Justice

"Non, il n’y a pas d’omerta", réagit le recteur de l’UCLouvain sur les affaires de sexisme

Par Marie-Laure Mathot avec François Heureux

Une nouvelle vague #Metoo dans les universités, c’est un mouvement qui a débuté en Flandre dans trois institutions académiques, avec des témoignages accablants de comportements sexistes et de harcèlement sexuel commis la plupart du temps par des professeurs sur des étudiantes.

Le mouvement fait aujourd’hui tache d’huile côté francophone. À l’UCLouvain, le climatologue Jean-Pascal van Ypersele a dénoncé des abus de collègues et l’inertie de l’université. Une soixantaine d’étudiants et de membres académiques ont manifesté ce mardi sur le site de l’UCLouvain. Ils dénoncent des faits et l’absence de réaction des autorités de l’université.

"Non, il n’y a pas d’étouffement, il n’y a pas d’omerta", réagit Vincent Blondel, recteur à l’UCLouvain dans les studios de la Première ce jeudi matin. "Il y a un effort extrêmement important dans le chef de l’université ces dernières années, à la fois en politique de genre depuis de nombreuses années et également sur le traitement des situations de harcèlement."

Il cite les différentes réactions qu’a eues l’université. "Il y a différentes gradations dans les sanctions." La plus forte d’entre elles, c’est le licenciement ou l’exclusion. "Pour ce qui est du personnel, de mémoire, sur les dernières années, je dirais qu’il y a eu deux licenciements dans le corps académique. Et il y a aussi des étudiants qui se font exclure de l’université, et exclure de l’ensemble des universités en Fédération Wallonie-Bruxelles, à partir du moment où ils sont condamnés suite à une instruction disciplinaire relative aux faits qui sont relatés."

Le recteur dément donc l’absence de réaction quand un fait est porté à leur connaissance. "Il y a la détermination absolue de l’université de dénoncer ces situations et de s’assurer qu’il y a une tolérance zéro pour les faits de harcèlement." Il pointe aussi la politique générale d’information et de sensibilisation sur les questions de genre menée par l’UCLouvain.

Une cellule pour les victimes

"Nous avons mis en place une cellule Together, qui reçoit par exemple tous les témoignages des étudiants. C’est une vingtaine de témoignages qui sont rapportés à cette cellule sur les deux dernières années, sans pour autant qu’ils fassent l’objet d’une instruction de plainte."

Le recteur invite à déposer plainte en tant que victime ou en tant que témoin. Mais il est compliqué pour les victimes de déposer plainte quand il y a un lien hiérarchique ou de subordination entre une étudiante et un prof qui doit la coter.

"C’est la raison pour laquelle on a mis en place une série de personnes de confiance à travers toute l’université, qui sont des personnes qui sont indépendantes, qui sont tenues par le secret, qui peuvent partager, qui peuvent informer, qui peuvent recevoir, sans pour autant que le fait d’aller les consulter nécessite d’introduire une plainte."

Un professeur accusé, toujours en fonction

Plainte à signaler en interne mais également en externe, auprès de la police, pour que la justice s’empare de l’affaire. "Nous n’avons pas en interne à l’université des pouvoirs d’investigation qui sont ceux de la justice. Je ne peux pas saisir un GSM ou un ordinateur pour voir quelles sont les communications qui ont eu lieu. Je ne peux pas convoquer une personne extérieure à l’université. Je ne peux pas exiger des examens médicaux. Ce sont des choses qui peuvent être faites par la justice."

Une instruction judiciaire est d’ailleurs en cours en ce moment : un doyen aurait embrassé une femme de force dans un couloir de l’université. Elle aurait quitté l’UCLouvain parce qu’elle ne s’est pas sentie écoutée. C’est donc la victime présumée qui fait un pas de côté plutôt que l’agresseur présumé.

Un cas que le recteur connaît. "Nous serons extrêmement attentifs à l’issue et aux processus de cette situation. Mais je ne vais pas me substituer à la justice."

En attendant, le professeur exerce toujours au sein de l’université. "Nous n’allons pas condamner quelqu’un qui, éventuellement, se révélerait ultérieurement totalement blanchi", conclut le recteur.

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