Les éclaireurs

Reconstruire et se reconstruire : restauration d'œuvres musicales & processus de deuil

Par Fabienne Vande Meerssche et Sarah Poucet via

Fabienne Vande Meerssche reçoit dans LES ECLAIREURS Fabian Balthazart, docteur en Art et Sciences de l’Art, professeur à ARTS² et au Conservatoire royal de Liège, chargé de cour au LAM (ULB) et spécialiste de l’analyse musicale et du contrepoint du XVIIIe siècle & Emmanuelle Zech, docteure en psychologie, professeure ordinaire et doyenne de la Faculté de Psychologie et des Sciences de l’Education à l’UCLouvain où elle dirige son laboratoire de recherches (PCLab). (Première diffusion le 23 avril 2022)

Fabian Balthazart

Fabian Balthazart est docteur en Art et Sciences de l’Art, professeur d’histoire de la musique, d’analyse et écritures aux écoles supérieures des Arts, ARTS² (ancien Conservatoire Royal de Mons) et Conservatoire royal de Liège. Il est spécialiste de l’analyse musicale et du contrepoint du XVIIIe siècle.

Fabian est musicien ; il a débuté sa formation au Conservatoire de Bruxelles par des études de violoncelle. Il se tourne ensuite vers l’analyse et l’écriture musicale. Après une licence en écritures classiques à l’ARTS², il obtient un doctorat en Art et Sciences de l’Art, en cotutelle Arts² – ULB (en collaboration avec le Centre de musique baroque de Versailles).

Ce doctorat, créé en 2004 dans la foulée de Bologne, permet aux étudiants des Ecoles supérieures des arts d’avoir accès à la recherche. Fabian Balthazart fut le premier à intégrer cette école doctorale et le second à être reçu docteur grâce à sa thèse sur la complétion de parties d’orchestre perdues dans les motets à grand chœur de Henry Madin (1698-1748) composés pour la Chapelle royale de Versailles sous Louis XV.

Ce sujet très spécifique lui a permis de se spécialiser dans l’étude des formes et des langages musicaux pour tenter de mieux comprendre le cheminement créatif d’une œuvre et en quoi son auteur ou autrice peut se révéler " extraordinaire ". Ce cheminement méthodologique lui permet aujourd’hui d’aborder l’étude d’un répertoire des plus vaste allant de la Renaissance à nos jours.

De 2011 à 2015, Fabian Balthazart se consacre à la recherche au Laboratoire de Musicologie de l’ULB (LaM), où il est actuellement chargé de cours.

Fabian Balthazart travaille notamment à la reconstruction d’œuvres musicales. Tel un restaurateur d’art, il tente de combler des parties instrumentales incomplètes, ou disparues au fil du temps. Pour créer ce qui n’a pas été conservé, Fabian s’appuie sur ses connaissances esthétiques musicales de l’époque, et sur ses intuitions.

Ainsi, il a notamment complété les œuvres de Nicolas Bernier, Jean-Michel Cabau, Henry Madin, Pierre-Alexandre Monsigny ou encore Ignaz Vitzthumb. Sa restauration du Miserere mei Deus de Nicolas Bernier a été publiée par le Centre de Musique Baroque de Versailles et jouée en concert à Versailles et à Mons.

Passionné par la pédagogie et la transmission de la culture musicale, Fabian Balthazart est professeur d’analyse et écritures musicales à l’Académie de Musique et des Arts de la scène de Watermael-Boitsfort. Il a aussi été animateur dans diverses asbl dont les Jeunesses musicales de Bruxelles et est secrétaire de la Société belge d’Analyse musicale.

Fabian a été le lauréat 2009 du Fonds Thirionet, octroyé par la province de Namur.

En avril 2023, il s’est intéressé aux représentations musicales de l’orient dans la musique classique occidentale à l’occasion d’une journée d’étude à l’Académie royale de Belgique intitulée " Musiques arabes, musique savante occidentale, quelques siècles d’interactions créatives ".

Emmanuelle Zech

Emmanuelle Zech est docteure en psychologie, professeure ordinaire à l’UCLouvain, et doyenne de la Faculté de Psychologie et des Sciences de l’Education. Elle est à la tête de son propre laboratoire de recherches, le Person-Centred Research and Training Lab (PCLab).

Sa formation débute par une licence en psychologie à l’UCLouvain puis un doctorat sur l’efficacité de l’expression des émotions, sous la direction de Bernard Rimé. Elle réalise ensuite un postdoctorat aux Etats-Unis (laboratoire de Peter Lang et Margaret Bradley) sur la psychophysiologie des émotions et l’impact d’événements émotionnels et traumatiques. Elle a aussi une formation complémentaire en psychothérapie centrée sur la personne et expérientielle, qu’elle pratique lors de consultations et supervisions cliniques à Louvain-la-Neuve. Professeure ordinaire à l’UCLouvain, Emmanuelle Zech est chargée de cours de psychologie clinique et de psychothérapie, et, est ponctuellement invitée à donner cours dans plusieurs autres universités belges et étrangères. Elle a aussi créé et développé le programme de formation du Certificat d’Université en Psychothérapie Centrée sur la Personne et Expérientielle ainsi que le cursus en apprentissage de compétences relationnelles.

