Pierre Verjans, politologue à l’Université de Liège, expliquait ce dimanche matin dans Week-End Première dans quelles circonstances le vote est devenu obligatoire en Belgique et l’est resté jusqu’à présent contrairement à la plupart des pays voisins.
Tout part de la révision de 1893 qui élargit le droit de vote suite aux pressions des mouvements ouvriers. D’un coup, on passe au suffrage universel tempéré par le vote plural pour les hommes de 25 ans et plus. Cela veut dire que tout-à-coup, on est passé de 2% de la population qui votait, à 22 %. C’était un accroissement considérable.
Les catholiques ont imposé le vote obligatoire en 1893
Selon Pierre Verjans, le vote obligatoire est introduit à ce moment-là parce que les catholiques dans la majorité, craignaient que les électeurs modérés n’aillent pas voter. En gros, ils redoutaient une sur-représentation des votes ouvriers et anarchistes.
Le vote obligatoire s’est élargi à toute une série d’autres pays d’Europe occidentale jusque dans les années 60. A partir de là, l’obligation de vote a été abandonnée par la plupart des pays sauf en Belgique.
En Belgique, ne pas voter reste punissable par la loi. Dans les années 70, le Parquet a poursuivi certaines personnes qui s’étaient illustrées pour refuser d’aller voter. Aujourd’hui, rare sont les cas de poursuite car le parquet aurait trop de dossiers à gérer. Par contre, nous explique Pierre Verjans, "La poursuite des assesseurs qui refusent d’exercer leur droit civique sera toujours effective". Le procureur général Christian de Valkeneer a décidé de fixer une sanction unique de 250 euros pour les personnes qui se dérobent à leurs obligations d’assesseurs.
Des sondages interpellants
Selon certains sondages, 38% de Bruxellois ne voteraient pas s’ils n’en avaient pas l’obligation. 51% du côté wallon.
A la lecture de ce sondage, Pierre Verjans analyse : "Cela correspond à un rejet de la politique déjà observé dans tous les pays voisins. Parallèlement, des partis extrémistes émettent un discours doctrinal violent et peu structuré tandis que les électeurs sont moins attirés par une réflexion politique. Par ailleurs, en Belgique, la dispersion des pouvoirs donne l’impression aux citoyens que quoiqu’ils fassent leur vote ne sera pas pris en compte puisque la majorité flamande pèse sur le système politique".