Pourquoi le Japon est-il touché de plein fouet par une crise de natalité ?

De moins en moins d’enfants voient le jour au Japon.

© AFP

Par Théo Defranne

Au Japon, une autre crise côtoie celle du coronavirus, c’est celle de la natalité. En 2019, seuls 864.000 enfants sont nés dans ce pays peuplé de 126 millions d’habitants. Il s’agit du taux de natalité le plus bas enregistré depuis 1899 et le début des statistiques tenues par le gouvernement.

Les autorités nipponnes prennent aujourd’hui ce problème à bras-le-corps. Fécondation in vitro gratuite, frais de crèche offerts, qu’envisage le Japon pour faire remonter la courbe de naissances ?

Diminution de la population

Au pays du soleil levant, chaque femme a en moyenne 1,43 enfant. Or pour atteindre le seuil de renouvellement des générations, il faut que ce chiffre soit de 2,1 enfants par femme.

Si dans l’immédiat, cela pourrait paraître anecdotique d’avoir moins de naissances, c’est pour le futur que le Japon s’inquiète. À côté de ce faible taux de natalité, le pays à connu un record de décès en 2019. Ce sont 1.376.000 décès qui ont été recensés, soit une balance démographique déficitaire de 512.000 personnes.

Cette donnée liée aux décès est quant à elle plutôt logique dans ce pays qui compte la population la plus vieillissante au monde. Les personnes âgées de plus de 65 ans au Japon représentant 28,38% de la population et pourraient atteindre 40% de la population en 2065. Un gouffre pour l’économie par rapport au coût des pensions.​​

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Pourquoi les Japonais ne font pas d’enfants ?

C’est une question qu’il est légitime de se poser. Pour pouvoir y répondre, il faut aller chercher dans l’histoire et la culture nipponne.

Au Japon, à la naissance d’un enfant, on prône l’allaitement. Dans ce pays, il est tout à fait normal d’allaiter un enfant dans les cafés et restaurants, dans la rue,… Et si en Belgique les mères le font en moyenne jusqu’au troisième mois de l’enfant, la tradition veut qu’au Japon, on allaite jusqu’au premier anniversaire de l’enfant.

Cette tâche demande d’être constamment présent avec l’enfant pour assurer ce besoin. La mère reste donc à la maison pendant une année pour allaiter son bébé. Si celle-ci avait un emploi et que son contrat de travail ne prévoyait aucune disposition particulière en cas de grossesse, cette femme n’aura perçu ni allocations prénatales, ni congés de maternité. Face à cette contrainte économique, les Japonaises hésitent de plus en plus à devenir mère.

Les Japonaises allaitent une année complète et arrêtent donc de travailler.
Les Japonaises allaitent une année complète et arrêtent donc de travailler. © AFP

Autre problème, la vie au Japon coûte extrêmement cher. De nombreux habitants estiment donc que faire un enfant est trop difficile à supporter financièrement. Une autre explication est liée au taux de célibat très important, 65% pour les 18-34 ans par exemple.

En outre, les naissances hors mariage restent mal vues. Or, de moins en moins de Japonais s’unissent, pour le meilleur comme pour le pire.

Des fécondations in vitro offertes

Actuellement le coût d’une fécondation in vitro est très élevé au Japon. Les prix diffèrent en fonction des hôpitaux mais sont en moyenne de 2 millions de yens, soit 19.000 euros.

Afin de rendre cette pratique accessible à tout un chacun, Yoshihide Suda, le Premier ministre nippon a annoncé "que les traitements contre l’infertilité ainsi que la fécondation in vitro, souvent coûteux, seront pris en charge par l’assurance maladie nationale." Les responsables gouvernementaux envisagent ce changement dès 2022.

Mais selon certains experts cette mesure ne devrait pas suffire à stimuler le taux de natalité du pays à un moment où il est soumis à une nouvelle pression, car la pandémie de coronavirus assombrit les perspectives économiques des personnes en âge de travailler.

En plus de la gratuité de ces soins, le gouvernement compte ouvrir des dizaines de crèches supplémentaires et les rendre gratuites. Actuellement, les Japonais devaient réserver une place dans ces jardins d’enfants plus de deux ans à l’avance.

Le combat pour la pilule du lendemain

Si le gouvernement fait tout pour que les Japonaises donnent naissance, ces dernières mènent un combat diamétralement opposé, celui de l’accès à la pilule du lendemain.

Dans ce pays, le seul moyen pour obtenir cette contraception est d’aller dans un cabinet gynécologique ou aux urgences hospitalières. Un processus très coûteux (près de 150 euros non remboursés), très compliqué et surtout très indiscret. Les femmes doivent y donner nom, âge, adresse et surtout faire un récit complet expliquant pourquoi elles désirent prendre cette pilule.

En cette période de confinement où les rapports sexuels désirés ou non se font de plus en plus fréquents, ces femmes réclament un accès plus aisé à la pilule du lendemain.

Le gouvernement compte étudier cette demande, mais la vente se ferait désormais en pharmacie. Les femmes devraient par ailleurs avaler la pilule sur place.

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