Belgique

Conseil d’entreprise chez Delhaize : "un round de foutage de gueule", estiment les syndicats

Delhaize : conseil d entreprise sur fond de grogne

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Par PY Millet, avec A.P., M.A. et agences

Un nouveau conseil d’entreprise s’est tenu ce matin chez Delhaize, mais il a rapidement tourné court. Après un quart d’heure, les deux parties se sont quittées.

Au menu de la réunion qui a démarré à 9h30 : une séance de questions/réponses entre syndicats et direction. Mais aussi un comité d’accueil qui s’annonçait très chaud. Preuve que les discussions sont compliquées, les syndicats ont lu une déclaration pour s’opposer au plan. La direction voulait entamer les discussions en répondant aux questions, mais les syndicats sont sortis après une quinzaine de minutes. Le désaccord est total et la mobilisation continue, ont fait savoir les syndicats à leur sortie. Les travailleuses et travailleurs s’en vont et retournent fermer leurs magasins, nous dit-on.

"Il n’est pas question pour nous de franchiser les magasins et la lutte sera longue", a commenté Myriam Djegham, déléguée permanente à la CNE Commerce. "Nous continuerons à nous battre. La mobilisation se poursuit. La direction a imposé son plan. Elle n’est pas ouverte à la négociation. Il n’est pas question de discuter de modalités alors qu’on refuse en front commun le plan. Les travailleurs sont déterminés", a-t-elle ajouté. Du côté du syndicat socialiste, on ne s’était pas fait beaucoup d’illusions à l’approche de cette réunion. "Même le CEO n’était pas là, c’est la preuve qu’il n’y a aucune volonté de la direction de discuter avec nous", a expliqué Myriam Delmée, présidente du Setca. "La direction propose de discuter lignes et virgules et ce n’est pas ce que nous voulons."

Ci-dessous, la réaction de Myriam Delmée à la sortie du conseil d’entreprise de ce mardi matin.

Réaction du SETCa à la sortie du conseil d'entreprise

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A la sortie des délégués syndicaux, une petite échauffourée a éclaté entre manifestants et force de l’ordre avant que très vite le calme ne revienne. Les syndicats vont désormais discuter ensemble pour établir un plan d’action. "Il y aura des assemblées dans les magasins pour signaler qu’aujourd’hui c’était un round de foutage de gueule si vous me permettez l’expression et donc on verra bien ce que les travailleurs vont décider. Le front commun syndical se réunit ce soir pour décider des actions futures mais c’est clair qu’on ne va pas en rester là", a encore précisé Myriam Delmée.

A 9h00 il y avait plus de 300 membres du personnel devant le siège de Delhaize à Zellik, à l’appel des syndicats. Des vestes rouges, des casquettes vertes, des écharpes bleues, le personnel est toujours remonté à bloc. Des cars arrivent encore. La direction est, elle, arrivée tôt ce matin.

Outre les pétards, klaxons et sifflets, les syndicats ont aussi chanté à plusieurs reprises "Le Lion est mort ce soir", faisant référence au logo de l’enseigne du groupe. "Le retrait du plan est notre objectif", a déclaré Wilson Wellens, du syndicat libéral. Les autres syndicats s’associent également à cette demande.

Cette assemblée intervient une semaine après l’annonce par la direction de franchiser les 128 supermarchés du groupe. La colère n’est pas retombée en une semaine. C’est même tout le contraire. En témoignent les nombreuses fermetures de supermarchés qui se sont multipliées ces derniers jours. Et ce mardi matin encore, la mobilisation sera forte, le personnel a prévu de former une haie de "déshonneur", afin d’accueillir chaudement les membres de la direction qui participeront au conseil d’entreprise.

Le message est clair : les travailleurs ne veulent pas d’une gestion indépendante des supermarchés, synonyme de dégradation de leurs conditions de travail et de perte d’emplois à long terme. "Dans les faits, petit à petit, les travailleurs qui ont certains droits aujourd’hui dans les magasins intégrés, risquent plus que probablement, et dès le lendemain de la franchise, d’en perdre un certain nombre, argumente Myriam Djegham, permanente CNE. Non seulement, il y aura dégradation des conditions de rémunération et de travail pour ceux qui resteraient mais il y a également un risque en termes d’emploi."

Alors, en fin de compte, à quoi servira ce conseil d’entreprise ? Pour la direction, c’est une séance d’information, la première d’une série de trois, destinées à répondre aux questions des syndicats.

Les questions ont dû être envoyées jeudi dernier et elles sont nombreuses. Elles tournent autour des résultats financiers du groupe Delhaize, en Belgique et à l’étranger. Les syndicats veulent en fait que la direction justifie économiquement son choix. "On n’adresse pas vraiment de questions, nuance Myriam Delmée, présidente du Setca. On pose des constats. Et sur base de ces constats, il est hors de question que nous négocions des lignes, des virgules, des points d’un plan déjà écrit."

Si les supermarchés en gestion propre sont moins rentables que les magasins franchisés, il existe selon eux d’autres solutions pour assurer la croissance, plutôt que de passer par la gestion indépendante. C’est non au plan de "franchisation" tel qu’imaginé par la direction. La négociation n’est à ce stade pas envisageable.

"Nous faisons le constat que Delhaize est une entreprise bénéficiaire, on n’est pas en train de parler de magasins en perte mais d’un modèle en perte de croissance, ponctue Myriam Delmée, présidente du Setca ; ce qui est tout de même fondamentalement différent. C’est le seul message que nous délivrerons à la direction : le plan de franchise doit être retiré et il y a moyen de négocier autre chose qu’un plan de franchise et d’assurer un avenir pérenne à tous les travailleurs".

La direction s'adresse aux collaborateurs

Dans un courrier adressé aux membres du personnel ce mardi soir, la direction de Delhaize est revenue sur ce conseil d'entreprise avorté, déplorant le départ des syndicats "rendant impossible le fait de répondre aux questions". Par ailleurs, celle-ci garantit dans ce courrier que "tous les collaborateurs des supermarchés ayant un contrat avec Delhaize au moment du transfert gardent leur emploi et prennent part à cette transition. Ils conservent également l'ensemble de leurs conditions salariales et leurs conditions de travail actuelles lors de la transition."

"La CCT 32bis et les obligations légales qui y sont liées seront appliquées", conclut la direction.

Selon plusieurs syndicats contactés ce soir : "La direction veut faire croire aux employés que rien ne va changer et que la CCT 32 bis va continuer pour tout le monde, mais c’est faux. Le passage en franchise va entraîner le changement de commission paritaire et donc la perte des acquis pour les travailleurs".

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