Selon Marie-Hélène Ska "les délégués et les travailleurs ont l'impression de ne pas être entendus. Il est grand temps que cela change."
Elle souligne que les grévistes veulent une plus juste répartition des revenus. "J'espère que les responsables politiques donneront des signaux d'inflexion", poursuit-elle. "Signaux que nous ne percevons toujours pas, même si l'idée qu'il faut générer des rentrées nouvelles progresse petit à petit. Mais on ne veut pas du symbolique. On veut relancer l'économie, et donner des signaux positifs pour les jeunes, qui sont trop souvent sans emploi."
Aux patrons, la secrétaire fédérale de la CSC demande d'arrêter leur dogmatisme et de ne pas seulement parler de concertation sociale, mais de la mettre en œuvre. Elle réclame que le gouvernement fédéral cesse de "répéter que l'accord de gouvernement est une bible mais prenne en compte la réalité des travailleurs".
"Il n'y a jamais eu de grève aussi forte, en front commun, du nord au sud et de l'est à l'ouest. Une grève qui n'est pas corporatiste, mais qui est un signal fort", a-t-elle conclu, avant de se rendre à Eupen puis de revenir à Bruxelles plus tard dans la journée.
Faire tomber le gouvernement? "On n'est pas dans cet esprit-là"
Le secrétaire général de la FGTB, Marc Goblet, a déclaré lundi matin sur les ondes de Bel RTL, ne pas vouloir faire tomber le gouvernement fédéral. Il a toutefois réitéré ses menaces d'un nouveau plan d'actions en janvier si le gouvernement et les employeurs restent enfermés "dans la même logique d'autisme que celle que l'on connaît aujourd'hui".
Interrogé sur son éventuelle volonté de faire tomber le gouvernement Michel, Marc Goblet a répondu que ce n'est "absolument pas le cas" et que le gouvernement "a été élu démocratiquement". "On n'est pas dans cet esprit-là. Le gouvernement ne tombera pas nécessairement par nous. Il pourra très bien tomber par des dissensions internes", a-t-il ajouté.
Le secrétaire général de la FGTB a laissé entendre que la porte de la concertation sociale restait entrouverte, après une première réunion du Groupe des 10 la semaine dernière et avant une nouvelle réunion des partenaires sociaux ce mercredi. Mais il n'exclut pas davantage la tenue de nouvelles actions.
"Nous allons chercher d'abord les voies pour relancer la concertation mais si on doit vérifier qu'on est toujours dans la même logique d'autisme que celle qu'on connaît aujourd'hui de la part du gouvernement et des patrons, alors nous n'aurons pas d'autre alternative que de devoir redéfinir un plan d'actions à partir de janvier", a-t-il averti.
Regrettant l'absence, pour l'heure, de toute marge de négociations, le secrétaire général de la FGTB a réitéré la demande du front commun syndical que "l'on rende aux interlocuteurs sociaux la négociation" sur la formation des salaires et les aménagements de fin de carrière. Le front commun réclame en outre "un plan de relance, des services publics de qualité et une fiscalité plus juste qui met à contribution le capital".
Une majorité de Belges regrette les grèves
D'après Agoria, 61% des Belges estiment que les grèves mettent nos emplois en danger et 59% espèrent qu'aucune nouvelle action ne sera menée après le 15 décembre, rapporte la fédération de l'industrie technologique. En collaboration avec iVox, le groupement sectoriel a sondé 1000 Belges sur leur opinion au sujet des grèves.
Toujours d'après cette enquête, 85% des citoyens seraient opposés à l'utilisation de piquets ou de barrages empêchant les non-grévistes de travailler. "Les grèves montent les gens les uns contre les autres. Cette polarisation doit maintenant cesser", estime Marc Lambotte, CEO d'Agoria.
La fédération rappelle que de nombreuses entreprises technologiques subissent une grève pour la troisième fois en quelques semaines, ce qui a des conséquences sur leur production. "Les entreprises du secteur TIC ou celles qui ne sont pas situées dans un zoning industriel sont généralement actives aujourd'hui grâce à la mise en place du télétravail. Un grand nombre de travailleurs ont également pris congé", note toutefois la fédération.
Lundi, le Syndicat des Indépendants et des PME (SDI) a également fait savoir que, d'après une enquête qu'il a menée auprès auprès de 480 entreprises, 78% des commerçants et des TPE n'approuvent pas la manière dont sont menées les grèves de décembre par les syndicats.
