Séisme en Turquie et en Syrie

Séisme en Turquie et en Syrie : les réfugiés syriens seront-ils les doubles victimes du tremblement de terre ?

Déclic et des claques

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Le terrible bilan des tremblements de terre qui ont touché le sud de la Turquie et le nord-ouest de Syrie continue à grimper, depuis ce lundi. Et tout indique que ce bilan n’est malheureusement pas définitif.

Ce tremblement de terre est une catastrophe naturelle qui vient se greffer à une situation humanitaire, militaire, politique, et économique qui est déjà explosive dans la région.

Le séisme s’est produit à un endroit très particulier, à cheval sur la Syrie et la Turquie. La zone de propagation des ondes du tremblement de terre suit une partie de la frontière entre la Syrie et la Turquie. Les villes touchées côté Turquie sont Gaziantep, Diarbakir, Hatay et côté syrien, ce sont des villes comme Alep, Idlib… qui sont des villes en guerre. Dans toute cette zone, de nombreux réfugiés se sont installés, dans les villes comme dans des camps de réfugiés, comme celui Kilis, côté turc.

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Zone de guerre et d’accueil des réfugiés

La Syrie reste une zone de guerre. Or, les dégâts ont lieu dans des zones contrôlées par différentes forces politiques : par le gouvernement syrien, par les groupes opposés au gouvernement (comme la zone d’Idlib), par des groupes armés turcs soutenus par la Turquie, par les forces démocratiques syriennes sous direction kurde.

On peut déjà s’inquiéter de la coordination de l’aide aux victimes, d’autant que ce sont aussi des zones très densément peuplées, à l’image de la ville de Sarmada, où les Casques Blancs syriens (organisation humanitaire de protection civile financée par des pays occidentaux) s’activent dans les décombres.

En 10 ans, la densité d’une ville comme Sarmada, en zone tenue par l’opposition syrienne, a explosé, avec beaucoup de déplacés internes qui se sont installés dans des camps informels, des habitations de fortune.

Dans la région, il y a aussi les réfugiés qui rentrent de Turquie : à Sarmada, certains camps sont organisés ou soutenus par le Croissant Rouge turc. Au camp de Kammouneh, tout proche, la Turquie a fait construire des préfabriqués, des maisons pour les réfugiés, dont ils ont reçu les clés au mois de mai dernier.

Le président turc Erdogan a annoncé qu’il comptait construire 100.000 de ces logements sur le territoire syrien, avec une idée en tête : celle de renvoyer un million de réfugiés syriens installés en Turquie, vers leur pays.

Au début de la guerre, la Turquie a d’abord accueilli de nombreux Syriens. Ils sont aujourd’hui 3,6 millions sur le sol turc, dont une majorité avec un statut de protection temporaire. Mais la situation est de plus en plus complexe.
Le président turc a donc décidé de renvoyer chez eux ces milliers de réfugiés syriens, lui qui avait longtemps été le soutien aux rebelles qui voulaient renverser le président, Bachar-El-Assad.

Il y a quelques mois, il a donc fait un virage à 180 degrés. Il a annoncé vouloir reprendre le dialogue avec le régime de Damas et Bachar-El-Assad.

Pourquoi ce changement d’attitude de la part du président turc ?

Lors des dernières élections locales, la coalition en place au gouvernement national a perdu beaucoup de grandes villes.
Et rapidement, certains ont, au sein de cette coalition, mis en cause la politique "trop ouverte" d’Erdogan à l’égard des réfugiés syriens. Or, les prochaines élections présidentielles auront lieu en mai 2023, dans un contexte d’inflation, de crise économique et monétaire en Turquie.

Une des grandes lectures de l’annonce du million de retours de Syriens vers leur pays, se fait dans ce contexte-là.
Recep Erdogan cite le chiffre de 500.000 personnes qui seraient déjà reparties sur base volontaire. Certaines ONG, comme Human Rights Watch, parlent de "retours forcés".

De nombreux reportages dans la presse internationale font état d’un contexte de forte montée de la xénophobie, d’expéditions punitives envers les Syriens, notamment à Gaziantep où vivent entre 450.000 et 600.000 réfugiés syriens.

Voilà autant d’éléments géopolitiques qui montrent à quel point ce tremblement de terre est une catastrophe encore plus forte dans cette région-là.

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