Des citations détournées
Le succès des citations, qui augmente de jour en jour sur les réseaux sociaux, pose un peu problème aux philosophes, admet Matthieu Peltier.
Des citations sur l’amour, sur la vie, sur l’art,… on en trouve souvent plaquées sur un coucher de soleil ou accompagnant un selfie avantageux. On ne peut pas nier l’usage de la citation comme affirmation identitaire. Par la citation, on se définit une identité vis-à-vis des autres. C’est une manière comme une autre de communiquer quelque chose de nous-mêmes.
Mais ce qui énerve parfois les philosophes, c’est le détournement que subissent les citations philosophiques, prises hors de leur contexte, comme le montre Laurence Devillairs dans son livre Les 100 citations de la philosophie.
En voici trois exemples.
La phrase de Sartre "L’enfer c’est les autres"
On utilise bien souvent cette citation pour souligner le problème des autres, la difficulté de la relation avec les autres. Alors que pour Sartre, cela dénonce d’abord un besoin personnel, celui d’exister dans le regard des autres, un besoin qui nous enferme dans des identités figées qu’on ne parvient pas à dépasser.
La formule de Hobbes "L’homme est un loup pour l’homme"
On l’utilise pour parler de la cruauté gratuite que l’homme a envers ses semblables. Alors que Hobbes veut dire par là que c’est l’expression d’un principe vital qu’il reprend au loup et non pas d’une cruauté gratuite. C’est ce principe naturel qui justifie d’ailleurs pour lui le pacte social assurant la suspension des violences justement, pour assurer la conservation des personnes et des biens.
La phrase de Pascal "Le coeur a ses raisons que la raison ignore"
Il ne s’agit pas, chez Pascal, d’une défense de l’aveuglement amoureux, mais plutôt d’une défense de la connaissance intuitive de vérité qui nous dépasse et qui ne peut pas être démontrée par la raison humaine.