Alors que le boson BEH (pour boson Brout-Englert-Higgs, du nom de ses trois théoriciens, plus couramment appelé boson de Higgs) a été baptisé et théorisé en 1964. Il aura donc fallu près de 50 ans pour le débusquer.
On vient donc, au bout d'un demi-siècle, de tout bonnement valider (avec une certitude de 99,9999%) une théorie qui fait du boson BEH le véritable chaînon manquant, la clef de voûte de la structure fondamentale de la matière, ni plus, ni moins, de la particule qui donne leur masse à d'autres particules élémentaires.
Pour expliquer simplement les enjeux liés à la recherche sur le boson BEH, rappelons que les scientifiques considèrent que le "vide" est un medium. Il y a en fait un "champ" dans le vide: le champ de Higgs. Certaines particules interagissent avec ce champ et d’autres pas.
Celles qui interagissent avec ce champ ont une masse, les autres sont des particules dépourvues de masse.
Tout cela ne vous paraît pas encore très compréhensible ? Le physicien britannique John Ellis a trouvé une manière simple de l’expliquer.
Voyons l’Univers comme un champ de neige…
L’image qu’utilise John Ellis pour pouvoir comprendre ce qu’est le boson de Higgs est la suivante : "Imaginons que tout l’univers est rempli d’un champ de neige parfaitement identique en tout point de l’univers". Le boson de Higgs serait le flocon qui compose ce champ de neige.
Avec des skis, vous traversez le champ de Higgs très rapidement. Telle une particule qui n’a pas de masse et se propage à la vitesse de la lumière comme un photon.
Le photon n’interagit pas avec le champ de Higgs, il n’a donc pas de masse.
Si l’on se déplace sur le champ de neige avec des raquettes, on s’enfonce légèrement dans la neige, on se déplace plus lentement qu’un skieur. C’est comme une particule qui interagit avec le champ de Higgs et acquiert une masse et va dès lors plus lentement que les particules qui se déplacent "à ski", autrement dit, celles qui n’ont pas de masse.
Enfin, avec de simples chaussures, on s’enfonce beaucoup plus profondément dans le champ de neige donc on interagit beaucoup avec ce champ et dès lors on acquiert une masse plus importante. On se déplace en conséquence encore plus lentement que les particules en raquettes et a fortiori que celles en ski.
Que vient faire le boson de Higgs dans cette histoire ?
Si un champ de neige est composé de flocons et bien les flocons qui composent le champ de Higgs, ce "champ de neige universel", c’est cela le boson de Higgs. Il s’agit donc d’une particule élémentaire qui compose le champ de Higgs dont l’interaction avec les autres particules détermine la masse.
Une autre image pourrait être celle d’objets sans masse qui traversent un champ de boue. Certains accumulent plus ou moins de boue, acquérant plus ou moins de masse et devenant dès lors plus ou moins rapides. Par contre certaines particules "glissent" à travers la boue et ont donc une vitesse élevée tout en n’accumulant aucune masse.
Dans ce schéma, le boson de Higgs serait la particule élémentaire qui compose la boue.
Comment fait-on pour traquer le boson de Higgs?
Comme l’explique John Ellis, pour débusquer les bosons de Higgs, pour faire sortir des flocons du champ de neige, il faut faire réagir ce champ, "l’exciter".
Au CERN (centre européen pour la recherche nucléaire), près de Genève, c’est donc ce que l’on s’attèle à faire. On utilise pour cela un "collisionneur". Le LHC (pour Large Hadron Collider) est alors mis à contribution pour créer des collisions extrêmement violentes entre protons, à des vitesses proches de celle de la lumière.
Ce faisant, on "excite" le champ de neige ou de boue, afin de faire sortir le boson. Mais celui-ci est extrêmement instable, dès lors non seulement ses apparitions sont très rares mais en plus, il disparaît presque immédiatement et se désintègre.
Il faut donc analyser scrupuleusement les scènes de collision afin de tenter de débusquer le boson de Higgs. Or c’est bien cette traque si compliquée que les scientifiques du CERN ont annoncé avoir réussie en juillet 2012. Marquant ainsi une étape-clé dans l'histoire de la science.
Julien Vlassenbroek