Est-ce que ça veut dire qu’on va assister à ce à quoi on a droit de manière générale : chacun dans son coin qui essaye de trouver sa solution et de se transformer par rapport à un enjeu donné, dans ce cas-ci la transition énergétique ?
Cédric Brüll : "C’est presque impossible se transformer seul actuellement, si vous êtes un acteur industriel dans un domaine spécifique. En termes de technologie, mais aussi en termes de modèles économiques, il est question de choses compliquées — il y a toute une série de réglementations — que vous êtes obligés de travailler de manière synergique avec toute une série d’acteurs."
La nécessité de coopérer est déjà inscrite dans la réalité économique wallonne.
"Des acteurs sectoriels, du réglementaire, du législatif, ou des acteurs publics. Tout ça doit être amené dans une même vision et c’est le seul moyen, à mon avis, pour que ces acteurs historiques puissent continuer à produire, ou en tout cas à rester de manière économique sur leur marché. Ils vont donc devoir se réinventer et ce travail collectif est pertinent et nécessaire."
C’est parfois déjà le cas aujourd’hui sur des projets liés à l’hydrogène, à la capture et réutilisation du CO2 ou à la métallurgie circulaire. Cela va être possible de généraliser ça en Wallonie ?
Cédric Brüll : "Un des avantages dont la Wallonie dispose, c’est que la nécessité de coopérer est déjà inscrite dans la réalité économique. Parce qu’elle est essentiellement constituée de petites entreprises, ce qui est une force dans ce travail collectif. Parce que ça permet une flexibilité plus grande."
En Wallonie, on a vraiment besoin de ce travail collectif pour pouvoir y arriver.
"Quand vous êtes dans un pouvoir centralisé avec des plus grandes entreprises, le changement est compliqué. Par contre, l’effet est démultiplié. Mais quand vous travaillez avec des PME, vous êtes obligé de travailler de manière synergique, et c’est en fait le seul moyen de s’en sortir. Nous avons des champions dans de toutes petites niches, et sans l’aide collective, ils ont très peu de chances d’arriver sur un marché. Donc, en Wallonie, on a vraiment besoin de ce travail collectif pour pouvoir y arriver."
Ça veut dire que l’ambition est aussi de mailler ce tissu économique pour rendre les acteurs performants les uns grâce aux autres, mais aussi interdépendants pour consolider le tissu ?
Cédric Brüll : "Oui, et pour pouvoir offrir des solutions de manière conjointe. Imaginons une solution de production d’énergie renouvelable pour pouvoir électrifier un village en Afrique, on peut le faire seulement si vous réunissez sept ou huit PME ensemble sur une seule solution. Elles ne peuvent pas réaliser seules un objectif. Ce maillage permet donc d’offrir des solutions plus complètes, plus abouties et elles permettent aussi d’ouvrir de nouvelles opportunités pour ces entreprises-là.
"Et ce qu’on voit actuellement, c’est que le plan de relance est un peu une étincelle qui permet, pour certains secteurs, de se développer plus rapidement."
Mais cela reste un pari. Sauver, préserver l’industrie wallonne. Sur un territoire, certes bien situé, qui dispose d’une concentration d’acteurs : industriels, laboratoires universitaires, centres de recherche – et donc aussi de connaissances incontestables. Mais qui reste un petit territoire, sur lequel les moyens financiers sont et seront limités. Et dont le tissu économique n’est pas, soyons de bon compte, plus développé que celui de ses voisins directs.