Qu’est-ce que la gouvernance collaborative exactement ? "La gouvernance collaborative permet aux équipes et aux organisations de s’appuyer sur 3 forces : le sens (permettre à tous les collaborateurs de trouver du sens dans ce qu’ils font), l’inclusion (partager l’intelligence collective le plus largement dans l’organisation), le développement personnel (le développement des compétences de tout le monde). Cela permet d’être plus argile en tant qu’organisation et de travailler au bonheur, au confort et à la qualité de l’environnement professionnel", explique Yannick Bollati, est cofondateur de Phusis, une coopérative de managers et d’experts de la transformation des grandes organisations.
Dans le chemin vers la gouvernance collaborative, le CEO et l’équipe de direction doivent être prêts à faire un travail personnel. Passer dans un mode de gouvernance collaborative, c’est surtout un changement de pratique personnelle, un changement dans la manière dont on a une relation au pouvoir et à la décision. "Ça ne veut pas dire qu’il n’y a pas de management, loin de là. Une organisation collaborative, c’est très structuré, et le fait qu’on parle de gouvernance prouve bien que ce n’est pas l’anarchie, au contraire", prévient Yannick Bollati.
La gouvernance collaborative n’est pas nouvelle, des tentatives ont lieu depuis des décennies, mais aujourd’hui, le monde change en dehors de l’entreprise. Les nouvelles générations veulent avoir un impact différent sur la société. Ce qui était il y a 20 ans une vision très avant-gardiste de la gouvernance est en train de devenir une envie globale. Mais ça reste encore minoritaire.
La gouvernance collaborative, pour toutes les entreprises ?
Toutes les entreprises, des plus petites aux plus grandes, peuvent s’y mettre, mais un certain nombre de critères doivent être réunis pour que la gouvernance soit réellement collaborative. L’authenticité de la démarche doit être avérée du côté du leadership car la gouvernance collaborative n’est pas une mode qu’on met en place après en avoir entendu parler à la radio ou dans un article. Toutes les entreprises ne sont pas prêtes à opérer cette transition.
"C’est une transformation profonde qu’il ne faut pas prendre à la légère : toutes les entreprises qui s’embarquent sur ce chemin doivent avoir une volonté réelle de le faire et d’y arriver en interne", explique Yannick Bollati. Quand l’organisation est d’une certaine taille, comme c’est le cas chez Partena Professionnal (voir plus bas), il faut qu’une équipe de transformation soit mise en place. Les consultants et experts dans le domaine peuvent accompagner mais certainement pas faire "à la place" des individus. En clair, cela doit émaner et être pris en charge par l’interne.
Un exemple de gouvernance collaborative avec le cabinet d’architectes Archipelago
Françoise Haumont est administratrice déléguée d’Archipelago, un cabinet d’architecte bruxellois qui s’est lui aussi engagé dans la voie de la gouvernance collaborative. Archipelago a été suivi par la coopérative Phusis. Elle nous raconte comment tout s’est mis en marche : "La particularité d’un bureau d’architecte, c’est que son cœur de métier est de rassembler les individus et de faire des projets. Nous étions tous des créateurs, des individualités, nous sommes tous persuadés depuis le début qu’on fait de la collaboration puisque nous travaillons avec des partenaires externes pour chaque projet. Certains très gros projets demandent de très grosses équipes. Mais à un moment, on a pris conscience que les décisions étaient toujours prises de façon "top-down". Notre organisation était très traditionnelle, hiérarchique, avec un CEO qui prenait toutes les décisions.
Par ailleurs, avant d’imaginer s’engager dans la voie de la gouvernance collaborative, le bureau d’architectes bruxellois Archipelago s’est rapproché d’un bureau d’architectes situé à Louvain, qui était lui aussi dans un mode de gouvernance traditionnelle. "Cela a été toute une recherche de se faire rencontrer les deux organisations. On a tenté de les superposer en créant une structure très rigide. Et puis, on s’est rendu compte que toute cette collaboration autour de nos projets devait nous pousser à repenser notre structure interne. Avec Phusis, on essaie de ramener cette structure collaborative – qui est indispensable dans notre métier – au cœur de l’entreprise. De son côté, Françoise Haumont considère que l’accompagnement est indispensable. "Pas forcément en termes de consultance, mais parce que pour ce type de projet, il faut un œil extérieur pour nous dire les endroits où ça coince et les endroits où ça fonctionne".
Partena Professional : la mise en place d’une équipe projet pour y arriver
En 2016, la direction générale de Partena Professional a proclamé son envie de changer de système et de renverser la pyramide hiérarchique. Jean-Pierre Christiaens est le coordinateur du projet de transformation au sein de l’entreprise. Selon lui, que la direction proclame son envie d’aller vers la gouvernance collaborative est indispensable pour marquer un cap, mais ce n’est pas suffisant. "L’autre partie du duo magique, c’est qu’une équipe en interne soit dédiée à la réflexion autour de ce changement, qu’elle identifie clairement la perception et les envies de l’entreprise. Chez Partena, au-delà de la proclamation de la direction de vouloir s’engager dans cette transformation, ce qui a été essentiel, c’est de laisser à une équipe projet de l’espace pour travailler sur leurs envies et les étapes pour y parvenir", explique-t-il.
Pour en savoir plus sur la gouvernance collaborative en entreprise et les initiatives qui voient progressivement le jour, réécoutez la séquence de Tendances Première consacrée au sujet.