Cinéma

Reservoir Dogs, 30 ans de culte !

Tous habillés en noir, pouvez-vous reconnaître les couleurs des personnages de "Reservoir Dogs" ?

© (Miramax)

Par Nicolas Buytaers

Proposé pour la première fois le 21 janvier 1992 aux spectateurs du Festival du film indépendant de Sundance, le premier long métrage de Quentin Tarantino a non seulement marqué les esprits mais aussi imposé le réalisateur parmi les plus grands.

Cette chanson, Like a Virgin, tu veux que je te dise de quoi ça parle ? Ça parle d’une fille qui est mordue pour un mec qui en a une super grosse. Cette chanson, c’est une métaphore sur les grosses qu…

L’analyse de M. Brown n’est pas des plus fines mais elle résume bien cette discussion qui s’éternise entre potes, là, assis autour de cette table dans ce dinner. Tous habillés pareil ou presque, ils parlent de tout et de rien… et de cette chanson de Madonna surtout. Qui sont-ils ? On connaît leurs noms, c’est déjà ça. Il y a Joe Cabot et son fils Eddie. Quant aux autres, ils n’ont que pseudos comme M. White, M. Blonde, M. Orange, M. Pink, M. Blue et, vous le savez déjà, M. Brown. Que font-ils ? Outre discuter de la pluie et du beau temps, on n’en sait rien. Enfin, du moins, pas encore. Ils ont préparé un casse, celui d’une bijouterie. Mais ce casse va mal tourner. Ils vont se retrouver dans un entrepôt abandonné et tenté de découvrir ce qui a foiré. Pire encore, qui est la balance du groupe…

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Si vous tapez sur ce gamin jusqu’à ce soir, il vous avouera que c’est lui qu’a bousillé le pont de la rivière Kwaï…

Proposé il y a tout juste 30 ans au Festival du Film indépendant de Sundance (imaginé par Robert Redford), "Reservoir Dogs" a directement placé son réalisateur Quentin Tarantino en orbite aux côtés d’autres grands noms comme Martin Scorsese ou Brian de Palma. Il faut bien avouer que pour un premier film (même s’il avait déjà écrit le scénario de "True romance" pour Tony Scott), il a fait fort. D’après la légende, l’histoire de "Reservoir Dogs" aurait été écrite en trois semaines seulement alors que le jeune Quentin travaillait chez Vidéo Archives, le vidéoclub de Manhattan Beach en Californie (définitivement fermé en 1994). Entouré de milliers de cassettes VHS, l’étudiant en cinéma va y puiser son inspiration… et plagier, appelons un chat un chat, pas mal de scènes qui feront de lui un réalisateur incontournable de la Pop Culture.

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Déjà les noms de ses personnages. Cette idée-là, on la trouve dans le film "Les Pirates du métro" de Joseph Sargent sorti en 1974 (qui a connu un remake en 2009 réalisé par Tony Scott, encore lui). Dans "Reservoir Dogs" toujours, nous avons encore cette scène où nos braqueurs se braquent les uns les autres, pistolet au poing et bras tendu, en tentant de deviner qui a trahi qui ? Les plus cinéphiles d’entre vous (comme Tarantino) auront certainement reconnu l’une des scènes du film hongkongais "City on fire" de Ringo Lam (à qui l’on doit aussi "Risque maximum" avec notre Jean-Claude Van Damme national). Autre idée empruntée ailleurs, la déconstruction narrative. Tarantino aime ce procédé de flash-back qu’on retrouvera encore dans "Pulp fiction", son deuxième film (celui de sa véritable consécration).

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"Reservoir Dogs" (en haut) versus "City on fire" (en bas)
"Reservoir Dogs" (en haut) versus "City on fire" (en bas) © (Droits réservés)

Parmi toutes les nombreuses touches tarantiniennes, il y a la musique. Grand fan de VHS, le cinéphile Tarantino est aussi mélomane. Il écrit ses histoires en écoutant pas mal de disques. Des chansons qu’il place çà et là dans ses films, des tubes d’une autre époque qui accentuent une ambiance et qui allègent une situation. Des titres qui retrouvent surtout une seconde jeunesse quand sortent les bandes originales de ses films. Ici, "Reservoir Dogs" est on ne peut plus lié à "Little green bag" de George Baker.

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Mais le véritable talent de Quentin Tarantino reste celui de s’entourer d’excellents acteurs. Le casting de "Reservoir Dogs" est juste monstrueux avec Tim Roth, Michael Madsen (qui joue Vic Vega soit le frère de Vincent Vega soit John Travolta dans "Pulp Fiction"), Steve Buscemi et… Harvey Keitel. D’ailleurs, ce film n’aurait pas vu le jour sans son intervention (il en est le coproducteur). Fan depuis toujours de Keitel, Tarantino avait écrit son scénario en pensant à lui. Un scénario qu’il lui a fait parvenir via l’un de ses professeurs de cinéma dont l’épouse connaissait la femme de Keitel (vous suivez) ! Harvey qu’on retrouvera encore dans "Pulp fiction".

Harvey Keitel, l’homme sans qui "Reservoir Dogs" n’aurait jamais vu le jour
Harvey Keitel, l’homme sans qui "Reservoir Dogs" n’aurait jamais vu le jour © (Miramax)

La suite, vous la connaissez. Fort de son succès avec "Reservoir Dogs", Quentin Tarantino enchaîne avec "Pulp fiction", palmérisé d’or à Cannes en 1994. Ensuite il y aura, dans l’ordre "Jackie Brown", "Kill Bill, volumes 1 et 2", "Boulevard de la mort", "Inglourious Basterds", "Django unchained", "Les Huit Salopards" et "Once upon a time… in Hollywood". Depuis 30 ans, il applique la même recette : un casting de stars, des scènes qui rendent hommage aux grands (sous-)genres du Cinéma, des dialogues (parfois, souvent, trop) longs, une narration non linéaire et une musique de tubes intemporels. Et la violence, on en parle ? Elle est résumée en une réplique de "Reservoir Dogs"…

Je vais jouer franco avec toi. Si tu veux la vérité, je m’en cogne de ce que tu sais. Mais je vais te torturer rien qu’un peu. Pour la rigolade…

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