Comment expliquer cette diminution de la production nucléaire en France en 2022 ?
RTE distingue trois principales raisons dans son dernier rapport publié le 14 septembre et intitulé Perspectives pour le système électrique pour l’automne et l’hiver 2022-2023.
La première explication est relative au fait que "le parc nucléaire fait actuellement l’objet de travaux de grande ampleur dans le cadre du 'grand carénage'". Il s’agit des travaux de maintenance opérés tous les dix ans de certains réacteurs, appelés aussi visites décennales, mais aussi de "changement de composants dans le cadre du retour d’expérience post-Fukushima", peut-on lire dans le rapport de RTE.
Pour les réacteurs les plus âgés, ces quatrièmes visites décennales sont plus longues qu’auparavant, "désormais les travaux durent plus de six mois", précise Martin Denoun.
A cette première explication s’ajoute l’impact de la crise sanitaire sur le calendrier de ces travaux de maintenance. Celui-ci a été "durablement perturbé, en particulier lors du premier confinement [conduisant] à des adaptations de plannings et au report de certains travaux" toujours selon RTE.
La corrosion sous contrainte constitue aujourd’hui le principal facteur explicatif de la faible disponibilité du nucléaire.
Rapport RTE, 14 septembre 2022
Enfin et surtout, la troisième explication à la baisse de la production électrique nucléaire est largement liée à la détection d’anomalies de corrosion sous contrainte (CSC) sur "les réacteurs les plus puissants du parc français, ceux qui ont été adaptés ou 'francisés' par EDF pour accroître leur rendement", explique ainsi Martin Denoun.
Comme l’écrivent les auteurs du rapport de RTE, ces anomalies ont entraîné "la mise à l’arrêt préventive de plusieurs réacteurs (notamment des quatre réacteurs du palier N4 à Civaux et Chooz, les plus récents du parc), la définition d’un programme de contrôle sur l’ensemble des réacteurs du parc, et des travaux de réparation sur les réacteurs. La corrosion sous contrainte constitue aujourd’hui le principal facteur explicatif de la faible disponibilité du nucléaire".
De façon plus marginale, les conditions météorologiques ont également contribué à limiter la production d’électricité via le nucléaire en France. La sécheresse ou les vagues de chaleur de l’été 2022 ont ainsi provoqué un déficit de près de 2 GigaWatt (GW), selon les chiffres de RTE.
In fine, contrairement à ce qu’affirme la ministre Zakia Khattabi, la France est bien en déficit de production nucléaire. En juillet et août 2022, Thomas Veyrenc, directeur exécutif de RTE en charge de la stratégie, de la prospective et de l’évaluation, indique lors de la présentation du rapport à la presse, qu’il a manqué entre 15 et 20 GW de disponibilité nucléaire par rapport aux sorties d’été de la décennie 2010-2019.