Champions League

Manchester City en finale de Champions League : les 8 raisons d'une métamorphose

Manchester City en finale de Champions League : les raisons d'une métamorphose

© PETER POWELL - AFP

Par Erik Libois

Les Cityzens touchent enfin au but : 13 ans après la reprise du club par ses propriétaires émiratis, Manchester City va disputer sa toute première finale de Ligue des Champions. Le succès… de l’argent, mais aussi de l’évolution du projet sportif de Pep Guardiola : moins de romantisme, plus de rendement. Efficiency pays ! Analysons ensemble les raisons du succès.

L’argent

 " On a beaucoup d'argent pour acheter beaucoup de joueurs incroyables " avait ironisé voici quelques semaines Pep Guardiola quand on lui demandait les raisons des succès de son équipe. Depuis 2010, City est en effet le club européen ayant le plus dépensé en transferts : 1,71 milliards d’euros. À titre de comparaison, le PSG n’est que 6e de cette hiérarchie, malgré ses Neymar à 220 millions et Mbappé à 145 millions.

City dépense gras, mais de manière plus répartie : l’achat-record des Cityzens demeure les 76 millions de Kevin De Bruyne… mais des joueurs comme Ruben Dias, Rodri, Joao Cancelo, Riyad Mahrez, Aymeric Laporte et Raheem Sterling ont tous coûté plus de 60 briques... Et ce n’est pas fini : Guardiola disposerait déjà d’une enveloppe de 225 millions d’euros pour le prochain mercato estival…

L’ambition

Dans son histoire, City n’a soulevé qu’une seule Coupe d’Europe : la défunte Coupe des Vainqueurs de Coupe (le moins relevé des trophées continentaux), face… aux Polonais de Gornik Zabrze (2-1), et en 1970 ! Depuis 2008, le propriétaire arabe rêve d’être le premier investisseur venu des sables autorisé à brandir la giga-vase par ses grandes oreilles : finaliste l’an dernier face au Bayern, son confrère qatari du PSG avait failli lui brûler la politesse

Notre président Khaldoon Al Mubarak ne veut pas un jour de sommeil, il ne veut jamais se reposer " a expliqué Pep Guardiola voici quelques semaines. " Il me pousse comme je pousse mon PDG [Ferran Soriano], et notre PDG me pousse. Et avec le Directeur Sportif Txiki Begiristain, nous nous poussons pour être toujours meilleurs. " Avant d’ajouter. " L’argent n’est pas tout. Manchester United dépense aussi de l'argent… Chelsea aussi, tout comme Barcelone et le Real Madrid... Le succès ne dépend pas que de l'argent, des tactiques, des joueurs et du personnel : il dépend de tous ces aspects qui travaillent ensemble et de la mentalité générale d’un club. "

Après la perte du titre l’an dernier, City a relancé ainsi sa machine : la KDB Factory a aligné 21 victoires consécutives et en 2021, elle a remporté 32 de ses 35 rencontres ! Dominée par Chelsea en demi-finale de la Cup, elle peut encore viser le triplé Champions League-Premier League-Coupe de la Ligue.

Manchester City en finale de Champions League : les raisons d'une métamorphose
Manchester City en finale de Champions League : les raisons d'une métamorphose © ANNE-CHRISTINE POUJOULAT - AFP

La remise en question d’un coach

Le " roi sans couronne " qu’on le surnommait déjà, à mesure que les années passaient : bardé de prix domestiques (déjà 9 trophées aux Îles depuis son arrivée à Manchester en 2016), Guardiola courait désespérément derrière sa première finale de Champions League. Car oui : depuis 2010 (la 10e saison de suite donc) City a, chaque fois, participé au Bal des Champions… Et le technicien catalan doit remonter 10 printemps pour trouver trace sur son CV d’une finale de CL comme coach : c’était en 2011, avec son Barça chéri… Pire : avec City, il n’avait jamais franchi le cap des quarts de finale.

En début d’exercice, Coach Pep savait donc qu’il abordait la saison de tous les dangers. Quinquagénaire depuis janvier, il a resigné un nouveau contrat l’automne dernier… alors que certains le plaçaient déjà sur la sellette. 2020 restera marqué d’une pierre noire pour lui : dominé par Liverpool en Premier League, humilié par Lyon en Champions, Guardiola a aussi perdu sa maman, décédée des suites du coronavirus.

