Services d'urgences engorgés: notre rapport à santé est devenu un rapport de consommation

Services d'urgences engorgés: notre rapport à santé est devenu un rapport de consommation

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Par Juliette Hariga

Dans nos hôpitaux, les services des urgences sont souvent engorgés par des petits bobos. Une étude des mutualités socialistes estime en effet que la moitié des visites aux urgences sont injustifiées. Quelles sont donc les bonnes raisons pour se rendre aux urgences ? Pour répondre à cette question, un retour vers les origines de ces services médicaux s'impose. Et ça date.

Des urgences principalement militaires

Les trépanations, les traitements des blessures de guerre, les réductions des fractures, sont autant de techniques connues des Égyptiens. Les Romains ont créé les Valetudinaria, des postes médicaux qui étaient installés au sens au sein des camps militaires. Au Moyen âge, il y avait des services de secours qui étaient mis en place sur les chantiers pharaoniques des cathédrales où les accidents étaient légion.

Les urgences ont d'abord été principalement militaires. Depuis toujours, c'est en effet la guerre qui a dicté d'urgence. Il fallait tout simplement remettre sur pied le plus rapidement possible le soldat blessé pour qu'il puisse repartir au combat. L'ambulance va d'ailleurs voir le jour sur les champs de bataille. À l'époque de Napoléon, des voitures à chevaux permettent de transporter des blessés, et de les évacuer vers l'arrière. Jusque là, les soldats blessés devaient attendre la fin des engagements pour recevoir les premiers soins, leurs chances de survie étaient assez minces, on s'en doute. Alors des ambulances médicalisées, qui, à la fin du dix-neuvième siècle commenceront à se répandre en ville à New York, puis à Paris.

La charité chrétienne présidente, pas la médecine

Autre étape importante: la création de la Croix rouge. A son origine, un banquier suisse -  Henri Dunant - qui assiste par hasard en 1859 à la bataille de Solférino. Il improvise des secours avec la participation des populations civiles locales et est choqué par les horreurs de la bataille.

Il lancera une campagne d'opinion qui aboutira à la signature de la première convention de Genève et à la création de la Croix Rouge. C'est alors qu'apparaît la notion d'intervention médicale de type civile, tant sur le terrain militaire qu'en période de paix.

Comment en est-on venu à avoir des services d'urgence au sein de nos hôpitaux ? C'est un long processus. Depuis le Moyen âge, et jusqu'au dix-huitième siècle, l'hôpital était plutôt lié à la notion d'accueil, d'asile, comme l'indique son étymologie: hospitalité. C'est la charité chrétienne qui préside, pas la médecine. L'hôpital reste très longtemps un refuge pour les pauvres, les gens plus aisés se sont soignés chez eux, mais le phénomène va s'inverser avec, évidemment, les progrès de la médecine en termes d'actes chirurgicaux, de techniques de réanimation, d'outils d'investigation, avec les techniques d'imagerie médicale aussi.

Des services engorgés de fausses urgences

Mais aujourd'hui les urgences sont victimes de leur succès. L'image qu'on a des urgences est une ambulance qui arrive sirènes hurlantes avec un accidenté de la route, ou une victime d'une crise cardiaque. Mais dans les faits, plus de la moitié des patients viennent d'eux-mêmes, sans avis médical préalable et les services d'urgence sont engorgés par de fausses urgences.

Comment expliquer ce phénomène? Dans notre société du tout, tout de suite, à la recherche du risque zéro, le recours aux urgences est très tentant. On est rassuré par la proximité d'un vaste plateau technique, on peut faire directement une prise de sang, une radio, on pense bénéficier en fait des services plus rapides, plus performants, sans paiement immédiat. L'évolution de la médecine générale peut aussi être une explication. Aujourd'hui, le médecin de famille est plus soucieux de la qualité de sa vie privée, il semble moins disponible qu'avant et notre rapport à la santé est devenu un rapport de consommation.

Pourtant, la relation médecin-malade sur le long terme est capitale. Rien ne remplace l'écoute de son médecin de famille et les conditions de travail dans un service d'urgence qui est souvent surpeuplé n'offrent que rarement, un contexte favorable pour une telle écoute. Chaque fois que c'est possible, il vaut mieux chercher à joindre son médecin traitant, ou son remplaçant.

Quand faut-il se rendre aux urgences?

Finalement, quand faut-il se rendre aux urgences ? De manière idéale, quand le médecin consulté l'estime nécessaire ou si l'on ne peut pas le joindre. Dans un délai raisonnable, on s'y rendra pour un problème aigu, et certainement pas pour des symptômes chroniques existe depuis longtemps. Pour les bébés de moins de 3 mois qui ont de la fièvre, le passage aux urgences pédiatriques se justifie aussi. Egalement en cas de dégradation brutale de l'état général, de douleurs thoraciques ou en cas de détresse respiratoire.

Et, c'est important de le dire, la perte de sensations dans une jambe ou dans un bras, des difficultés à parler peuvent être des signes d'accident vasculaire cérébral. 

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