Que s’est-il passé exactement à Boutcha et dans d’autres villes martyrs ukrainiennes ? Qui sont les auteurs des atrocités commises contre les civils ? S’agit-il d’exactions commises par jeunes soldats venus d’Extrême-Orient et livrés à eux-mêmes ? Ou d’un massacre prémédité et organisé par un officier bien connu, pour terroriser et soumettre la population ukrainienne ?
Des enquêteurs sont déjà à pied d’œuvre pour recueillir des témoignages et rassembler des preuves. Plusieurs pays mettent des moyens humains et financiers à disposition de la Cour pénale internationale pour qu’elle puisse mener une enquête complète sur ces possibles crimes de guerre.
Trois jours à Boutcha
La correspondante de la RTBF en Ukraine Maurine Mercier a passé trois jours à Boutcha et a parlé avec des survivants de l’offensive russe. Elle s’est éloignée du centre de la ville, sur lequel se concentre aujourd’hui l’attention du monde, pour se rendre plus loin, en périphérie, et vérifier si ce scénario s’était répété là aussi. C’est le cas : les habitants lui ont décrit la terreur que les soldats russes ont fait régner sur leur quartier.
Ils décrivent ces militaires comme de très jeunes hommes, se comportant plutôt comme une bande de malfaiteurs. "Ils déambulaient partout avec leurs armes. On a vu deux grands types, des costauds, des professionnels, mais les autres devaient avoir à peine 18 ans", racontent une habitante et son mari. "Ils portaient des tenues de militaires, mais ils étaient là comme pour s’amuser."
Des petits voyous, souvent saouls
Plus que des militaires, les habitants de Boutcha ont vu leur ville envahie par des petits voyous, à la violence gratuite, sans hiérarchie, sans organisation claire. Ils étaient très souvent saouls, racontent les témoins. "Ils étaient prêts à tuer pour voler une mobylette. Puis, ils s’encastraient dans le portail des maisons."
Les soldats russes ont exercé une terreur permanente sur les habitants. Des groupes frappaient aux portes ou les défonçaient à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit, pour effrayer et piller.
Il suffisait de dire quelque chose qui ne leur plaisait pour qu’ils vous tuent
"Ils sont venus au moins quatre fois chez moi, témoigne un homme. Ils ont fait mine de me tirer dessus parce que je ne trouvais pas les clés de ma moto. Ils nous ont volé deux voitures. On les a retrouvées plus loin dans la rue, minées. Après leur départ, mon frère a failli mourir en voulant les récupérer. Les voisins vous le diront aussi : il suffisait de dire quelque chose qui ne leur plaisait pour qu’ils vous tuent. Les soldats sont arrivés chez un de mes amis avec une caméra. Ils lui ont demandé de dire qu’il aimait les Russes, le monde russe. Il a refusé, et ils lui ont tiré dans la jambe. Ils ont demandé 'et maintenant ?' Mon ami a répondu 'gloire à l’Ukraine', et ils l’ont tué."