Moteurs

Sébastien Ogier, un homme heureux !

Par Olivier Gaspard

Présent ce week-end en Belgique pour les 6 Heures de Spa, Sébastien Ogier est revenu avec nous sur son adaptation au monde de l’endurance, on parle WRC bien sûr, on évoque aussi la suite de sa carrière. Rencontre avec un pilote comblé.

Sébastien, rouler à Spa, sur un des plus beaux circuits du monde, c’est comment ?

Spa, c’est quelque chose… C’est top d’être là, j’ai pris pas mal de plaisir même si j’aimerais faire plus de tours, c’est évident. C’est un circuit mythique, l’Eau Rouge ça reste un endroit cool dans la voiture, ça passe à fond avec une LMP2 la plupart du temps, le Double Gauche aussi est pas mal.  Chaque fois qu’il y a de la vitesse avec ces voitures avec de l'aéro, c’est là que tu prends le plus de plaisir. Commencer mon expérience en WEC avec Seebring, Spa et Le Mans dans quelques semaines, c’est plutôt un bon début.

Votre vie de pilote en endurance, c’est comment ?

Jusqu’ici, c’est relax. J’ai pris pas mal de temps pour moi et pour les vacances en ce début d’année. Les mois de mai et juin vont être assez chargés avec Spa, le Rallye du Portugal dans 2 semaines puis les 24 Heures du Mans derrière. Après cette période plus calme, ça fait du bien de revenir avec un peu d’adrénaline et un peu de compétition.

Qu’est-ce que vous aimez au volant de ces voitures-là ?

C’est simplement quelque chose de différent, ça me change les idées. Je dois réapprendre beaucoup de choses. Il n’y a pas beaucoup de similitude entre le pilotage d’une LMP2 et d’une WRC. Je dois travailler sur moi-même, essayer de comprendre comment ces voitures fonctionnent, quelles sont les limites et m’en rapprocher autant que je peux.

C’est quoi le plus difficile ?

L’utilisation des pneus est quelque chose de très sensible, encore plus que chez nous en rallye. Je n’ai pas l’expérience, donc pas encore la compréhension. Je m’étais fait une visualisation de la voiture peut-être encore plus performante que ce qu’elle ne l’est, j’ai tendance à attendre un peu trop de la voiture et donc de la sur-conduire. Ca fait partie des choses dans lesquelles je progresse et où je dois encore progresser avec le peu de temps de roulage que j’ai. C’est clairement un paramètre que je n’avais pas anticipé. C’est bien de partager la voiture, de se comparer avec une référence dans l’équipe mais ça diminue beaucoup les temps de roulage. Pendant les essais, j’ai peut-être fait une vingtaine de tours, c’est en course qu’on roule et en test. Je n’ai fait qu’un test avec l’équipe, j’ai eu la chance d’en faire un avec Toyota aussi. Je prends tout ce que je peux prendre. J’essaye de faire un maximum sur mon week-end de course

Si vous comparez par rapport au rallye, au niveau du pilotage, le plaisir il est où ?

Pour être honnête, si je devais recommencer à zéro et choisir ma carrière, je ne changerais rien au monde, le rallye ça reste un truc extraordinaire. Je suis monté dans la voiture il y a quelques jours pour les tests au Portugal et ça m’a donné la banane. C’était sympa et ça reste quelque chose d’unique et grisant. 3 mois sans monter dans une WRC, ça ne m’était pas arrivé souvent.

Maintenant ce que j’aime, c’est cette différence, ce changement d’air, ce nouvel environnement, la chance de rouler sur des circuits mythiques comme Spa et découvrir ces fameux virages connus dans le monde entier. C’est ce que j’aime, c’est le changement d’air. Maintenant il est un peu tôt pour dire quel est mon envie de prolonger et pour quelle durée ? Pour l’instant, je suis très heureux des décisions que j’ai prises dans ma carrière et dans ma vie en général.

La volonté, c’est toujours de rouler en WEC pour Toyota l’année prochaine ? Ca fait toujours partie des plans ?

C’est l’idée. Avoir fait quelques tests, rouler en LMP2 pour prendre de l’expérience. Maintenant il n’y a rien d’écrit à ce niveau-là. C’est sûr qu’on a évoqué l’idée d’une 3ième voiture et ça pourrait avoir du sens pour Toyota aussi avec l’arrivée de pas mal de concurrence l’année prochaine. On a souvent vu de gros constructeurs mettre 3 voitures au Mans, pourquoi pas, mais pour l’instant il n’y a rien de décidé.

Vous étiez et vous êtes un pilote du top dans votre discipline, changer de catégorie, ça change quoi, quand on est un champion, est-ce que l’état d’esprit est différent ?

