632 Belges se sont envolés ce week-end pour Pékin, la capitale chinoise. Si on avait dû tous les mettre dans le même avion, ça aurait été impossible. En chiffres, c’est l’équivalent de 4 Airbus A320 quand tous les sièges sont occupés… une délégation record. La précédente mission économique en Chine comptait "seulement" 473 membres. "Si une mission chinoise devait venir en Belgique avec une délégation aussi importante proportionnellement à la population, sa délégation compterait 16.000 membres" plaisante Pascale Delcomminette, l’administratrice générale de l’Agence wallonne à l’Exportation et aux Investissements étrangers (AWEX), présente à Pékin.
Du jamais vu dans l’histoire de la diplomatie économique belge
Les Belges, emmenés par la princesse Astrid et 5 ministres (Didier Reynders (MR), ministre des Affaires étrangères, Pieter De Crem (CD & V), ministre en charge du Commerce extérieur, Jan Jambon (N-VA), ministre-président du gouvernement flamand, Willy Borsus (MR), ministre de l’Economie et du Commerce extérieur de la Wallonie et Pascal Smet (sp.a), secrétaire d’Etat de la Région de Bruxelles-Capitale en charge du Commerce extérieur), resteront en République populaire de Chine jusqu’au 22 novembre. La mission compte deux volets : Pékin, la capitale politique et Shanghai, la capitale économique. Le but en une phrase : tenter de s’approprier plus de parts de ce gigantesque gâteau d’un milliard quatre cents millions de consommateurs potentiels.
80 entreprises wallonnes et 53 bruxelloises
Au total cette fois-ci, 312 entreprises et organisations belges sont représentées. Du jamais vu. 53 entreprises sont bruxelloises. La Wallonie annonce la participation de 80 sociétés en plus des institutions académiques et des organismes publics. "Il y aura plus de 600 contacts directs entre les entreprises wallonnes avec des potentiels partenaires chinois, c’est-à-dire des rencontres BtoB explique Willy Borsus (MR), le ministre de l’Economie et du Commerce extérieur de la Wallonie. Ça concerne vraiment tous les secteurs, c’est un peu la particularité de cette mission. On retrouve bien sûr quelques acteurs importants dans le domaine pharmaceutique, dans le secteur des sciences du vivant. Mais aussi dans le secteur agroalimentaire ou des nouvelles technologies. A la vue de la délégation, je pense que chacun a bien perçu que l’avenir passe par la Chine".
Oui, on signera… des "MOU" et des contrats
Une mission économique, c’est aussi une grande opération de communication. Une quinzaine d’entreprises wallonnes ont déjà annoncé qu’elles signeraient un accord avec un partenaire chinois avant même que l’encre soit sur le papier. Bien sûr, il s’agit souvent de MOU ("Memorandum Of Understanding", comprenez une "lettre d’intention pour faire des choses ensemble") et non de contrats formels.
Un contrat de 2 millions d’euros pour la namuroise Vésale Pharma
Certaines entreprises malgré tout ont déjà été un pas plus loin. C’est le cas notamment de Vésale Pharma. L’entreprise compte une cinquantaine de travailleurs, elle est basée à Noville-sur-Mehaigne (Eghezée) et est spécialisée dans la recherche et développement de solutions microbiotiques (traitements à base de levures ou de bactéries). L’entreprise va signer un contrat de distribution de près de 2 millions d’euros sur trois ans avec le groupe chinois Honz Pharma. Cela sera officiellement révélé à demain à Pékin."Honz Pharma est une société spécialisée en pédiatrie en Chine explique Jehan Liénart, l'administrateur délégué de Vésal Pharma. Elle compte à peu près 1000 agents et 30.000 points de vente. Ce contrat porte sur la commercialisation de la nouvelle formulation du Bacilac Child, un complément alimentaire destiné aux enfants, que nous avons mise au point spécifiquement pour le marché chinois. La législation chinoise est particulière. Elle autorise certaines souches différentes de celles qui sont acceptées en Europe. D’autre part, le client a demandé un dosage extrêmement important, en termes de concentration de bactéries. Nous l’avons fait à la demande du client. Nous allons faire une première livraison au premier trimestre 2020. C'est un lot d'amorçage. Et ici, en Chine, c'est déjà 120.000 boites".
L’embargo sur la viande belge sera abordé
Le marché chinois est peut-être énorme mais les producteurs belges de viande de bœuf, de porc et volaille en sont privés. La Chine a imposé un embargo il y a une petite vingtaine d’années. Un des enjeux de la mission portera aussi sur ce volet-là. "Pour obtenir l’autorisation d’exporter, il faut d’abord avoir accueilli chez nous les inspections très pointues de autorités sanitaires chinoises ce qui est un préalable pour la délivrance du précieux sésame qui nous permettrait d’exporter sur le marché chinois explique Willy Borsus. Pour l’instant, nous sommes dans une situation où, pour la viande bovine par exemple, les prix chez nous sont très bas, en dessous des coûts de production. Si on parvient à ouvrir le marché chinois ce sera immédiatement un appel d’air très important. C’est un des objectifs. Je vais rencontrer le ministre chinois de l’Agriculture dans ce cadre-là. Le but est de créer le cadre et, je l’espère, lever un certain nombre d’obstacles administratifs".
La balance commerciale penche en faveur de la Chine
En 2018, la valeur totale des exportations de biens belges vers la Chine s’élevait à 7 milliards d’euros. Sur la même période, la Chine a exporté pour 15 milliards d’euros de biens vers la Belgique. La balance commerciale est donc pour l’instant favorable à la Chine et la Belgique espère que cette mission permettra de travailler à un rééquilibrage. La croissance chinoise, légèrement supérieure à 6% par an, a encore de quoi faire pâlir les pays européens, même si on observe un ralentissement de cette croissance quand on compare aux quelque 10% enregistrés au début des années 2000. Malgré cela, on doute peu que la Chine deviendra, à moyen terme, la première économie mondiale, devant les Etats-Unis.
"Vous êtes venus au bon moment"
Dans ce contexte-là, on comprend pourquoi les sociétés belges se pressent encore aujourd’hui au portillon du géant asiatique. "Vous êtes venus au bon moment" scande Marc Vinck, l’ambassadeur de Belgique en Chine lors de la soirée d’ouverture de la mission à Pékin. Devant les centaines de personnes présentes dans la salle il ajoute " Vous allez être impressionnés par ce que ce pays a à offrir". Avant d’évoquer un point clé de cette mission : la confiance. "Un partenariat doit être marqué par la confiance et cette mission est un signal fort de confiance ".