Prématurité : l’implication des parents dans les soins au bébé est essentielle

L’univers de la néonatologie est un monde à part, explique Laetitia Van Der Elst, à l’origine, avec Michel Collart, de Noah’s Ark Belgium, une association qui travaille sur la prématurité et vient en aide aux parents de bébés prématurés.

"Quand on arrive dans cet univers totalement inconnu, on ne se retrouve pas directement dans une posture de parents, parce qu’on doit demander pour tout, pour toucher son enfant, savoir comment l’approcher, etc. On se retrouve donc dans une place d’enfant aussi. C’est très confrontant, surtout dans les premiers moments."

Le personnel soignant fait son maximum pour que le lieu soit le plus apaisant possible, malgré les machines, les bruits, les multiples soins…

C’est un domaine qui est d’ailleurs particulièrement en développement pour le moment, confirme le professeur Olivier Danhaive, chef du service de néonatologie aux Cliniques universitaires Saint-Luc et professeur de pédiatrie à l’UCLouvain.

C’est comment apprivoiser la technologie pour qu’elle nous serve le mieux possible, en étant la moins agressive et interférente possible.

Le Nidcap est né d’une approche appelée soins de développement, un ensemble de techniques environnementales, comportementales mises en place pour soutenir le développement du bébé prématuré. Cela concerne notamment l’adaptation de la lumière, la diminution du bruit, le positionnement du bébé, le peau à peau, etc., explique Delphine Druart, responsable du Centre de Formation Nidcap Bruxelles.

En se basant sur l’observation du bébé, et en collaboration avec les parents, le programme Nidcap met en place ces techniques de manière individualisée, selon ce qui fonctionne bien pour le bébé. Car le développement cérébral d’un bébé prématuré n’est pas prêt à faire face à toutes ces stimulations, comme le serait celui d’un bébé né à terme. En adaptant les stimulations, il est possible de soutenir le développement neurosensoriel du bébé, pour améliorer son devenir à long terme.

C’est vraiment un bon média pour aider les parents à comprendre le bébé, à comprendre ce qu’il dit, parce qu’un bébé prématuré ne réagit pas comme un bébé né à terme. Sa première voie de communication, c’est son comportement.

La méthode Nidcap intègre bien sûr la méthode peau à peau et la méthode kangourou.

Aujourd’hui, le peau à peau se pratique partout en néonatologie, ce qui est très bien, explique Delphine Druart, mais on n’est pas encore partout dans de vrais programmes de Kangourou Mother Care, c’est-à-dire un maximum de peau à peau sur toute la journée, avec les parents, voire déjà du peau à peau immédiat à la naissance. La mise en place n’est pas simple.

La réflexion est largement en marche, confirme le professeur Olivier Danhaive. Saint-Luc a par exemple créé une unité de soins intensifs néonataux, avec 7 chambres parents-enfant individuelles, où peuvent se faire le peau à peau, l’allaitement, mais aussi les soins intensifs dont les bébés peuvent avoir besoin : monitoring du cerveau, respiration artificielle…

"C’est un pas énorme parce que ça nous permet de maintenir la sécurité du bébé, tout en apportant cette bulle qui permet de se dédier individuellement à un bébé, avec sa chambre, ses parents, son environnement."

Pour Delphine Druart, outre l’aspect infrastructure, le plus gros du travail va être de changer les mentalités, au niveau des soignants mais aussi de la sécurité sociale, pour une prise en charge économique des familles pendant leur séjour en néonat et après.

Plutôt que de dire aux parents "vous êtes les bienvenus 24h sur 24", il vaut mieux dire "l’unité est ouverte 24h sur 24, on prend en charge votre bébé sur le plan médical et technique, mais on ne pourra le faire qu’avec vous". Ce discours permet un autre regard et cela fonctionne : les parents sont là.

Plus le parent va être soignant de son bébé, mieux le bébé va se développer, mieux l’attachement va se faire.

L’implication des parents dans les soins est essentielle. La gravité des soins ne doit pas être une barrière psychologique pour les parents. L’urgence médicale doit être derrière, en coulisses.

"Il ne faut pas infantiliser les parents, mais au contraire les prendre par la main dans la réalité de leur bébé et leur dire qu’ils peuvent faire partie de cette réalité, car c’est bénéfique. Votre bébé ne sera jamais aussi bien, aussi tranquille qu’avec vous. Et ça, je crois que c’est très puissant pour les parents."

Pour Michel Collart, cofondateur de Noah’s Ark Belgium, il faut lutter en amont contre ce tabou de la prématurité, car elle concerne quand même 10% des naissances.

C’est pourquoi Noah’s Ark Belgium prend contact avec des associations de sages-femmes et de gynécologues, dans le but de mettre en place des programmes légers de préparation à cette éventualité de prématurité. Un financement de la part des pouvoirs publics est espéré.

L’association propose également Prematel, une plateforme destinée aux parents de prématurés, avec pour la première fois un numéro d’aide gratuit et disponible 7 jours/7 : 0800 820 80. Et les bénévoles sont les bienvenus !

► Ecoutez toutes ces interventions dans le podcast ci-dessus