De son côté, la CSC Bruxelles-Hal-Vilvorde assure que le mouvement de grève rencontre un fort soutien de la population. "Dans les blocages filtrants mis en place, les automobilistes montrent beaucoup de compréhension. La plupart nous encouragent même et indiquent que s'ils en avaient la possibilité, ils rejoindraient les piquets", a ainsi témoigné un délégué présent sur les barrages.
Peu de grévistes dans le secteur du commerce
Le secteur du commerce serait peu concerné par les grèves, indique lundi la fédération du commerce et des services (Comeos) dans un communiqué. "Mais les établissements sont touchés par des actions menées essentiellement par des gens extérieurs au secteur, qui bloquent l'accès des magasins aux clients et au personnel qui veut travailler", pointe Comeos, qui qualifie la situation "d'inacceptable". Lors des trois grèves régionales, la fédération a compté en moyenne 5% de grévistes dans les magasins en Flandre et 20% en Wallonie et à Bruxelles.
Comeos affirme respecter le droit de grève, mais la fédération fustige néanmoins le recours aux piquets de grève. "En procédant de la sorte, les magasins où seuls trois ou quatre travailleurs font grève sont tout de même contraints de fermer leurs portes. Le plus choquant étant selon nous le blocage préventif de certaines routes par la police. Il nous semblerait plus logique que la police fasse lever ces piquets le plus rapidement possible. En ne les priant pas de dégager la voie publique, les autorités soutiennent ainsi les grévistes qui bloquent illégalement les ronds-points. Tout qui se risquerait à bloquer un rond-point un autre jour serait arrêté sur-le-champ. Visiblement, la loi ne s'applique pas pendant les grèves. Nous espérons qu'il n'en sera pas de même ce lundi et que la loi sera respectée", conclut M. Michel.
Pour la FEB, la grève a eu lieu principalement dans les services publics
Une enquête de la fédération des entreprises de Belgique (FEB) réalisée lundi auprès de ses membres révèle qu'une petite minorité de travailleurs du secteur privé a fait grève. Elle a eu lieu principalement dans les services publics (transports, lamaneurs, administrations, ...), ajoute la fédération. Dans les PME, "ils n'étaient pas 10% à se croiser les bras, peut-être même pas 5%", annonce de son côté l'UCM, organisation représentative des indépendants et PME francophones, qui ne dispose toutefois pas encore de chiffres exacts.
"Ce sont essentiellement de grandes entreprises industrielles et de grandes centrales industrielles et de services qui ont été touchées, souvent là où quelques grévistes peuvent bloquer l'accès et paralyser l'activité", ajoute la FEB. "A notre connaissance, on n'a pas signalé d'actes de vandalisme."
La fédération regrette les "dommages importants" engendrés sur l'économie "par une minorité" de personnes et chiffre le coût total de toutes les grèves des dernières semaines à plusieurs centaines de millions d'euros.
La FEB pointe quelques facteurs macroéconomiques "favorables à une relance progressive", comme les prix pétroliers et les taux de change actuels. "J'appelle les syndicats à ne pas miner durablement ce mélange précaire de conditions économiques favorables par des grèves. En fin de compte, cela ne fait que mettre en péril l'emploi des travailleurs belges. Par ailleurs, il serait positif qu'employeurs et travailleurs remettent au gouvernement une proposition commune concernant le contenu de l'enveloppe bien-être (1 milliard d'euros pour 2015-2016) afin que les allocataires les plus défavorisés sachent rapidement à quoi s'en tenir, tout comme les travailleurs touchant les revenus les plus bas. La FEB est prête pour une telle démarche commune", conclut le patron de la FEB, Pieter Timmermans.
L'UCM ne dispose pas de chiffres précis, mais estime néanmoins que "les indépendants ont travaillé, tout comme la quasi-totalité du personnel des PME, du moins partout où c'était possible".
Du côté de la Flandre et de Bruxelles, le réseau d'entreprises flamand (Voka) a estimé que l'entièreté des employés a travaillé dans 77% de sociétés, selon une enquête menée auprès de 1.400 établissements. Quelque 7 entreprises sur 10 étaient également accessibles. Près de 20% de sociétés ont fait part de difficultés d'accès à leur zoning industriel. Des piquets de grève ont été placés auprès de 4% des entreprises.
RTBF avec Belga