Fin 2017, Newcastle quittait la Premier League pour la deuxième fois de la décennie. L’équipe mythique des années 90, portée par un certain Philippe Albert, a lentement glissé au début du siècle. Jusqu’à l’arrivée, en octobre 2021, de l’Arabie saoudite. Le royaume du Golfe a pris les commandes du club, non sans protestation, pour dépoussiérer l’armoire à trophée de l’une des équipes les plus populaires du nord de l’Angleterre. Avec une troisième place alors que pointe la mi-championnat, Newcastle bouscule le Big Six. Auquel il estime désormais pouvoir appartenir.
Eddie Howe
Lorsqu’il prend les commandes de Newcastle United, Eddie Howe récupère une équipe à la croisée des chemins. Les Magpies sont englués au fond de la Premier League mais viennent de signer un accord monstrueux avec l’Arabie Saoudite, via le Public Fund Investment, le bras financier de la famille royale saoudienne. Un fonds doté de 620 milliards (!) d’euros, qui a la volonté de s’introduire sur le marché du football, au même titre que ses voisins rivaux du Qatar (via le PSG) ou des Emirats Arabes Unis (Manchester City). Les ambitions du pétromonarque saoudien sont sans limite et lorgnent de grands noms du football : Ousmane Dembélé, Eden Hazard, Cristiano Ronaldo sont tous cités pour rejoindre la ville brumeuse du nord-est de l’Angleterre. Mais une levée de boucliers venue de la League empêche la présidence saoudienne de se déployer de manière irraisonnée sur le marché. Malgré des contrats généreux à offrir, Newcastle se trouve incapable d’attirer des têtes d’affiche, et son avant-dernière place au classement n’arrange rien. Bruno Guimaraes, Chris Wood et Kieran Trippier sont les premiers renforts de l’opération sauvetage.
Un pressing audacieux et une défense de fer
Une opération brillamment réussie par Eddie Howe qui confirme à nouveau ses facultés tactiques hors norme. Réputé pour faire progresser des équipes du bas de tableau (Bournemouth, Burnley), il redonne la confiance aux Magpies en leur intimant d’aller chercher le ballon dans le camp adverse. D’une équipe moribonde et repliée devant son rectangle, Howe transforme ses joueurs en bêtes du pressing haut. L’équipe prend confiance alors que les résultats reviennent. Les Magpies sont sauvés et continuent sur leur lancée. Cette saison, l’équipe devient celle qui récupère le plus souvent le ballon dans le dernier tiers adverse. A l’ère du Manchester City de Pep Guardiola et du ravissant football de Mikel Arteta à Arsenal, une statistique pareille est loin d’être anodine. Certains talents insoupçonnés se révèlent, comme Miguel Almiron. Le Paraguayen, anonyme milieu de la MLS jusqu’en 2019, est même devenu le joueur du mois de la Premier League au mois d’octobre, à la suite d’une série de sept buts en sept rencontres. Offensivement, une exécution chirurgicale des phases arrêtées les rend difficilement jouables, d’autant qu’ils demeurent imprenables derrière en faisant de St. James' Park la première forteresse d’Angleterre. En seize rencontres, ils n’ont concédé que onze buts.
Guardiola commence à s’en méfier
Pas question de dénaturer un processus en marche : cette saison, Newcastle évite de succomber aux transferts bling-bling. Mis à part Alexander Isak, le géant suédois arrivé pour 70M€ qui n’a connu que l’infirmerie jusqu’ici, le board réalise une campagne de transferts cohérente. Un gardien (Nick Pope), un patron en défense (Sven Botman) et… c’est à peu près tout. Le club semble éviter la crise de croissance qui guette tout nouveau riche dans cet écosystème si particulier qu’est le football. Il parvient à se frayer un chemin sur le podium de la Premier League à l’arrivée du Boxing Day. Pep Guardiola, qui côtoie cet invité surprise dans les hauteurs du classement, commence à se méfier. "Pour moi, ils sont candidats au titre. Ils ont un avantage que personne n’a : ils peuvent se concentrer à 100% sur la compétition nationale. Ils ne doivent pas voyager aux quatre coins de l’Europe et, toute cette énergie que l’on dépense en Europe, ils la gardent pour se reposer". L’Angleterre se souvient qu’en 2016, une équipe qui ne disputait pas l’Europe avait outrepassé son statut de révélation pour offrir l’une des performances les plus improbables de l’histoire du championnat. Newcastle peut-il être le nouveau Leicester ?