Mais revenons à notre sujet tourné en caméra cachée avec le CST d’une autre personne. Parmi les remarques des internautes, un post a retenu notre attention. Une personne s’interroge sur la situation du journaliste qui se met ouvertement en infraction en se présentant dans un café avec le pass sanitaire de quelqu’un d’autre :

Cette remarque, nous l’avons soumise à Stéphane Hoebeke, juriste à la RTBF et spécialiste de la déontologie et du droit des médias. D’abord, il trouve la comparaison disproportionnée : "Ici, le journaliste n’a mis personne en danger en présentant le pass sanitaire d’un ami, on révèle une réalité". Notons au passage que le journaliste en question possède un pass sanitaire personnel en ordre.
Quant à la question plus générale de savoir si on peut faire des choses interdites dans le but d’obtenir une info, Stéphane Hoebeke répond : "Le fait que parfois, un journaliste dépasse les limites imposées par la loi pour démontrer une situation, parce que le but de l’information l’emporte et est justifiée, on doit pouvoir l’accepter. Dans ce cas-ci le sujet le justifie tout à fait, à la fois le recours à la caméra cachée et l’utilisation d’un covid safe ticket au nom d’une autre personne. D’autant qu’on a expliqué dans le sujet l’objet du reportage et les limites de l’exercice et on a flouté les établissements concernés".
Cela dit, il ne faut pas le faire trop souvent
Pour le juriste, tout est question de "balance des intérêts", c’est-à-dire qu’il faut mettre en balance d’une part la loi que l’on ne va pas respecter et l’intérêt du sujet. Pour nous faire comprendre cette notion de balance, Stéphane Hoebeke prend des exemples plus lourds, par exemple pour un sujet sur les sites montrant des violence sexuelles sur enfants ou sur la facilité à se procurer de la drogue, un journaliste pourrait se faire filmer en train de s’en procurer. "On sait qu’on commet une infraction mais elle est couverte par l’objet du reportage. Après, ça ne veut pas dire que l’on doit mettre nos journalistes dans des situations dangereuses ou illégitimes parce qu’en cas de problème, ce sont eux qui devront s’expliquer devant la justice".
Stéphane Hoebeke précise bien qu’il ne cautionnerait jamais une infraction qui mettrait en danger la sécurité de journalistes et/ou de tiers. Comme le fait de commettre un excès de vitesse pour prouver une absence de contrôles, si on veut reprendre l’exemple donné par l’internaute. "Dans ce cas, la balance des intérêts ne serait pas respectée".
Une question similaire avait été posée lors de la diffusion d’un reportage sur le déboulonnage de statues de Léopold II.
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