#MeetYourClit : un clitoris géant pour lutter contre les mutilations génitales

Le clitoris de 5 mètres de haut prêté par le Gang du clitoris pour l’action de sensibilisation du GAMS

© RTBF

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Par Sylvia Falcinelli

Un clitoris rouge version XXL, qui se dresse fièrement sur la place de la Monnaie. Une façon pour l’asbl GAMS d’attirer l’attention sur cet organe méconnu, y compris par les femmes. Saviez-vous qu’il mesure entre 8 et 12 cm et qu’il est principalement interne ? Sa partie externe, visible, correspond au gland du clitoris.

Aujourd’hui, selon des chiffres de l’UNICEF repris par l'asbl, 200 millions de filles et de femmes sont confrontées à des mutilations génitales. Le clitoris est coupé, parfois les petites et/ou grandes lèvres aussi. Il y a aussi l’infibulation qui consiste à rétrécir l’orifice vaginal avec recouvrement par l’ablation et l’accolement des petites et/ou grandes lèvres. Sans oublier d’autres pratiques, toujours non thérapeutiques, comme le percement, l’incision, la scarification ou la cautérisation.

"Au GAMS, on observe souvent un continuum de violences", contextualise la directrice, Fabienne Richard. "L’excision, c’est une première violence mais souvent, ensuite, il y a le mariage forcé, les violences conjugales, les violences sexuelles… Donc s’attaquer à la première violence dans ce continuum, aborder la question des droits et de la santé sexuelle, ça a un impact plus large ensuite. C’est une première émancipation."

Où court-on le plus de risques de subir ce type de mutilations ?

Ces mutilations existent sur tous les continents, particulièrement en Afrique de l’Est et de l’Ouest. Selon le GAMS, on peut noter une évolution positive dans certains pays.

"De manière globale on note une diminution dans la tranche d’âge des 14 à 19 ans donc des plus jeunes. On voit qu’il y a des pays où on reste avec des prévalences très haute, je pense à la Guinée en particulier, où on fait des études tous les 3-4 ans. La prévalence est de 97% : quasi toutes les femmes sont excisées. C’est similaire en Somalie", explique Fabienne Richard. "Par contre il y a des pays comme le Burkina Faso ou la Côte d’Ivoire où on a pu voir des diminutions."

© GAMS

Et en Belgique ?

Le GAMS effectue une nouvelle étude dont les résultats seront connus au printemps. Les derniers chiffres datent du 31 décembre 2016. Selon ceux-ci, 25.000 personnes sont concernées : 17.000 femmes excisées/mutilées et 8000 petites filles à risque. Il s’agit d’une estimation. "On prend en considération la population originaire d’une trentaine de pays qui pratiquent, il y a l’Afrique subsaharienne mais aussi par exemple l’Indonésie ou le nord de l’Irak", détaille Fabienne Richard. Sont utilisés le registre national, les données de l’ONE, de Kind en Gezin, de Fedasil… Il faut ensuite, par tranche d’âge, se référer à la proportion de personnes excisées/mutilées en fonction des statistiques du pays d’origine. "On sait qu’on a peu de risque de se tromper pour les pays à forte prévalence. Or en Belgique, les trois pays les plus représentés sont parmi ceux qui pratiquent le plus : la Guinée et la Somalie en particulier".

Les personnes ont été excisées ou infibulées avant d’arriver en Belgique et les filles plus jeunes (de deuxième génération ou arrivées toutes petites), considérées "à risque", sont surtout exposées pendant les périodes de risques scolaires.


Lire aussi : "L’excision est encore pratiquée en Belgique"


Quels sont les leviers efficaces pour protéger les femmes ?

Dans les pays où la pratique est répandue, il faut de la volonté politique mais pas seulement. Si une loi d’interdiction est adoptée, sans travail de sensibilisation et de prévention en parallèle, "cela risque de continuer en cachette".

Au Burkina Faso, les chiffres évoluent favorablement, et c’est lié à un ensemble de mesures : "Là, la loi a été discutée au Parlement avant d’être adoptée. Et il y a eu des moyens débloqués pour former des médecins à la prise en charge des complications, un numéro vert où appeler gratuitement les associations et les services de police si une excision vient d’avoir lieu ou est sur le point d’avoir lieu. Il y a aussi tout un travail communautaire. Le fait que quand il y a un procès, on fait le jugement au village pour que les gens puissent écouter, c’est très important aussi. C’est pris à différents niveaux."

Pour les filles qui vivent en Belgique, la loi, qui date de 2001, peut aussi aider à résister à la pression sociale quand les familles rendent visite à leurs proches dans leur pays d’origine. D’autant plus que l’excision peut se faire à l’insu des parents : "Ça peut être via la grand-mère, la tante… Nous, on forme les parents, quand ils voyagent, à dire qu’il y a une loi en Belgique, l’article 409 du code pénal, avec un principe d’extraterritorialité : même si c’est pratiqué en dehors du sol belge, c’est punissable." Des mamans qui ne veulent pas que leurs filles subissent le même sort et qui ont du mal à le faire comprendre à leurs parents peuvent ainsi se réfugier derrière le cadre juridique.

Quid du droit d’asile ?

En matière d’asile, la Belgique trouve davantage grâce aux yeux de Fabienne Richard que d’autres pays européens. "En 2016 on en était à plus de 1800 petites filles qui avaient obtenu un statut de réfugié pour être protégées de l’excision."

Mais la situation s’est dégradée ces deux dernières années : "Avant les mamans étaient automatiquement reconnues réfugiées quand leurs petites filles obtenaient le séjour, pour être protégées de l’excision. Il y a deux ans le système a changé, on peut avoir une enfant de deux ans avec un statut et sa mère sans rien, en attente pendant des mois pour être régularisée."

Une situation dénoncée par le médiateur fédéral aujourd’hui, comme expliqué dans cet article.

C'est quoi l'excision?

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