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Quelles alternatives aux pesticides ?

© Pixabay

Par RTBF La Première via

Avec les beaux jours, l’envie d’extérieur, de jardinage, de potager, de flâneries dans les espaces verts est de retour ! Comme chaque année, on vous invitera à ne pas utiliser de pesticides, voire à laisser vos espaces s’épanouir sans intervenir. En Belgique, il existe d’ailleurs un plan national de réduction des pesticides, dont la dernière enquête publique vient de se clôturer. Mais il y a aussi plusieurs opérations comme "En mai, tonte à l’arrêt" avec Le Vif, ainsi que de nombreux organismes prêts à vous aider. Petit tour d’horizon !

La NAPAN Task Force, c’est quoi ?

Henri Caulier est bio-ingénieur chez Bruxelles Environnement, coordinateur du programme bruxellois de réduction des pesticides et membre de la NAPAN Task Force, un plan national de réduction des pesticides sur les espaces verts, mais aussi en agriculture et dans les jardins des particuliers. Depuis 2012, ce plan propose un programme très complet d’actions concrètes, de sensibilisation, de formation, de réglementation, aussi bien pour les particuliers que les professionnels. Un nouveau plan quinquennal, le troisième donc, va s’ouvrir en 2023.

Ces vingt dernières années, Henri Caulier observe une belle progression, notamment dans les espaces publics, où l’on est passé quasi intégralement à une gestion sans aucun pesticide. Chez les particuliers également, qui utilisent aujourd’hui moins de 5% de pesticides, contre 30% dans les années 2000. Et les produits sont globalement un peu moins dangereux qu’avant.
Le plus gros challenge reste en agriculture. La culture bio a beaucoup augmenté ces dix dernières années, mais certaines cultures très gourmandes en pesticides ont augmenté également, comme la pomme de terre.

L’objectif européen est de réduire de 50% l’utilisation des pesticides d’ici 2030. Mais au niveau économique, il y a des doutes de la part des syndicats agricoles et d’autres acteurs de l’agro-industrie, qui craignent les effets de la réduction des pesticides sur la viabilité économique du système. Pour sortir de cette logique, il est essentiel que l’administration offre des aides ciblées sur les acteurs du changement.

Vers une Wallonie sans pesticides ?

La biologiste Camille le Polain est chargée du projet Vers une Wallonie sans pesticides, chez Nature et Progrès. Ce projet vise à rassembler tous les acteurs, consommateurs, producteurs, experts, au travers de rencontres en fermes bio, pour parler des alternatives aux pesticides chimiques de synthèse. 11 rencontres en ferme seront ainsi organisées entre mai et juillet.

La peur du changement, le manque de moyens constituent des freins pour le monde agricole. Manque de moyens pour augmenter la visibilité et l’accessibilité des méthodes alternatives. Manque de moyens pour la recherche et le développement de méthodes alternatives aux pesticides chimiques.

Camille le Polain pointe aussi un manque d’accompagnement au changement pour les agriculteurs. La création d’un conseil agricole indépendant, neutre, efficace serait bienvenue.

En mai, tonte à l’arrêt

Le but de l’opération En mai, tonte à l’arrêt est de montrer aux gens que leur jardin abrite un trésor insoupçonné, explique Christophe Leroy, journaliste au Vif/L’Express. "La biodiversité a aussi un rôle à jouer dans notre environnement immédiat, soumis à l’artificialisation des sols, à la fragmentation des habitats, à la perte d’espaces naturels."

La faculté Gembloux Agro-Bio Tech, partenaire scientifique du Vif, exploite les résultats qui émanent de cette opération, par le signalement des fleurs et des espèces encodées par les particuliers sur leur plateforme. Cela lui permet d’avoir une meilleure connaissance de l’état de la biodiversité des pelouses domestiques. Chaque participant aura son 'indice nectar' personnalisé, qui montrera dans quelle mesure l’opération a pu permettre de soutenir les pollinisateurs et la biodiversité dans son jardin.

