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Belgique

Procès des attentats de Bruxelles : "On m’a retrouvée par terre, je n’étais pas loin du kamikaze", Orphée Vanden Bussche, la survivante

Procès 22 mars : Premier témoignage d une victime de Maelbeek

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"J’ai voulu être écolo, j’ai vendu ma voiture et j’ai commencé à aller au boulot en métro". A l’invitation de la présidente de la cour, Orphée Vanden Bussche raconte ce qui s’est passé le matin du 22 mars lorsque son mari la dépose à la station Mérode : " d’habitude, dans la voiture, on n’écoutait pas les infos, on écoutait des comptines pour mon enfant". Il faisait beau ce matin-là se souvient-elle, "il y avait des gens en jupe".

Je ne suis pas montée dans la première parce que tout le monde s’y est précipité.

Le temps de descendre dans le métro, de prendre un ticket et d’acheter un café chaud, il s’agit de choisir la voiture de la rame dans laquelle monter : "je ne suis pas montée dans la première parce que tout le monde s’y était précipité. J’ai choisi la deuxième". Ce qui se passe ensuite, elle a peu de souvenirs, si ce n’est qu’elle décide de rester debout par peur de renverser son café chaud sur quelqu’un. Une phrase prononcée par une dame âgée lui revient à l’esprit : " il y a une bombe qui a explosé à Zaventem ". Elle n’y prête pas attention ne se sentant pas vraiment concernée bien que, dans le quartier du petit Sablon où est situé le salon de coiffure qu’elle dirige, il y a beaucoup de militaires. Elle se souvient encore d’une dame qui rentre dans la voiture à Schuman, "je la laisse s’asseoir parce que je dois descendre à l’arrêt suivant".

C’est le trou noir, je ne me souviens de rien

A partir de là, "c’est le trou noir, je ne me souviens de rien, ma tête et mon corps me préservent de ce moment". Quand elle se réveille, elle ne réalise pas ce qui lui est arrivé, "je suis assise à une sortie de parking, rue de la loi. Je voyais ça comme un tableau, comme si je n’étais pas concernée. J’entendais des cris, des pleurs. Moi, j’étais sonnée. Le mouvement des gens était au ralenti". Elle apprendra par la suite qu’elle a été retrouvée par terre dans la voiture, qu’elle a été piétinée et qu’elle se trouvait pas très loin du kamikaze, "j’étais sous une plaque de métal que quelqu’un a soulevée. Je me suis ensuite relevée et je serais sortie".

Toujours des conséquences aujourd’hui

Quand elle apprendra ce qui est arrivé à la personne qui était à sa droite, elle trouve que physiquement, ce jour-là, le sort l’a plutôt épargnée mais il n’empêche, on ne sort jamais indemne d’un attentat comme celui-là : "je me sentais mal, j’étais étourdie, j’avais envie de vomir. Ma veste était trouée de boulons, ma capuche brûlée, mes cheveux étaient brûlés complètement". Bien qu’elle puisse quitter l’hôpital le premier soir, elle y retournera plusieurs fois par la suite pour se faire retirer des morceaux de métaux partout sur le corps.

Aujourd’hui, Orphée Vanden Bussche a toujours sans répit des acouphènes. À l’hôpital militaire, ils ont des caissons hyperbares, mais c’était trop tard lorsqu’elle s’y est présentée, " j’aurais dû le faire le jour même et pas deux semaines plus tard. C’était important pour moi parce qu’avec mon mari, on faisait de la plongée. Sept ans après, je ne peux toujours pas plonger ".

Culpabilité, peur et colère

Depuis les attentats de 2016, Orphée Vanden Bussche fait partie des victimes qui culpabilisent : "Pourquoi est-ce que je suis en vie ? Pourquoi la mère de famille qui avait trois enfants n’est plus là alors que moi je suis là". Elle explique ensuite qu’il a fallu qu’elle accepte toutes les douleurs qui étaient là, qu’elle se soigne : " je ne voulais voir personne, je ne voulais pas qu’on me dise que je suis une victime". Puis au stade suivant, ce fut la peur que ça arrive de nouveau, à son mari, ses enfants, à ceux qu’elle aime. Plus tard encore vint la colère, pas envers les terroristes, "parce que je n’avais pas envie de perdre mon temps. Mais plutôt vis-à-vis des démarches que je devais faire". Elle évoque les preuves qu’on lui réclamait du côté des assurances, les médecins qui jettent un "bic" par terre pour voir si vous savez le ramasser.

© Palix RTBF

Les conséquences sur le long terme

"J’ai tout perdu, j’ai fermé le salon de coiffure il y a un an". Après les attentats, il y a eu les vagues de covid, elle qui était parvenue avec son mari à ouvrir un salon de coiffure sans crédit a dû jeter l'éponge avec dix mois de loyers de retard :" je suis à la maison, mon travail maintenant, c’est d’être maman".

Orphée Vanden Bussche n’entend rien pardonner à ce stade, " je subis ma nouvelle vie et j’essaie juste qu’elle soit plus douce […] Je ne cherche pas à comprendre leurs actes, mais je suis sur le chemin de la paix avec moi-même et je tente de m’adapter à la nouvelle Orphée que je suis". Et de conclure en disant qu’ils n’ont pas gagné, "on a été solidaires entre victimes. Des inconnus m’ont soutenue. Il y a même une société qui s’est cotisée pour m’acheter mon appareil auditif ".

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