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“Normal” : la websérie qui rappelle l’urgence d’une meilleure prise en charge de la santé mentale

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La santé mentale des jeunes adultes s’est considérablement dégradée au cours de ces dernières années en Belgique comme ailleurs dans le monde : c’est ce qui ressort de nombreuses études sorties en 2021. L’occasion de relancer les débats sur la prise en charge psychiatrique. C’est précisément ce qu’aborde cette série documentaire proposée par Tipik au travers de différents portraits. "Normal" pointe ainsi du doigt ce que l’OMS a maintes fois répété : les manquements des hôpitaux et le poids de la stigmatisation font partie des causes aggravantes de la santé mentale.

Et ce lundi 10 octobre à 22h45 sur Tipik et Auvio, retrouvez l'un des épisodes de "Normal" et découvrez l'histoire bouleversante d'Arthur. Il a 24 ans, est étudiant et se bat contre des états dépressifs depuis huit ans...

"Un jeune sur deux souffre de dépression et d’anxiété". En janvier 2021, l’Organisation internationale du travail a alerté sur la dégradation de la santé mentale des jeunes, particulièrement touchés par la crise sanitaire et le climat anxiogène qui en a émané. En Belgique, à l’occasion de la journée internationale de sensibilisation à la santé mentale (qui a lieu tous les 10 octobre)  l’UCLouvain et l’ULB dévoilaient également les résultats de leur étude sur l’impact déplorable de la crise sanitaire sur le bien-être des étudiants.

La pandémie a été l’occasion pour les spécialistes de (re-re-) resouligner le manque d’investissement dans les programmes de santé mentale et de repenser son mode de soin. Rien de nouveau sous la pluie : en 2018, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) dénonçait déjà les investissements dérisoires des pays dans la prise en charge des personnes souffrant de troubles de la santé mentale.

Dans la série documentaire Tipik, " Normal ", réalisée par Benoît Do Quang et Pablo Crutzen Diaz, les témoignages de jeunes adultes atteints de trouble de la santé nous renvoient comme en écho la nécessité de faire bouger les lignes.

« Parfois, j’ai juste besoin que quelqu’un me tienne »

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La websérie documentaire offre six portraits à la première personne. 6 récits intimes pour  " un autre regard sur la santé mentale ". Les réalisateurs arrachent volontiers l’étiquette de malade pour ne garder que le récit humain et personnel des jeunes qui témoignent : "Dans notre série on se rend compte que le diagnostic n’est vraiment pas important. Ce qui rassemble la plupart des interviewés, ce sont leurs vécus, qui peuvent parfois être très similaires les uns des autres ", expliquent les réalisateurs. 

Pablo Crutzen souligne notamment que la plupart des témoignages ont mis en lumière le manque de ressources pour des soins adaptés, la nécessité de mettre en place des suivis plus personnalisés. " On a été assez choqués lors de nos interviews parce que, soit les personnes avaient été à l’hôpital et avaient vécu une très mauvaise expérience, soit ils ne voulaient pas y aller par peur d’être avec des gens qui étaient aussi mal qu’eux " dit-il .

Dans le premier épisode de la série, Frank resasse son expérience difficile en asile. Atteint d’anorexie mentale, il y aura attendu des mois avant de pouvoir être pris en charge dans un centre spécialisé pour les personnes atteintes de troubles alimentaires puis des années avant d’obtenir un diagnostic reliant son anorexie a une expérience traumatisante de son enfance. 

Lula (épisode 6) parle également d’une hospitalisation " traumatisante ". Florine (épisode 3) a déjà passé des heures attachée dans un lit : " Une fois, j’ai passé 30 heures en isolement et en contention ". 

D’après l’OMS, les atteintes coercitives en hôpital psychiatrique sont encore légion. Or, l’Organisation recommande clairement de dispenser des soins de santé mentale communautaires qui soient respectueux des droits humains et centrés sur le rétablissement du patient .  

Après avoir vécu 14 ans d’hospitalisation, Florine a rejoint récemment une résidence spécialisée pour les personnes qui ont décidé de quitter la psychiatrie. Son témoignage en dit long sur la nécessité de prendre des mesures : " Parfois, j’ai juste besoin que quelqu’un me tienne. " 

Aujourd’hui, elle salue l’impact positif de ce documentaire qui permet de sensibiliser la communauté. Elle travaille désormais comme représentante des usagers dans le cadre de la réforme 107. En Belgique, depuis 2010 la réforme de l’article 107 de la loi relative aux hôpitaux et à d’autres établissements de soins permet de rassembler un réseau de professionnels afin d’obtenir de meilleurs circuits de prise en charge et réinvestir les moyens alloués aux lits psychiatriques dans des projets qui visent à améliorer les soins de santé mentale.  

Une médication adaptée et un accompagnement psychiatrique, bien qu’indispensables dans certains cas, ne suffisent parfois pas à accompagner les personnes en difficulté sur le chemin de la guérison. La compassion, l’intégration sociale, la bienveillance, sont également des outils d’aide indispensables face à la problématique psychiatrique. 

Je suis normal.e , tu es normal.e, iels sont normales.aux

Dans l’épisode 4 , Marc évoque l’urgente nécessité d’apprendre à être empathique envers les plus vulnérables : " Il faut apprendre à se tolérer. Ne pas juger au premier regard. Ça les aiderait à se sentir mieux si on arrêtait de les voir comme les malades ". 

" Au lieu de traiter les personnes souffrant de problèmes de santé mentale avec la compassion que nous éprouverions face à une personne ayant une blessure corporelle ou une maladie physique, nous les ostracisons, nous les accusons et nous les condamnons. " Dans son article, l’OMS en appelle donc à une action collective : adapter les méthodes de soins, mais aussi œuvrer collectivement pour venir en aide aux personnes en détresse, en limitant la stigmatisation, en balayant les idées fausses et en apprenant à mieux soutenir tout simplement. C’est aussi le message que la série Normal nous invite à retenir. 

Les deux réalisateurs du documentaire ont tout de suite saisi l’importance d’une approche bienveillante de la santé mentale. Ils ont eux-mêmes eu des amis atteints de trouble de la santé mentale et c’est d’ailleurs, entre autres, pour cela qu’ils ont répondu à l’appel à projet lancé par la RTBF : " Nos amis auraient bénéficié d’un environnement plus averti " disent-ils .

Normalité ou pas, tout le monde peut un jour perdre pied, ou avoir un proche qui perdrait pied. " Personne n’est à l’abri de se retrouver en crise ", conclu Pablo. " Le titre, Normal, c’est notre contrepied. Tous ces témoignages peuvent trouver une résonnance. Si ce n’est pas en nous, ce sera en nos proches ". 

" Santé mentale et lien social " : cette année, c’était aussi le thème choisi pour la semaine de la santé mentale en Wallonie. Et si notre capacité à tisser des liens pouvait nous aider à nous sortir de nos situations de crises ? 

Normal est à découvrir sur RTBF AUVIO dans la rubrique TIPIK et sur le YouTube de TIPIK. La websérie est une co-production de Wrong Men production, Gable'o'Matic, et la RTBF.  

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