Un Printemps Sans Pesticides

Eviter de tondre, c’est inviter un peu plus la vie et la nature à s’installer au jardin, souligne aussi Bastien Domken, conseiller technique et chargé de projet pour Adalia – Jardiner Sans Pesticides. Un jardin doit cependant rester accessible aux enfants et aux zones de jeu, mais rien n’empêche de créer des refuges pour la nature dans des coins moins fréquentés.

Adalia donne de multiples bons conseils pour le travail au jardin : comment entretenir les espaces avec des moyens alternatifs aux pesticides, quel outil utiliser au bon endroit, comment reconnaître les espèces 'nuisibles' ou non pour le potager…

Parmi les conseils de Bastien Domken :

Les pucerons peuvent inquiéter lorsqu’on les voit apparaître sur certaines plantes, en particulier sur les rosiers, mais on voit aussi arriver les auxiliaires, comme les coccinelles ou les larves de syrphes. C’est l’occasion d’observer comment fonctionne l’écosystème ! Si on n’a pas un écosystème favorable dans son jardin, on peut alors intervenir avec des techniques douces, bien ciblées.

On peut piéger les limaces avec de la bière diluée, les arrêter avec des barrières naturelles comme la cendre ou du sable, les attirer ailleurs avec des pelures de légumes, favoriser, par des zones non tondues, les animaux qui s’en nourrissent, comme les musaraignes, les carabes,… Si on laisse le temps aux graines de bien pousser en pots avant de repiquer les plants au jardin, on évite aussi l’attaque massive des limaces. En dernier recours, il y a les granulés anti-limaces en version bio. Mais on peut aussi les accepter en se disant qu’on ne pourra de toute façon pas totalement les exterminer du jardin !

Bastien Domken recommande aussi la technique du faux semis, c’est-à-dire ne pas aller trop vite pour mettre en place nos semis, nos plants, travailler le sol pour voir germer les graines qu’on ne veut pas au potager puis désherber par un petit coup de binette. Et seulement ensuite planter et semer ce que l’on souhaite.

Outre les moyens de lutte, les méthodes curatives, il faut penser à tous ces moyens préventifs à utiliser en amont pour prévenir l’apparition des indésirables, aussi bien à l’échelle du particulier que de l’agriculteur, rappelle Camille le Polain. On parle de cultures associées ou de cultures intercalaires, qui soit attirent le ravageur ailleurs, soit attirent les prédateurs de ces ravageurs via des bandes de fleurs par exemple.

Comment gérer les invasives ?

Au jardin, il s’agit de trouver un équilibre, mais ce n’est pas toujours facile. Certains milieux ont peu d’oiseaux et d’insectes pour réguler les ravageurs et ont plus besoin d’un coup de main de l’homme. Lutter n’est pas non plus l’objectif ultime. On peut aussi laisser faire, laisser mourir certaines choses pour que d’autres espèces, plus imprévues, plus sauvages, puissent s’épanouir. Mais les invasives ne sont pas faciles à gérer.

Pour limiter les orties, la meilleure solution est la fourche bêche avec un peu d’huile de coude, pour aller chercher les racines bien profondément, conseille Bastien Domken. Attention : le rhizome fragmenté favorise la dispersion ! Il est conseillé aussi de les faucher, comme toute indésirable, avant la floraison, avant que les graines ne se disséminent.

Quelques événements à noter

Mai est le mois de la nature à Bruxelles : RDV sur participez.environnement.brussels pour découvrir le programme des activités, y compris sur le jardinage naturel, la découverte de la faune et la flore sauvages à Bruxelles.

Adalia organise le Printemps Sans Pesticides : partout en Wallonie, du 20 mars au 20 juin, des centaines d’actions sont organisées autour du Zéro Pesticide.

En mai, tonte à l’arrêt, mais rien n’empêche de continuer l’action plus longtemps sur une partie de votre jardin !

L’émission complète, à écouter ici…

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