Sous le nom de "François l’Embrouille", François Damiens a signé un nombre impressionnant de sketches mémorables en caméra cachée. Aujourd’hui, il passe à la vitesse supérieure en réalisant un long-métrage, "Mon ket", basé sur cette technique. Et le résultat est ébouriffant.
"Mon ket", c’est l’histoire de Dany Versavel, un truand pas très malin mais très fier-à-bras qui organise son évasion dans un but précis : retrouver son gamin de douze ans qu’il n’a presque pas connu. En cavale, Dany veut rattraper le temps perdu : créer une complicité – de gré ou de force – avec son fils, gagner vite beaucoup d’argent, changer de tête... Au fil de ses pérégrinations et de ses projets, Dany fait de nombreuses rencontres.
L’intérêt du film réside dans ces rencontres, car François Damiens – rendu méconnaissable pour pouvoir incarner Dany – les a toutes réalisées en caméra cachée. Pourquoi ce choix ? Parce que, comme il l’explique bien lui-même, "ces personnes piégées ne jouent pas, et parce qu’elles ne jouent pas, elles sont plus naturelles et plus convaincantes que les meilleurs acteurs du monde."
Techniquement, le film est un tour de force : il enchaîne une série d’improvisations dans les face-à-face et les dialogues, mais au service d’une intrigue. Soit un an et demi de tournage, six cents heures de rushes, plus de trois cents "victimes" … Pour ne retenir qu’une vingtaine de protagonistes dans le montage final.
Les efforts de Damiens n’ont pas été vains ; "Mon ket" regorge de séquences d’anthologie – qu’il ne faut pas déflorer ici pour ne pas gâcher le plaisir du spectateur. Le film est traversé par un humour délicieusement subversif, et carrément salutaire à l’heure de la dictature du "politiquement correct". Et ce qui achève de rendre "Mon ket" très attachant et sympathique, c’est que Damiens ne tourne jamais en ridicule les personnes qu’il piège ; c’est son Dany dont il se moque allègrement, mais toujours avec tendresse. Son premier long-métrage derrière la caméra a toutes les chances de devenir un film-culte. En tous cas, il restera dans les annales du cinéma belge.