Ne dites plus possession, dites transition

Chantre de la possession, apôtre du fameux tiki-taka, Guardiola semble avoir cerné les limites de son approche romantique : il aurait ainsi capté que la recherche de la perfection esthétique pouvait être son plus grand ennemi. D’un jeu de possession centré sur les passes et les incessantes rotations du cuir, City a switché vers un jeu de transition axé sur des reconversions ultra-rapides. Le PSG est tombé plein pot dans le piège… et Riyad Mahrez s’est régalé. Hier à l’Etihad Stadium, City a touché le cuir 44% du temps pour 56% aux petits gars de Paname… L’efficacité a fait le reste.

 

Manchester City en finale de Champions League : les raisons d'une métamorphose
Manchester City en finale de Champions League : les raisons d'une métamorphose © Federico Gambarini - BELGAIMAGE

Une attaque à quatre têtes

Pour mener à bien sa nouvelle animation riche en éclairs fulgurants, Guardiola s’appuie sur un entrejeu où les deux travailleurs Gündogan et Rodri aspirent les kilomètres et les ballons, pour permettre aux stylistes offensifs de torpiller. Exit les " vieux " Sterling et Agüero, City évolue sans avant-centre spécifique, notre KDB reprenant le rôle de faux 9 (inventé, déjà, au sein du Barça de Guardiola…) pour imposer ses épaules et son moteur… et surtout servir ses caviars aux 3 gauchers magnifiques des avant-postes : Phil Foden, Bernardo Silva et Riyad Mahrez.

Une défense en béton

Champagne devant, gruyère derrière " : longtemps, le City façon Pep a largement privilégié les procédés offensifs aux mécanismes défensifs. Avec ses investissements à l’arrière, son pressing haut, son marquage individuel entre les lignes et sa charnière axiale Ruben Dias-John Stones, la direction sportive mancunienne a bâti une muraille derrière : avec 29 clean-sheets dans l’absolu et 24 buts encaissés en Premier League, City a aujourd’hui la meilleure défense des championnats du Big Five. De la 2e journée de Champions League jusqu’aux 8e de finale inclus, son gardien Ederson est resté 7 matches invaincu, soient 790 minutes : 2e meilleure performance absolue en Champions, derrière les 995 minutes de l’Arsenal de 2006.

Manchester City en finale de Champions League : les raisons d'une métamorphose
Manchester City en finale de Champions League : les raisons d'une métamorphose © Martin Meissner - BELGAIMAGE

La sérénité mentale d’un groupe

Mon expérience me dit qu’il faut rester soi-même, ne pas essayer de jouer comme un autre " : autre déclaration récente de Guardiola pour décrire son approche des derniers grands matches. Le collectif mancunien dégage une confiance en ses moyens et une sérénité mentale qui lui donne une longueur d’avance sur la concurrence. Menée à Paris au match aller, l’équipe bâtie autour de King Kev aurait pu s’énerver et craquer sous la pression d’un nouveau rêve de Champions League en passe de s’envoler. Là où les stars parisiennes ont pété une durite au retour, voyant les événements leur échapper, les Cityzens ne se sont jamais énervés, croyant en leurs propres ressources et finissant par imposer leur force tranquille par les coups de pattes et les jaillissements de leurs solistes.

La fraîcheur d’un noyau

Pep Guardiola dispose d’un noyau de 33 joueurs : seuls 4 d’entre eux (dont deux gardiens…) n’affichent pas de minutes cette saison. Entre les deux matches face au PSG, le technicien catalan n’a aligné à Crystal Palace que… 3 joueurs titulaires trois jours plus tôt – avec, toujours, le succès au bout de la rencontre. Le coach de City est un adepte de la rotation, surtout en cette année Covid pleine d’incertitudes et condensant les calendriers. Il a ainsi nourri la fraîcheur physique et mentale de son groupe, maintenant la concurrence et conservant les joueurs en éveil, tout en préservant une bonne ambiance de travail. Même en fin de parcours (et d’ailleurs en partance), un Agüero reste concerné par le trajet de groupe.

C’est ce que City appelle le Squad Depth (traduisez " profondeur d’effectif ") : plutôt que d’investir dans des étoiles individuelles, le club croit en la valeur du groupe. Naguère tenté par la bling-bling culture, les propriétaires de City ont appris qu’un club de foot performant s’appuyait d’abord sur des valeurs de partage et de progression collective.

Pour tout cela, les Cityzens rêveront, fin mai à Istanbul, d’un premier succès d’envergure internationale, 10 ans après la première Cup de l’ère émiratie.

 

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