nombre de Belges (de plus de 18 ans) heureux a diminué d’environ 900.000. Le nombre de personnes qui éprouvent une grande joie de vivre (soit un score entre 8 et 10 sur 10 sur l’échelle de la joie de vivre) a diminué pendant la deuxième vague pour se fixer à 17%, contre 23% avant la crise du coronavirus."

Moins tranquille d’esprit

Angoisse, anxiété, mal-être, déprime, dépression… Des maux qui frappent une partie de plus en plus grande de la population confrontée à une crise dont on ne voit pas le bout du tunnel, un an déjà après l’apparition du virus. "Une peur marquée du Covid-19 augmente la probabilité d’être malheureux de 46%. À peine 27% ont aujourd’hui une tranquillité d’esprit élevée, alors que ce chiffre était de 32% avant la crise. 59% des Belges indiquent qu’ils se sentent parfois à toujours déprimés, contre 50% avant la crise."

D’où provient ce mal-être ? La crise sanitaire oui, mais de manière plus précise ? "Un premier facteur important lié au fait d’être malheureux en temps de crise réside dans l’autonomie. Une autonomie insuffisante augmente la probabilité d’être malheureux de 56% ! Les facteurs qui peuvent malgré tout entretenir notre autonomie sont un sentiment de compétence (se sentir compétent dans ce que l’on fait au quotidien), trouver la tranquillité d’esprit, mener une vie qui a du sens, la satisfaction relative aux contacts sociaux et le sentiment d’appartenance."

La solitude des 18-34 ans

L’autonomie mais aussi la solitude. Les confinements successifs, la distance physique et sociale, le télétravail, les restrictions liées au nombre de personnes pouvant être reçues à son domicile… Autant de mesures, restrictives, qui ont des conséquentes sur notre état d’esprit.

Le constat est devenu plus préoccupant avec la deuxième vague. "73% des répondants se disent modérément à très seuls (contre 65% lors de la première vague). Dans la catégorie d’âge des 18-34 ans, ce pourcentage grimpe même jusqu’à 78%. Et une personne qui se sent seule a 48% de chances en plus d’être malheureuse en temps de crise."

Enfin, la crainte d’être infecté, d’être hospitalisé, de subir des complications. "43% ont peur du virus. Cette anxiété augmente la probabilité d’être malheureux de 36%. Mais nous nous préoccupons surtout de l’avenir de la société. 73% des Belges indiquent être inquiets pour notre avenir commun."

Sentiment d’appartenance

Finalement, le tableau est-il aussi noir ? N’y a-t-il aucune lueur d’espoir ? Qui sont ces Belges qui se déclarent encore heureux ? "On voit une série de facteurs importants susceptibles de nous protéger contre les conséquences négatives de la crise", développent les auteurs de l’étude.

"Les personnes qui contribuent au bonheur d’autrui et les personnes qui éprouvent davantage d’appartenance sont significativement plus heureuses. Le fait de ne pouvoir apporter qu’une faible contribution au bonheur d’autrui augmente en effet la probabilité d’être malheureux de 32%."

Nous devons prendre très au sérieux les conséquences de cette crise

La crise actuelle, qui s’est développée par paliers, a également eu des effets positifs en termes de sentiment d’appartenance à une communauté. "Avant la crise, le résultat moyen des Belges en termes d’appartenance était de 6,99 sur 10. Ce chiffre est passé à 7,12 pendant la première vague, et est de 7,32 (sur 10) aujourd’hui."

Confinement: lorsque guette l anxiété

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Solitude, peur du coronavirus, déprime : le bonheur des Belges diminue selon une enquête de l’Université de Gand

Ceci dit, "nous devons prendre très au sérieux les conséquences de cette crise sur la santé mentale et le bien-être général de la population", déclare le professeur Lieven Annemans qui s’adresse aux décideurs. Dans une série de recommandations, il leur demande de favoriser "une communication qui cultive la précaution mais pas l’anxiété", "des mesures compréhensibles et perçues comme utiles", "des initiatives pour encourager les citoyens à prendre soin les uns des autres"… 

Les auteurs de l’étude tiennent également à prodiguer des conseils cette fois à la population. Exemple en entretenant ses contacts sociaux avec de la distance, en appelant ou en écrivant à une personne seule, en effectuant les courses d’une personne qui ne peut pas le faire, en s’investissant "dans les choses qui donnent un sens à votre vie et contribuent au bonheur d’autrui".

Si les premiers signes de solitude apparaissent, il ne faut pas hésiter à en parler, dit l’UGent qui propose aussi de se consacrer à des activités qui amènent le calme (méditation, yoga, puzzles, dessin…) sans oublier la pratique sportive.

Rappelons que les premières enquêtes de la chaire NN de l’UGent ont été menées en mars 2018 et mars 2019. L’étude a été menée à nouveau lors du premier confinement auprès de 4112 personnes. Un échantillon représentatif divisé ensuite en deux groupes de 2921 Belges.

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