Et si Serge Gainsbourg avait inventé le buzz avant l’arrivée d’Internet ? Ce 2 mars, cela fera 30 ans que Serge Gainsbourg a disparu. Lucien Ginsburg, de son vrai nom, laisse derrière lui une œuvre musicale conséquente, qui a marqué durablement la chanson française. Son propre répertoire, tout d’abord, de "La Javanaise" à "La Marseillaise" en version reggae, en passant par "Je suis venu te dire que je m’en vais", "Sea, sex and sun" et "You’re under arrest". Puis celui qu’il a composé et écrit pour d’autres artistes : "Poupée de cire" (France Gall), "Harley Davidson" (Brigitte Bardot), "Tandem" (Vanessa Paradis), "69 année érotique" (Jane Birkin), "White and Black blues" (Joëlle Ursull)…
Mais Gainsbourg le compositeur et parolier se muait aussi en Gainsbourg le provocateur. Cette image de trublion du PAF, apparaissant imbibé d’alcool, mal coiffé et mal rasé, il ne la façonne qu’à partir des années 80. Sa revisite de l’hymne national ne plaît pas à la critique, il en est affecté. Il n’est plus Gainsbourg. Il devient "Gainsbarre" qui multiplie les excès et les passages chocs à l’écran. Bien avant l’arrivée de Twitter et Facebook, l’artiste fait parler de lui dans les chaumières et dans la presse, non plus pour sa musique mais pour ses dérapages, certains devenus cultes.
- "I want to f… her" adressé à Whitney Houston
Nous sommes le samedi 5 avril 1986. Et comme chaque samedi soir, sur Antenne 2 (ex-France 2), c’est "Champs Elysées", l’émission numéro 1 de divertissement présentée par Michel Drucker. L’animateur reçoit chaque semaine du très beau monde. Cette fois, c’est Serge Gainsbourg et la jeune chanteuse américaine du moment, Whitney Houston. Les deux personnalités se croisent sur le fauteuil des invités. Michel Drucker prévient : "Je vais vous présenter Serge Gainsbourg qui, pour vous, s’est mis en smoking".
Gainsbourg se lève, lui fait le baise-main. Complètement éclaté, il dit : "You are superb", "she’s a genius". La diva en devenir est touchée mais surprise lorsque Gainsbarre pose sa main sur son cou. Drucker est mal à l’aise, retient son souffle et tente de traduire ce que tente d’expliquer son invité dépareillé.
"You are not Reagan and I am not Go… Gorbatchev. So don’t try", lâche un Gainsbourg qui délire. "I said : I want to f… her". Whitney Houston ouvre grand les yeux, la bouche, se décompose littéralement. L’animateur tente de rattraper le coup ("He said you’re great"). Gainsbourg rit, fier de son coup et en rajoute une couche : "J’ai dit je voudrais bien la b…" Un moment de gêne, de machisme décomplexé et d’anthologie.