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Réchauffement climatique : le GIEC pratique la pensée unique. Vrai ou faux ?

Réchauffement climatique : le GIEC pratique la pensée unique. Vrai ou faux ?

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Une affirmation qu’on rencontre très souvent en science climatique, c’est que le GIEC, Groupe d'experts Intergouvernemental sur l'Évolution du Climat, ne ferait pas de place aux voix dissidentes. Selon certains, il irait jusqu’à exclure certains scientifiques de ses débats. Sur ce site très contesté de journalisme participatif, un climatosceptique belge l’affirme : le GIEC s’organise pour étouffer les opinions sceptiques.

Cette affirmation réapparaît à chaque édition d’un nouveau rapport du GIEC. Ainsi, dans ce tweet du 16 mars, l’internaute indique que les scientifiques du GIEC ne se remettent pas en question et attaqueraient même les observateurs.

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Le GIEC, c’est quoi ?

Le GIEC (The Intergovernmental Panel on Climate Change ou IPCC en anglais), a été créé par les Nations Unies en 1988. Selon les connaissances acquises à cette époque, la communauté scientifique savait déjà que l’augmentation du taux de CO2 dans l’atmosphère allait avoir des conséquences. C’est pourquoi les gouvernements du monde ont compris que la question allait tôt ou tard devenir un grave problème.

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Ils ont alors chargé un groupe de spécialistes (le GIEC) d'évaluer, sans parti pris et de façon méthodique, claire et objective, les informations d'ordre scientifique, technique et socio-économique qui sont nécessaires pour mieux comprendre les fondements scientifiques des risques liés aux changements climatiques d'origine humaine.

Le GIEC a donc bien reçu pour mission de s’intéresser au changement climatique d’origine humaine. Mais, bien entendu, pour éviter de dire n’importe quoi, le GIEC observe également tous les paramètres qui peuvent influencer le climat, comme : l’activité solaire, l’orbite terrestre ou l’activité volcanique. Nous l’avons montré dans notre chronique sur le Soleil.

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Qui sont les auteurs de ces fameux rapports ?

Tous les cinq à sept ans, le GIEC édite un rapport qui fait la somme des connaissances acquises sur le sujet. Il s’agit d’un document qui contient au total plusieurs milliers de pages et repose sur des dizaines de milliers de références.

En effet, pour constituer ce document, le GIEC rassemble les résultats de recherches menées au cours des dernières années dans les universités, dans les laboratoires et sur le terrain, à travers le monde entier.

Dans la majorité écrasante des cas, il se fonde sur des articles scientifiques, c’est-à-dire des articles qui ont été édités dans des revues spécialisées, où un comité de lecture, constitué d’autres scientifiques, a déjà vérifié que les recherches avaient été menées correctement et que les résultats sont fiables. Inutile de le dire : les articles de blog, de journaux et autres posts Twitter ou Facebook n’ont pas grand-chose à faire au GIEC.

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Pour établir chaque chapitre de son rapport, le GIEC fait appel à un groupe de scientifiques international. Ce sont les auteurs du rapport. Ils sont une cinquantaine par chapitre et réalisent une synthèse des connaissances sur une question précise : par exemple l’évolution des glaces ou la prévision statistique des sécheresses et inondations.

Notons-le, les auteurs ne sont pas payés pour ce qu’ils font. Ils sont momentanément détachés de leur mission d’enseignement ou de recherche.

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... et une relecture par des examinateurs

Lorsque les chapitres ont été élaborés par les auteurs, le projet de rapport est soumis à toute personne dans le monde qui souhaite communiquer des remarques. Bien sûr, il faut disposer, tout de même, d’un minimum de compétences scientifiques. Mais l’idée est simple : plus le texte du rapport est mis en débat, plus il sera solide en fin de processus. Et c’est bien le but en sciences.

Ces examinateurs, on les appelle les experts "reviewers". Pour la 5e version du rapport (2014), plus 142.000 commentaires ont été émis par plus de 3400 experts-reviewers. Le règlement du GIEC oblige les auteurs à répondre aux commentaires des experts-reviewers. Et si vous êtes curieux, sachez que pour la sixième version du rapport, leur liste et leurs qualifications sont même disponibles en ligne. 

Si les commentaires sont fondés, les auteurs les prennent en compte : le chapitre va être modifié. Mais si par contre, ils sont erronés, alors les auteurs les rejettent. C’est normal. À l’école primaire, quand des résultats d’un élève en calcul sont erronés, une institutrice ne lui donne pas 10/10… elle examine quelles sont les réponses exactes et les réponses fausses.

Il en est de même au GIEC. Parce que la question fondamentale en jeu n’est pas pour les auteurs de "préserver leur point de vue" ou de "pratiquer la pensée unique", mais de vérifier sans parti pris si ce qu’ils ont dans les mains est correct et fiable scientifiquement. Si ce l’est, pas de problème. Si ça ne l’est pas, il n’y a aucune raison de faire entrer des considérations erronées dans leur rapport.

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L’histoire montre que même des climatosceptiques notoires ont transmis des commentaires au GIEC. Par exemple, le physicien climatosceptique français, François Gervais, a pu transmettre ses remarques en tant qu’expert-reviewer. François Gervais a d’ailleurs profité de ce rôle pour faire croire qu’il avait été lui-même sollicité comme rapporteur par le GIEC, en raison de ses compétences. C’est cependant impossible, parce que les experts reviewers se signalent sur base volontaire : le GIEC ne les sollicite pas comme le rappelle à juste titre Le Monde. Par ailleurs, François Gervais a laissé planer le doute sur le rôle exact qu’il a joué auprès du GIEC. Dans les premières minutes de sa conférence truffée d’erreurs scientifiques, il est présenté comme quelqu’un qui a "participé aux travaux du GIEC", ce qui est faux, mais qu’il ne dément pas. Il n’est pourtant pas difficile de comprendre qu’entre un auteur qui donnerait soudain tort au GIEC et un expert reviewer dont les commentaires ont été refusés, il y a une grande différence.

En conclusion, le GIEC ne rejette personne et a même organisé l’examen de tous ses documents pour augmenter la qualité de ses conclusions.

Vu le taux de renouvellement des auteurs entre chaque nouvelle version du rapport (environ 70%) et le nombre d’auteurs et d’experts-reviewers qui ont réalisé les différentes versions du rapport depuis trente ans, les rapports du GIEC constituent aujourd’hui sans aucun doute les documents parmi les plus vérifiés de toute l’histoire de l’humanité… et donnent à ces sources une valeur sûre, en dehors de tout complot possible.

Par ailleurs, l’attention de la sphère climatosceptique sur ces rapports contribue en fait à les valider. En effet, tout climatosceptique qui souligne une erreur dans ces rapports s’empresse de la communiquer publiquement pour discréditer le GIEC. Ceci permet au GIEC de corriger l’erreur dans le rapport qui suit. Mais ce genre de cas est très rare, et relativement connu (notamment une erreur commise par le GIEC sur la fonte de l’Himalaya, demeurée célèbre). Notons toutefois que jamais personne n’est parvenu à donner tort au GIEC sur l’existence du réchauffement climatique en cours et sur sa cause humaine.

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