Chroniques Culture

"Même si je suis une fille, j’aimerais devenir comme toi" : les lettres de fans de John H. Glenn décortiquées

John Glenn à Bruxelles (date inconnue).

© BELGAIMAGE

Aujourd’hui encore, des noms tels que Neil Amstrong ou Youri Gagarine restent mieux connus que ceux de Sally Ride, Mae Jemison ou encore Valentina Terechkova.

Avec aujourd’hui seulement 10% de femmes astronautes, l’aérospatial ne compte que trop peu de modèles féminins dans ses rangs pour inspirer les jeunes filles qui rêvent de conquête spatiale.

Longtemps, nombre d’entre elles ont tenté de s’identifier, "malgré qu’elles soient des filles", à des exemples masculins tels que John H. Glenn.

 

John Glenn au Cap Canaveral (Floride), le 13 février 1962.

Le 20 février 1962, John H. Glenn est le premier Américain à réaliser un vol orbital habité dans l’espace à bord de la capsule spatiale Mercury.

Son décès en 2016, a suscité l’émotion de nombreux grands noms mais, aussi, de centaines de fans anonymes. Parmi eux, des femmes nostalgiques qui se souvenaient de l’impact que l’astronaute avait pu avoir dans leur jeunesse.

Dans le cadre de son projet de recherche, "A Sky Full of Stars : Girls and Space-Age Cultures in Cold War America and the Soviet Union", l’historienne américaine Roshanna P. Sylvester a décortiqué des centaines de lettres de fans écrites par des filles aux Etats-Unis et en URSS à l’intention, notamment, de John H. Glenn.

Le but ? Comprendre comment ces jeunes filles ont vécu ces triomphes spatiaux, et comment ces astronautes ont influencé leur perception de ce à quoi elles pouvaient inspirer.

Astronautes américains - exclusivement masculins - pendant un stage de survie au Panama, juin 1963. Parmi eux, John Glenn (1er en bas en partant de la gauche).

Dans ces lettres, Roshanna constate que les fillettes applaudissent l’astronaute pour sa force et sa bravoure, des qualités souvent considérées comme masculines et qu’elles nient d’ailleurs présenter.

D’autres vont plus loin en partageant à leur idole leur désir de se faire une place dans le milieu scientifique, des technologies, et des mathématiques.

Cependant, elles se refusent toute naïveté car, elles le savent, leur genre est un frein. La formule "même si je suis une fille", est particulièrement récurrente.

Une jeune fille du Minnesota écrit à Glenn : "J’aimerais beaucoup devenir astronaute, mais comme je suis une fille de 15 ans, je suppose que ce serait impossible".

16 juin 1963 : une femme dans l’espace

Le 16 juin 1963, une femme russe – dont l’identité sera d’abord secrète – est envoyée en orbite autour de la Terre.

La nouvelle arrive aux oreilles des fillettes, qui perçoivent une ouverture, et se risquent à des questions plus pointues auprès de John H. Glenn :

Dans le Mississipi, une jeune afro-américaine écrit au nom de sa classe : "Quelles ont été les réactions de nos astronautes masculins lorsque la femme astronaute russe a effectué plus d’orbites qu’eux ? … Pensez-vous, les sept astronautes masculins, qu’une femme ira dans l’espace au cours des deux prochaines années ?"

La position de John H. Glenn sur les femmes astronautes

Pour le peu qu’il ait répondu, ses retours se limitaient à quelques documents joints, sans se prononcer sur la viabilité de leurs aspirations.

La suppression du programme "Woman in space", au début des années 60, avait donné naissance à un sous-comité chargé de la sélection des astronautes au sein de la House Committee on Science and Astronautics.

En juillet 1962, John H. Glenn avait déclaré devant cette sous-commission que les astronautes les plus qualifiés devaient avoir une expérience de pilote militaire, une carrière alors fermée aux femmes. Il poursuit en rappelant que "les hommes partent faire la guerre, pilotent les avions et reviennent pour aider à les concevoir, les construire et les tester. Le fait que les femmes ne soient pas dans ce milieu est un fait de notre ordre social". (Source : The Conversation)

En mars 1962, une jeune fille s’était adressée au président Kennedy pour lui demander les critères pour devenir astronaute. L’Administration de la NASA lui a envoyé une réponse pour le moins décourageante : "Nous ne prévoyons pas actuellement d’employer des femmes sur des vols spatiaux en raison du degré de formation scientifique et de vol, et des caractéristiques physiques, qui sont requis".

Et aujourd’hui ?

Pris dans les stéréotypes de son époque, John H. Glenn a vu sa position sur les femmes astronautes évoluer après son départ de la NASA.

Malgré des obstacles persistants, la NASA a pris des mesures considérables pour plus d’inclusion dans son ensemble. En octobre 2019, ce fut la première sortie 100% féminine dans l’espace et, pour 2024, le projet Artemis promet de faire poser le pied d’une femme sur la Lune.

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