Emmanuelle Zech est membre du Conseil fédéral des professions de soins de santé mentale et membre experte au sein de l’International Work Group on Death, Dying and Bereavement (IWG). Elle collabore avec la World Association for Person Centered and Experiential Psychotherapy and Counseling et a présidé le Centre de recherche en santé et développement psychologique de l’UCLouvain jusque 2014.

Consultez les publications d’Emmanuelle Zech sur Research Gate.

Les projets de recherche développés par Emmanuelle Zech portent sur les questions de souffrance humaine, d’adversité et d’aide psychologique. Elle s’intéresse aux réactions des personnes face à ces situations, à leurs processus d’adaptation et à l’efficacité des ressources professionnelles et interpersonnelles (comme le soutien social) pour s’ajuster à ces évènements. Son but est de comprendre comment aider efficacement toute personne confrontée à ces situations. Emmanuelle travaille aussi sur l’étude des conditions d’efficacité et de pertinence des interventions psychologiques, en particulier le développement de certaines attitudes (empathie, authenticité, …) envers le patient. En lien, elle étudie les méthodes d’apprentissage les plus appropriées pour les étudiants et étudiantes qui se forment aux relations d’aide et psychothérapeutiques, et notamment certaines méthodes innovantes qu’elle a elle-même développées et mises en place dans le cursus de l’UCLouvain.

Actuellement, Emmanuelle Zech travaille sur les rites du deuil pendant la période de pandémie. Elle participe à une étude internationale multidisciplinaire qui sonde les personnes ayant perdu un proche depuis mars 2022. Alors que les rites funéraires étaient réduits voire supprimés en raison des mesures sanitaires, le but des chercheurs et chercheuses est d’étudier l’évolution de ces rites funéraires et leur impact sur les personnes endeuillées. Cette étude est financée en Belgique par une bourse FRESH FNRS octroyée à la doctorante Camille Boever, qui l’accompagne sur ce projet.

Consultez ici le site dédié à l’étude.

Le projet d’étude a commencé en février 2022, et les chercheuses, en contact avec des personnes endeuillées, font face à des vécus et des expériences très diverses. Elles ont reçu le témoignage écrit de 553 personnes belges, dont 472 analysables, et ont rencontré 12 d’entre elles pour un entretien approfondi. Actuellement, les personnes ont rempli leur questionnaire à deux reprises et le troisième temps de remplissage est en cours.

Selon les premières observations, le taux de personnes montrant une intensité de deuil particulièrement élevée (pouvant répondre à ce qu’on appelle un " trouble de deuil prolongé ") est légèrement plus élevé (20%) durant la pandémie qu’avant la pandémie (10-15%). À propos rites funéraires réalisés, plus de 65% des personnes n’ont pas pu réaliser les rites souhaités pour leur proche, que ce soit en fin de vie ou après son décès.

En ce qui concerne les rites réalisés pendant et après le décès, contrairement au postulat de base, les personnes qui n’ont pas pu accomplir leurs rites ne présentent pas de détresse plus intense par rapport aux personnes satisfaites par rapport aux rites réalisés pour leur proche. D’autres analyses serviront à approfondir la compréhension du lien entre la réalisation des rites et le vécu de deuil. Par ailleurs, il est crucial d’observer l’évolution du deuil, de la détresse des personnes et leur croissance dans le temps, car des effets décalés pourraient également apparaître.

Face aux restrictions sanitaires, les participants et participantes rapportent avoir réagi de différentes manières. Certaines personnes ont créé de nouveaux rites (34%). D’autres avaient l’intention de postposer la réalisation de certains rites (47,9%) et parmi elles, 31,6% l’ont fait, 37,3% ont l’intention de le faire et 31,1% ont abandonné l’idée. Enfin, 39, 7% de personnes ont reconnu être passées outre les mesures afin de pouvoir réaliser un rite qui leur semblait nécessaire alors qu’il n’était pas permis à l’époque. Les personnes ayant transgressé les mesures pour réaliser des rites présentent, au moment du remplissage du questionnaire, un niveau plus élevé de détresse.

A ce stade, les résultats montrent que des éléments du vécu de deuil et des circonstances du décès sont liés entre eux. Des analyses sur les prochains temps de mesure pourront informer davantage sur la nature des liens entre ces aspects et sur l’évolution de ces liens dans le temps. Des analyses qualitatives des textes rédigés par les personnes participantes ainsi que des entretiens permettront également de compléter et nuancer ces résultats.

Consultez les publications d’Emmanuelle Zech et Camille Boever concernant les premiers résultats de leur étude :

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