Je reprends au bas de l’échelle, je ne viens pas avec les mêmes ambitions, les mêmes objectifs. Je l’accepte parce que je le savais à l’avance, il ne faut pas se faire d’illusion, garder les pieds sur terre. J’arrive là, en plus le LMP2 est une catégorie très relevée cette année avec des usines qui se préparent avec l’arrivée du LMDH. La concurrence est là mais honnêtement je préfère ça que d’avoir 3 ou 4 voitures au départ et faire un podium tous les week-ends qui ne veut pas dire grand-chose. Là, il y a de vraies bonnes références en face et ça permet tout de suite de voir où on en est. Pour moi ce qui est important c’est de voir une courbe de progression.

" Rovanpera va être dur à aller chercher "

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Votre dernier rallye en championnat du monde, c’était le Monte Carle au mois de janvier, est-ce que vous avez suivi la Suède et la Croatie ? Est-ce que vous avez regardé vos camarades du WRC ?

La Suède d’assez loin, la Croatie j’avoue que j’ai regardé la power stage, j’étais en vacances aux Maldives mais j’ai quand même regardé une spéciale parce qu’il y avait une petite bataille jusqu’au bout. Pour l’instant, il y en a un qui fait clairement la différence, c’est Kalle Rovanpera. Il a fait 2 courses parfaites, s’il continue comme ça, il va être dur à aller chercher. Vous m’avez souvent entendu dire dans ma carrière que si tu fais une moyenne de 20 points par rallye, tu es champion du monde, c’est sûr. Pour l’instant il est au-dessus et s’il tient ce rythme-là, il sera intouchable. Maintenant, il ne va pas continuer à gagner tous les rallyes. Là il arrive dans la première phase compliquée avec 3 épreuves terre où il va devoir ouvrir, c’est une situation qui va être nouvelle pour lui. Maintenant Toyota a pris un meilleur départ avec les nouvelles voitures et a le dessus en terme de performance. Ca ne veut pas dire que ça va rester comme ça, on est dans la première phase de vie de ces voitures, elles vont évoluer dans tous les teams. Mais pour l’instant, s’il y en a un qui sort du lot, c’est clairement Rovanpera.

Et Neuville ? Toujours à l’attaque pour essayer de suivre le rythme ?

Oui, j’ai vu en Croatie que la Hyundai était solide, il a tapé fort mais c’est le jeu, c’est le rallye. Des risques, il faut en prendre, Kalle en a pris aussi dans la power, il s’est fait quelques chaleurs et puis c’est passé.

 

Pendant cette pause, le WRC vous a manqué ?

Mais non, ça ne m’a pas manqué, j’étais content d’être là où j’étais surtout quand j’ai vu les conditions en Croatie, je me suis dit ça va être un rallye compliqué. Et puis la Suède, je l’ai souvent fait premier sur la route ces dernières années et ce n’était pas fun du tout. Pas de regret, j’apprécie la direction que ma carrière ou que ma vie a prise avec ce temps libre en plus. J’ai profité de super moments avec mon fils, avec ma femme et la vie est belle. Ca fait du bien de faire un break. Je suis conscient que j’ai eu une super belle carrière, la chance d’être là pendant de nombreuses années à faire un métier qui m’a fait rêver depuis tout petit. Puis tu arrives à un moment où tu te dis que l’envie n’est plus aussi importante que ce qu’elle n’était, je pense que c’est dommage. Autant passer à autre chose, au moins faire un break et puis peut-être faire le point d’ici quelques mois, quelques années je n’en sais rien. L’avantage avec le sport auto c’est que l’âge n’est pas si bloquant que ça, on peut perdre dans certains domaines mais l’expérience compense un petit peu. Honnêtement, c’était clairement la bonne décision et je ne me ferme aucune porte pour l’avenir, on verra bien comment les choses évoluent pour moi mais aujourd’hui je suis un homme heureux et c’est le plus important.

Vous serez de retour en WRC au Portugal dans quelques jours, avec une position de route favorable, Sébastien Ogier, favori pour la victoire ?

S’il fait beau… Maintenant le Portugal reste un des endroits où la pluie peut-être présente mais effectivement après avoir balayé pendant des années, si jamais je me retrouve dans cette position-là, je ne vais pas me plaindre, ça fait un petit temps que ça ne m’est pas arrivé mais bon l’important ce sera de retrouver un bon feeling rapidement. En test, ça s’est bien passé même si c’est difficile de savoir si la vitesse est suffisante ou pas. Je vais aller au Portugal pour essayer de me faire plaisir mais il faut pas se cacher que l’objectif, c’est de jouer aux avant-postes.

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