Réchauffement climatique, pollution, urbanisation... une crise mondiale de l'eau est imminente, alerte l'Unesco

Selon l’auteur principal du rapport, Richard Connor, les pénuries d’eau tendent à se généraliser. En moyenne, 10% de la population mondiale vit dans des pays où le stress hydrique atteint un niveau élevé ou critique. Jusqu’à 3,5 milliards de personnes vivent dans le stress hydrique pendant au moins un mois par an. Le changement climatique accentue les pénuries saisonnières, y compris dans les régions où cette ressource est actuellement abondante (comme l’Afrique centrale, l’Asie de l’Est et certaines régions de l’Amérique du Sud). Il l’aggrave dans les régions où l’eau est déjà rare (comme le Moyen-Orient et le Sahel en Afrique).

Tous les pays du monde, qu’il s’agisse de pays à revenu faible, moyen ou élevé, encourent des risques liés à la qualité de l’eau. Dans les pays à faible revenu, la mauvaise qualité de l’eau ambiante résulte souvent d’un traitement insuffisant des eaux usées tandis que dans les pays à revenu élevé, les eaux de ruissellement agricoles posent un problème plus grave. La planète aurait subi une perte de 80% de l’étendue de ses zones humides naturelles depuis l’ère préindustrielle (XVIIIe siècle).

Le programme d’accès et d’assainissement des eaux mené par les Nations Unies a pris du retard et son rythme devrait être multiplié par quatre. Selon les derniers chiffres datant de 2020, 2 milliards de personnes n’ont toujours pas accès à des services d’approvisionnement en eau potable gérés de façon sûre et 3,6 milliards de personnes n’ont pas accès à des services d’assainissement gérés de façon sûre.

Aujourd’hui, l’assainissement des eaux usées devient le problème numéro 1 du programme des Nations Unies. Selon, Richard Connor, le rédacteur en chef du rapport, il s’agit, à la fois, d’un problème financier et de perception. En moyenne, les coûts d’assainissement sont cinq fois plus élevés que l’accès à l’eau. Prendre de l’eau à une rivière et la traiter coûte une somme cinq fois moins élevée que de retraiter les eaux usées. Pour ces raisons financières, les pays émergents préfèrent assurer l’accès à l’eau potable plutôt que de traiter ensuite les eaux usées. Actuellement, 80% des eaux usées sont rejetées dans l’environnement sans aucun traitement. L’eau est contaminée un peu partout par des excréments humains. Il y a crise et c’est principalement au niveau de l’assainissement. L’expert reconnaît qu’il faut aussi combattre aujourd’hui, la mentalité de la plupart des pays émergents qui est de ne pas prendre en considération ce problème des eaux usées.

La pollution des eaux usées fait apparaître de nouveaux risques sanitaires. Les populations sont exposées avant tout à une contamination bactérienne mais aussi à des " contaminants émergents " présents dans l’eau, tels que les produits pharmaceutiques, les produits chimiques industriels et ménagers, les produits de soins personnels, les pesticides et les nanomatériaux manufacturés.

Les Nations Unies préconisent dans les bidonvilles et les zones de grande densité humaines une plus grande implication des populations affectées. Elles proposent aussi la construction de fosses septiques communes gérées en partenariat. Les solutions existent mais il faut les appliquer.

Environ un tiers des villes du monde dépendent des eaux de surface. Elles sont confrontées à la concurrence de l’agriculture. Paradoxalement, c’est cette même eau nécessaire aux agricultures qui alimente les villes. La demande en eau des villes devrait augmenter de 80% d’ici 25 ans. Et la population urbaine confrontée au manque d’eau devrait doubler au cours de la même période.

A l’avenir, les Nations Unies préconisent une coopération entre villes et agricultures qui les entourent. Elle implique des mécanismes participatifs et collaboratifs. Les partenariats peuvent aussi faciliter les collectes de données et renforcer la confiance des partenaires. Ils mettent en commun des ressources limitées et partagent les risques.

Les changements climatiques ont changé la donne. Des pays jusqu’à présent pas touchés par les sécheresses vivent aujourd’hui des épisodes de sécheresse très longues. Selon Richard Connor, il faut plutôt parler de la croissance de la variabilité des climats, c’est-à-dire des sécheresses plus intenses et des précipitations plus intenses. Tout cela a un impact direct sur l’économie mondiale. Cet expert prend l’exemple de la sécheresse qui a touché la Russie en 2009 et 2010 et l’a empêché d’exporter du blé essentiellement dans les pays du Moyen-Orient. La conséquence immédiate a été l’émergence du Printemps arabe. L’expert souligne un aspect positif de la mondialisation, c’est de pouvoir exporter plus de nourriture dans les parties du monde où l’eau vient à manquer.

En 2020, le montant global des fonds alloués et décaissés pour " l’eau " au titre de l’aide publique au développement (APD) a été estimé à 8,7 milliards de dollars EU contre 2,7 milliards de dollars EU en 2002.