Après l’Europe, Google fait désormais l’objet d’une plainte pour abus de position dominante par les autorités américaines qui ont déclenché la principale action judiciaire depuis près de 20 ans contre l’un des piliers technologiques du pays.
Pour Nicolas Van Zeebroeck, professeur en Technologie et Innovation à la Solvay Business School, cette plainte n’arrive pas par hasard. "Depuis quelques mois, la classe politique américaine a pris le problème de la domination des GAFA (Google, Amazon, Facebook, Amazon) à bras-le-corps et a décidé d’intervenir. C’était assez attendu et cela ressemble à l’affaire Microsoft où l’Europe avait dégainé la première avant d’être suivie outre-Atlantique."
La plainte accuse Google de forcer les consommateurs et les annonceurs à utiliser son moteur de recherche sur des appareils mobiles qui utilisent le système d’exploitation Android via des applications qu’il est impossible d’effacer, ce qui restreint considérablement la concurrence.
Précédent européen
L’Europe a déjà condamné plusieurs fois Google pour des raisons similaires. En tout, l’ensemble des amendes dépasse les 9 milliards de dollars. Mais même si le moteur de recherche a déjà été sévèrement sanctionné en Europe, le moteur de recherche reste incontournable.
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Côté américain, l’action entamée par le département américain de la Justice vise un point précis. "L’angle d’attaque est en fait très similaire à celui qui a été retenu à charge contre Microsoft", souligne Nicolas Van Zeebroeck. La justice reproche à Google d’utiliser sa position de moteur de recherche par défaut pour asseoir sa position de numéro 1. "C’est exactement ce qu’on a reproché à Microsoft à l’époque quand l’entreprise imposait aux constructeurs d’ordinateurs son navigateur Internet Explorer comme navigateur par défaut."
Tête de gondole
En agissant de la sorte, Google se place en position de force, un peu comme une marque qui paie un montant à un supermarché pour pouvoir placer ses produits en tête de gondole ou en bonne place dans les rayons pour se placer stratégiquement. "Dans la grande distribution, ce genre de pratique est courante, précise Nicolas Van Zeebroek. Mais ici, ce n’est pas juste que Google se place un peu mieux que les autres pour être plus visible. Google prend toute la place parce qu’il apparaît systématiquement comme moteur de recherche par défaut dans pratiquement tous les navigateurs. Et donc, il est impossible de ne pas passer par Google."
Google sait ce que le consommateur aime et à quoi il répond favorablement quand on lui propose des choix. C’est ce qui le rend très efficace aux yeux de ses utilisateurs.
Les alternatives à Google existent pourtant, mais peinent véritablement à exister notamment parce que c’est très difficile d’être visible sur ce marché. "Google est présent quand vous achetez un téléphone portable et c’est très difficile de se dire après que vous allez trouver autre chose et le configurer vous-même", indique le professeur à la Solvay Business School. À cela s’ajoute le fait que Google se vante de proposer le moteur de recherche le plus efficace. "Il sait ce que le consommateur aime et à quoi il répond favorablement quand on lui propose des choix", constate Nicolas Van Zeebroeck. "Il peut donc affiner ses résultats et ses algorithmes. C’est ce qui le rend très efficace aux yeux de ses utilisateurs."