Belgique

500 euros pour de l'aspirine ? Avec la pénurie de médicaments, mieux vaut faire attention à la facture d’hôpital

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En temps de pénurie, votre facture d’hôpital peut très vite gonfler si votre médicament n’est pas disponible. C’est ce qui est arrivé à Louise (prénom d’emprunt), l’année dernière, en sortant de son hospitalisation à l’UZ Brussel de Jette. Elle a payé de l’aspirine (acide acétylsalicylique), commercialisée sous le nom Aspégic et administrée à l’hôpital par intraveineuse, 8 fois plus cher que le prix normal.

Quand Louise a dû se faire hospitaliser en septembre dernier, elle ne s’attendait pas à payer un tel prix pour son séjour à l’hôpital. En ordre de mutuelle et d’assurance hospitalisation, elle a dû débourser la somme de 824,42€ pour son séjour de neuf jours à l’UZ Brussel de Jette : " Je suis allée sur le site de l’UZ, j’ai retrouvé la facture et là j’ai vu que c’était plus de 800€ et je trouvais ça un peu élevé étant donné que je n’ai pas eu d’opération ".

La facture peut paraître normale mais quand Louise regarde les détails, elle s’aperçoit que 510,46€ lui ont été comptés rien que pour l’Aspégic. Ce n’est pas la première fois que la patiente est hospitalisée pour les mêmes problèmes de santé. Or, ses anciennes factures n’avaient jamais été aussi élevées.

L’Aspégic, c’est un médicament à base d’aspirine. À forte dose, ses propriétés anticoagulantes sont utilisées en cas de problème cardiaque. Dans le cas de Louise, le médecin a prescrit l’Aspégic 500 mg en solution injectable. Un seul problème : la Belgique n’en a plus.

Rupture de stock ?

Une rupture de stock d’un médicament peut survenir pour plusieurs raisons : des problèmes de fabrication, de disponibilité des matières premières, ou parfois, de rentabilité pour des médicaments destinés aux maladies rares. Or, l’aspirine ne rentre pas dans ce cas de figure.

L’Agence Fédérale des Médicaments et des Produits de Santé (AFMPS) indique, effectivement, une indisponibilité temporaire de l’Aspegic 500 mg IV (pour intraveineuse) depuis le 29 août 2022. Karolien De Prez, porte-parole de l’UZ Brussel, explique le surcoût pratiqué par l’hôpital : " C’est un produit estimé nécessaire par le médecin, qui n’est plus disponible sur le marché belge, et donc cela veut dire qu’on doit trouver un équivalant ou l’acheter à l’étranger. Dans ce cas, nous devons facturer le montant à nos patients. "

L’Aspégic est loin d’être le seul médicament en pénurie. L’AFMPS met régulièrement à jour la liste des produits temporairement indisponibles en Belgique.

Abusif ou légal ?

L’hôpital a-t-il le droit de facturer plus cher un médicament sous prétexte qu’il l’a commandé à l’étranger ? Légalement, oui. Mais le médecin a toujours la possibilité, dans la plupart des cas, d’opter pour un produit équivalent, disponible en Belgique.

Cependant, dans le cas de l’Aspégic 500 par intraveineuse, il n’existe pas d’alternative. Il existe d’autres produits anticoagulants, "mais cela reviendrait à agir 'en mode dégradé', une prise en charge plus compliquée pour le médecin qui devrait gérer d’autres paramètres et d’autres protocoles", explique Serge Van Praet, pharmacien chef de service au CHU Saint-Pierre.

En cas de rupture de stock dans un pays, un fournisseur de médicaments, peut proposer le même médicament sous conditionnement étranger : l’emballage est donc dans une autre langue ou adapté à un autre pays. Mais si cela ne se fait pas, la pharmacie d’un hôpital peut se fournir elle-même à l’étranger, ce qui se répercute sur le prix.

« Eviter que le patient soit victime »

Du côté des mutuelles, on souligne que cela fait des années que le problème de l’indisponibilité de médicaments est connu et que le dossier est dans les mains du Ministre de la Santé Publique, Frank Vandenbroucke.

Claire Huyghebaert est experte médicaments pour les Mutualités Libres et s’inquiète pour les patients victimes de pénurie : " Il faut absolument trouver une solution structurelle pour adapter la réglementation. Régulièrement, nous faisons remonter la problématique. On sait que le dossier est sur la table des autorités pour élaborer une réglementation afin d’éviter les surcoûts aux patients mais aussi pour l’INAMI (Institut National d’Assurance Maladie-Invalidité)."

En effet, la Note de Politique Générale de Santé Publique du Ministre Vandenbroucke mentionne qu’il est prévu d’adapter la réglementation : " Pour éviter des surcoûts pour les patients et l’INAMI en cas d’indisponibilité de médicaments remboursables, une adaptation de la réglementation est en cours d’élaboration, ce qui responsabilisera en même temps l’industrie pharmaceutique, et ce, selon des conditions et modalités qui seront définies après concertation avec les acteurs concernés. "

Une négociation entre les autorités et l’industrie pharmaceutique est en cours. Mais pour l’heure, Louise devra s’acquitter du montant facturé par l’hôpital.

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