Energie

Prolongation du nucléaire : "Nous voulons connaître la facture maximale pour la gestion des déchets", assène Thierry Saegeman, patron d’Engie Electrabel

L'invité de Matin Première

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Par Marie-Laure Mathot sur base de l'interview de Thomas Gadisseux

Pour continuer à pouvoir se chauffer et s’éclairer, nos autorités ont décidé de prolonger l’énergie produite par les centrales nucléaires. Engie Electrabel, qui exploite les centrales de notre pays, accepte mais pas à n’importe quelles conditions. Le groupe est donc en pleine négociation avec le gouvernement fédéral mais il y a deux points de blocage dans les discussions. Un : le montant de la facture de gestion des déchets nucléaires. Deux : la taxe sur les surprofits.

Taxer les surprofits : 300 millions

Quand on parle de surprofits, on pense aux 4,9 à 5,7 milliards d’euros de bénéfices en 2022 pour le groupe Engie, maison mère d’Engie Electrabel. Une partie de ce bénéfice est due au fait que le prix de vente de l’électricité est aligné sur le prix de vente du gaz. Or, la production d’électricité via le nucléaire ne coûte pas si cher que le gaz qu’Engie achète à l’étranger. Si le patron d’Electrabel reconnaît une marge, en Belgique, sur la production d’électricité via le nucléaire, tout ce qui est gagné part… en taxe.

"Depuis des années (2015), il existe une taxe sur le nucléaire basée sur un contrat passé avec le fédéral", explique Thierry Saegeman, CEO d’Electrabel, invité de Matin Première. "Cette année, cette taxe représente 1 milliard d’euros. Cela finance la totalité du tarif social l’année prochaine pour les 940.000 ménages qui bénéficieront ainsi d’une ristourne de 980 euros par an."

La production nucléaire est dans le rouge

Un milliard, ce n’est pas autant que ce que gagné Electrabel sur la production d’électricité. Il y a donc encore une marge mais là encore, elle reviendrait à l’État. Thierry Saegeman détaille le calcul. "Sur la production nucléaire, nous faisons aujourd’hui un bénéfice de deux milliards." Sur ce montant, il faut soustraire deux choses. "Nous devons payer 1,3 milliard d’euros de taxe. Il reste donc 700 millions d’euros de bénéfices."

La taxe sur les surprofits votée par le Parlement fédéral alourdit cette taxe. Et c’est ce que conteste Engie Electrabel aujourd’hui car cela dépasse le cadre fixé en 2015, avant la crise énergétique. "Ce qui est gênant c’est que, tout d’abord, nous avions un contrat avec le gouvernement. Et donc, de toute façon, nous allions payer un milliard d’euros." C’est ce qu’on appelle la contribution nucléaire.

C’est discriminatoire

"Se rajoutent cette année 300 millions d’euros", continue le patron. "Cette taxe se base sur une interprétation du règlement européen. Et en Belgique, on va plus loin que ce que l’Union européenne prévoit […] Nous considérons que c’est discriminatoire et nous demandons au gouvernement de respecter le contrat conclu en 2015." Engie Europe conteste ainsi la taxe dans certains pays dont la Belgique et l’Italie.

Gérer les déchets nucléaires : 3,3 milliards

Si l’Etat a décidé de prolonger Doel 3 et Tihange 4, elles finiront tout de même par être démantelées ainsi que les autres centrales nucléaires. Et cela coûte de l’argent. C’est Engie Electrabel qui paye la facture. Mais la société demande un plafond pour la gestion des déchets issus de la fission de l’uranium et au démantèlement.

Il n’existe pas de solutions pour gérer les déchets nucléaires

"Le problème en Belgique, c’est qu’il n’existe pas de solutions pour gérer les déchets nucléaires à terme, qu’ils soient faiblement ou hautement radioactifs. […] Nous voulons connaître la facture maximale pour la gestion des déchets."

Et c’est là que les discussions se corsent car il s’agit d’une facture qui s’élève à 3,3 milliards, une projection trop élevée aux yeux d’Engie Electrabel. "Nous allons donc faire une contre-proposition au gouvernement, à la commission énergie. […] Appliquer une facture maximale à la gestion des déchets n’est pas une singularité. Cela s’est déjà fait en Allemagne et aux Pays-Bas. Et cela a été approuvé par la Commission européenne. Cela amène plus de transparence."

Et de préciser que "les solutions pour gérer les déchets sont payées à 40% par le contribuable. Donc c’est dans l’intérêt de tout le monde de savoir combien ils vont payer la gestion de ces déchets".

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