En moins de dix ans, le nombre de détenus âgés de plus de soixante ans a doublé. Ils sont un peu moins de 500 répartis dans les prisons de notre pays. Comment vivent-ils leur détention ? Cela dépend grandement de l’établissement dans lequel ils se trouvent. À la prison de Saint-Hubert, le bloc 8 leur est dédié. Il peut accueillir 30 détenus en fin de peine. Rencontre.
87 ans, 85 ans, 77 ans
À la prison de Saint-Hubert, le doyen a 87 ans. Noël, lui, est un peu plus jeune avec ses 85 printemps. Il nous accueille dans sa cellule. Un lit simple, une télévision, un bureau, un frigo et un évier. De par la fenêtre, il peut voir les corneilles et les chats qui viennent de la ferme d’à côté. Il se dit très heureux d’être dans cet établissement en régime ouvert. "Je suis seul dans ma chambre. C’est une prison, mais je me plais bien à Saint-Hubert", avant de compléter : "J’ai été un petit peu à Namur et un petit peu à Lantin. Il y a une grande différence. Ici, on a plus d’espace, plus de liberté".
Dans la cellule voisine, Nicolas est installé à son bureau. Dictionnaire Larousse en équilibre sur le micro-ondes, une série de crayons qui ont déjà bien servi, une gomme à proximité, il crée ses propres jeux de chassé-croisé. À 77 ans, ce détenu est aussi passé brièvement par Lantin. À Saint-Hubert, il a trouvé son rythme. "Comme il n’y a que des personnes âgées, c’est plus calme que dans d’autres ailes ou d’autres prisons", observe-t-il.
Des activités adaptées
Contrairement à d’autres prisons où il faut parcourir des escaliers et des longues coursives, à Saint-Hubert, tout est de plain-pied. Un plan incliné donne également accès au bâtiment pour les détenus en chaise roulant.
Les activités aussi sont adaptées à ces détenus. Ils peuvent participer aux activités classiques, mais aussi à certaines pensées spécifiquement pour eux. Véronique Van der Avoort, cheffe d’établissement : "la Croix Rouge organise des activités jeux de société. Natagora organise des activités nature, il y a aussi un programme de cuisine adaptée aux problèmes des personnes plus âgées comme le diabète ou le cholestérol".
À cette liste, s'ajoute aussi l'atelier tricot qui a rencontré un vif succès. Nicolas lui participait souvent aux ateliers dessins et à l’art-thérapie. Des ateliers mis en pause à cause du confinement.
Dans les autres prisons ?
Il existe également un pavillon pour les détenus âgés à la prison de Meksplas à Anvers. Trois nouveaux pavillons devraient également bientôt sortir de terre. Les travaux sont prévus pour fin 2022, début 2023. Une centaine de détenus pourra y être installée.
Permettre aux détenus âgés d’être rassemblés dans une aile, cela apporte plus de sérénité et cela permet aussi d’éviter des situations délicates. Véronique Van der Avoort, directrice de la prison de Saint-Hubert : "S’ils étaient au contact de détenus plus jeunes, ils pourraient être des proies faciles en termes de racket".
Un constat partagé, mais nuancé par Gaëtan de Dorlodot, le directeur médical des prisons bruxelloises où la grande majorité de la population carcérale a entre 25 et 35 ans. "On voit des patients âgés qui sont la cible des plus jeunes qui essaient de profiter de ces patients. On voit aussi des jeunes qui prennent des plus âgés sous leur aile", constate-t-il.
Pour le docteur de Dorlodot qui exerce dans les prisons de Saint-Gilles, Forest et Berkendael, une chose est sûre : "ces vieilles prisons ne sont pas adaptées aux détenus âgés qui présentent des pathologies diverses : besoin de soins parfois quotidiens, besoin d’aide pour l’habillage, problèmes cognitifs…".
Avec un chiffre en augmentation depuis près de 10 ans, les détenus âgés sont de plus en plus présents en prison. Ils représentent 4% de la population carcérale belge.